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    Demain nous appartient : la série a-t-elle raté l'occasion de faire mourir l'un de ses personnages ?
    Jérémie Dunand
    Jérémie Dunand
    -Chef de rubrique télé / Journaliste
    Passionné de séries en tous genres, mais aussi d'horreur et de teen movies, Jérémie Dunand a été biberonné aux séries ados et aux slashers des années 90, de Buffy à Scream, en passant par Dawson. Chef de rubrique télé, il écrit aujourd'hui principalement sur les séries et unitaires français.

    Avec l'intrigue Collision qui a secoué la série début novembre, "Demain nous appartient" est-elle passée à côté de quelque chose en ne faisant mourir aucun personnage ? Les scénaristes auraient-ils peur de prendre des risques ? On fait le point.

    Fabien Malot/Telset/TF1

    Début novembre, Demain nous appartient offrait à ses fans une intrigue choc - un terrible accident de bus impliquant la plupart des personnages de la série - qui allait les tenir en haleine durant de nombreux épisodes. Un rebondissement de plus au sein d'un feuilleton qui, depuis son lancement en juillet 2017, n'a eu de cesse de surprendre et de multiplier les coups de théâtre et les histoires dramatiquement fortes, pour finalement s'imposer mois après mois comme un rendez-vous immanquable pour de plus en plus de Français (le programme ayant plusieurs fois battu son record d'audience au cours des dernières semaines).

    Seulement, tout portait à croire que l'un des héros, ou en tout cas un personnage récurrent identifié et présent depuis assez longtemps pour que cela fasse mal, allait périr dans cet accident teasé de manière massive par la première chaîne à grand renfort de bandes-annonces et de posts sur les réseaux sociaux. On nous promettait que "plus rien ne serait jamais comme avant", et certaines rumeurs faisaient réellement état de la mort d'une figure marquante de Sète. Et finalement, tout le monde est sorti vivant de cette collision entre un bus et la voiture de Samuel Chardeau. Évidemment, les conséquences ont été lourdes (Jessica est devenue aveugle, Clémentine paraplégique, et Noor est restée plongée dans le coma durant deux semaines), mais quand même, on ne peut s'empêcher de penser que Demain nous appartient est passée à côté de quelque chose.

    À côté de la possibilité de marquer encore plus durablement les esprits et de prendre des vrais risques, qui n'auraient pas seulement fait pleurer dans les chaumières mais auraient surtout potentiellement pu relancer l'intrigue de manière très intéressante, en explorant la thématique du deuil de manière plus frontale et plus réaliste que cela n'a été fait jusqu'à présent par les auteurs. Après tout de nombreuses séries ont eu le courage de faire mourir des figures centrales de leur histoire (Grey's Anatomy avec Derek ou Newport Beach avec Marissa, pour ne citer qu'elles) et en sont ressorties plus fortes narrativement, comme si la suppression de ce personnage iconique, devenu un poids par certains aspects, leur avait donné un second souffle bienvenu. Encore toute jeune, avec à peine un an et demi au compteur, Demain nous appartient s'inscrit bien sûr dans un cas de figure un peu différent. Mais le besoin d'une prise de risques est bel et bien là et ce qui s'est passé ces dernières semaines dans la série portée par Ingrid Chauvin en est la preuve.

    Demain nous appartient, la série qui refuse de faire mourir ses personnages ?

    Souvenez-vous, avant que ce terrible accident de bus ne survienne, c'est le sort de Lucie Salducci, incarnée par Lorie Pester, qui a passionné les téléspectateurs de TF1 tout au long du mois d'octobre. Lucie était persuadée, à cause d'une vision de la médium Oriane Vasseur, qu'elle allait se faire tirer dessus et mourir. Et effectivement, blessée par Karim, son collègue, au cours d'une intervention, la jeune femme s'était retrouvée dans le coma, entre la vie et la mort, et avait même fini par faire un arrêt cardiaque de plusieurs minutes... avant de retrouver des couleurs grâce à un ultime massage cardiaque de Victoire. On avait cru à la possibilité de la mort de Lucie (Lorie aurait très bien pu vouloir se concentrer à nouveau sur sa carrière de chanteuse) et finalement les scénaristes avaient préféré être cléments avec elle. Ce qui en soi n'aurait pas été un énorme problème si ces mêmes auteurs ne nous avaient pas à nouveau fait le coup du coma avec Noor quelques épisodes plus tard.

    Fabien Malot/Telsete/TF1

    Là encore l'adolescente a fini par s'en sortir et c'est précisément à ce moment-là que le bât a commencé à blesser. Pourquoi mettre en scène deux tragédies se terminant en coma à quelques semaines d'intervalle si c'est pour que tout se finisse bien à chaque fois ? Pire, si l'on se replonge dans les 340 épisodes et quelques de Demain nous appartient diffusés à ce jour, on se rend rapidement compte que personne, ou presque, ne meurt jamais vraiment parmi les héros de la série. Bien sûr, on caricature un peu, mais Martin Constant, retrouvé mort dans un tonneau au cours de la première saison, a fini par réapparaître bien vivant quelques mois plus tard (il avait en réalité fait croire à son décès pour les besoins d'une enquête d'infiltration). Et puis il y a eu Lola, qui a elle bel et bien été assassinée pour de vrai, mais dont on ne cesse de voir le fantôme depuis fin octobre. Un moyen peu subtil de traiter le deuil via le personnage de Timothée, mais surtout de garder le personnage et sa comédienne, Alice Révérend, appréciés des fans, au sein de la série. Bref, une prise de risque quasi zéro sur ce plan là qui commence à devenir embêtante, malgré toutes les qualités que l'on peut trouver à Demain nous appartient.

    Surtout qu'il n'était pas très compliqué d'imaginer la mort d'un des personnages dans l'accident de bus. Peut-être pas Noor, car la famille Beddiar a beaucoup souffert depuis le début de la série et a déjà subi la perte d'un enfant lors du tout premier épisode en 2017 (une mort qui avait eu peu de conséquences dans un premier temps avant que les auteurs ne s'en rappellent dernièrement d'une jolie manière pour expliquer, en partie, la trajectoire de Leïla). Mais Samuel, Mathias, Sandrine, Lucas, ou même Clémentine, la prof de sport incarnée par Linda Hardy, auraient tous pu faire de bons "candidats", dont la mort aurait créé d'infinies possibilités pour Jessica, Leïla, les Lazzari, ou encore Maxime, qui, on s'en doute, aurait été dévasté par la mort de celle qu'il aime en secret. Car pour l'instant, les seuls décès durables auxquels nous avons eu droit sont ceux de personnages secondaires qui ont fait les frais des intrigues policières et autres serial killers, dont celui d'Elisabeth Vallorta, retrouvée morte dans une poubelle (paix à son âme), et dont les conséquences sur Bart ou le reste du clan Vallorta ont été quasi inexistantes. Et on ne vous parle même pas de ce pauvre Bastien, qui est lui aussi plongé dans le coma depuis près d'un an et pourrait bien ne jamais en sortir, à moins que son interprète, Joffrey Platel, ne se décide à revenir dans la série un jour.

    Évidemment, on ne souhaite pas à tout prix la mort d'un des héros du feuilleton de TF1 (n'allez pas nous accuser de sadisme). Mais à force de nous proposer des situations mortelles tout en se refusant à faire mourir l'un de ses personnages, Demain nous appartient a fini par nous décevoir (un petit peu). On ne doute pas un instant que les rebondissements vont continuer à se multiplier au cours des prochains mois (la découverte de la liaison Clémentine-Maxime promettant déjà de faire des ravages), mais un peu plus d'audace ne ferait sûrement pas de mal. Pour le prime prévu en 2019 peut-être ? Allez, on y croit.

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