Il y a eu Michael Mann, J.J. Abrams, Christopher Nolan ou encore les frères Scott, Ridley et Tony. Cette fois-ci, c'est à un studio que les éditions Playlist Society s'attaquent, avec "Un monde parfait selon Ghibli". Et pas n'importe lequel : celui dont l'impact public et critique n'a cessé de grandir au cours de ces vingt dernières années avec, entre autres, deux Oscars (dont un pour l'ensemble de son oeuvre) et un Ours d'Or à Berlin pour son co-fondateur Hayao Miyazaki. Un succès pourtant loin d'être gagné, car c'est pour contourner les refus auxquels ils faisaient face et produire leur longs métrages que le réalisateur a créé la société avec Isao Takahata et l'aide Toshio Suzuki.
Déjà auteur de "Terrence Malick et l'Amérique", Alexandre Mathis se tourne cette fois-ci vers le pays du Soleil Levant et le studio qui a acquis le statut d'équivalent japonais de Disney... pour mieux contourner ce titre. Car si chacun de ses films fait office d'événement, Ghibli se distingue de son homologue américain par ses thèmes, toujours autant d'actualité (si ce n'est plus qu'avant), entre le féminisme et l'écologie, sujets abordés dans une esthétique de contes où la magie et l'ingénierie se côtoient. S'il est souvent question d'utopie, leurs oeuvres ne sont pas naïves pour autant, et il n'y a qu'à voir Le Tombeau des lucioles ou Le Vent se lève pour s'en convaincre. Ou réaliser que ses auteurs pointent souvent nos dérives du doigt.
Comme dans "Le Voyage de Chihiro", son plus gros succès mondial :
Que l'on soit expert ou non du studio, "Un monde parfait selon Ghibli" se révèle tout aussi passionnant et accessible pour les connaisseurs que pour les néophytes, à qui il offrira un autre regard sur les films du studio. Non sans leur apprendre des infos pour le moins étonnantes comme le pessimisme d'Hayao Miyazaki, qui a plus d'une fois tenté de couper au traditionnel "happy end" avant de changer d'avis grâce à l'intervention du regretté Takahata, qui s'est donc avéré être plus optimiste que son compère, malgré ce que laissaient entrevoir Le Conte de la Princesse Kaguya, son dernier long métrage, ou Le Tombeau des lucioles, toujours considéré comme l'un des films d'animation les plus tristes de l'Histoire.
S'il est également question des autres réalisateurs du studio, l'accent est bien évidemment mis sur Miyazaki et Takahata, ce qui permet à Alexandre Mathis d'ouvrir sur l'avenir de Ghibli. Et surtout son futur sans ses créateurs. Lequel s'annonce pour l'instant flou, aucun metteur en scène n'ayant réellement réussi à reprendre le flambeau alors que des rumeurs de fermeture de ce monument de l'animation font souvent surface. Si ça n'était pas évident avant, ce livre devrait vous convaincre de son importance vitale dans le paysage animé, et vous donner envie de revoir leurs oeuvres, forts des quelques pistes qu'il vous aura données, en attendant de voir ce qu'il nous réserve ensuite.
"Un monde parfait selon Ghibli" d'Alexandre Mathis - Édité chez Playlist Society - Disponible - 14 euros