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    Sexe, torture et savants fous dans La Femme la plus assassinée du monde : c'était quoi le Théâtre du Grand-Guignol ?

    La violence et le sexe font vendre, c'est un fait. Avant les films de genre, un curieux théâtre a exploité ces ressorts au tournant du XIXe siècle. Retour sur ce phénomène remis au goût du jour dans La Femme la plus assassinée du monde sur Netflix.

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    On connait tous Guignol, cette marionnette dont les spectacles enfantins font partie de la culture populaire française, mais les jeunes générations ne saisissent pas forcément la référence au Grand-Guignol, qui est au cœur de l'intrigue du film La Femme la plus assassinée du monde, incarnée par Anna Mouglalis, sur Netflix depuis le 7 septembre.

    Pourquoi "Grand Guignol" ?

    Lancé en 1897 par Oscar Méténier, un agent de police aux mœurs plus que libérales pour l'époque, le théâtre du Grand-Guignol (du Guignol pour les grandes personnes) était installé dans une ancienne chapelle. La première intention de son fondateur est de faire du divertissement populaire pour sensibiliser les spectateurs à la morale. Mais avec le succès du drame Lui !, un huis clos dans une chambre d'hôtel entre une prostituée et son souteneur, le Grand-Guignol invente un genre qu'il poussera à son paroxysme.

    Sous l'impulsion de l'ambitieux dramaturge Max Maurey, Méténier exploite le lieu, dans une impasse du quartier de Montmartre, pour mettre le public dans une ambiance lugubre avant même que commence le spectacle. En effet, à la fin du XIXe siècle, ce quartier de Paris était particulièrement mal famé et suscitait moult légendes urbaines. Voyant que des spectatrices s'évanouissent pendant le spectacle, Maurey fait placer un médecin dans la salle pour alimenter le climat de peur dans l'auditoire. Mauvaise idée : le docteur lui-même perd connaissance lors de son premier soir de permanence. Il ne sera pas rappelé le lendemain !

    Des thèmes éternels

    Destiné à un public modeste, celui des faubourgs de Paris et des lecteurs de faits divers, le Grand-Guignol reposait sur des principes immuables : mettre en scène des personnages issus des classes populaires, à l'inverse du théâtre classique ou du boulevard ; alterner les saynètes légères à l'humour grossier et les pièces d'horreur sans tabou ; recourir aux maquillages, aux trucages et aux effets optiques pour impressionner les spectateurs. Des litres de faux sang étaient versés, des machines de prestidigitation faisaient croire à des démembrements et les auteurs n'hésitaient pas à clore leur pièce par la strangulation d'un enfant sur scène.

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    Violences sexuelles, occultisme, cobayes humains, cruauté et mauvais traitements… Les sujets les plus extrêmes étaient mixés les uns avec les autres dans une surenchère horrifique pour choquer toujours plus le public. Il n'y a qu'à lire les titres des pièces du dramaturge André de Lorde qui ont fait la renommée de ce lieu pour s'en rendre compte : La Dernière Torture, L'Horrible Expérience, Un crime dans une maison de fous, L'Enfant mort, Le Cercueil de chair… Nombre de ces pièces à succès seront adaptées au cinéma pour être montrées à un plus large public.

    La fin d'un monde

    Même si les personnalités de l'après-guerre continuent de s'octroyer une soirée frissons lors de leur passage à la capitale, le public rechigne à retourner dans un lieu dont l'occupant allemand raffolait. De plus dans les années 50, il se détourne de ces spectacles qui ont du mal à concurrencer la montée en puissance du cinéma. Les effets spéciaux réalisés en studio sont plus réalistes et plus impressionnants. Les auteurs du théâtre tentent de diversifier et de moderniser les thèmes abordés mais ils ne peuvent pas rivaliser avec les nouveaux standards de l'horreur qui s'imposent avec le succès des longs métrages tels que Les Yeux sans visage et Psychose, tous deux sortis en 1960.

    Après sa fermeture en 1962, le théâtre a accueilli de nouvelles troupes et il est depuis 2004 le siège de l'International Visual Theatre de la comédienne Emmanuelle Laborit. L'expression "Grand Guignol" lui a survécu et a traversé les frontières. En français (avec l'adjectif dérivé grand-guignolesque) comme en anglais, elle est utilisée pour désigner des événements macabres, invraisemblables et outranciers.

    Et Paula Maxa ?

    Recrutée par le Grand-Guignol en 1917, Paula Maxa devient vite la star du genre. Surnommée "la Sarah Bernhardt de l'impasse Chaptal", elle se révèle être une comédienne née pour ces pièces, avec un jeu expressionniste et physique qui fait se déplacer tout Paris. "Une espèce de folie s'empare alors de moi et je crie, je crie… à m'en donner la chair de poule. Le jeu de mes partenaires et les ampoules de carmin liquide que j'écrase sur moi font le reste et complètent l'illusion", commentait-elle dans ses mémoires. Avec le comédien Georges Paulais, elle forme le duo vedette du théâtre, elle dans le rôle de la victime, lui du bourreau.

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    Sa légende dit qu'elle a été assassinée 10 000 fois sur scène, d'où le sobriquet et le titre du film de Franck Ribière. Inquiet qu'elle fasse de l'ombre à son établissement, Jack Jouvin, le directeur du Grand-Guignol à partir de 1930, la renvoie. Elle fonde alors le Théâtre du Vice et de la Vertu en 1932 et fait deux apparitions au cinéma. Elle se lance également dans la chanson, espérant que le public la suive dans un registre plus léger, mais elle ne retrouvera jamais sa popularité d'antan. Elle est morte dans l'oubli le plus total en 1970.

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