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    Searching - Portée disparue : "Ce film est avant tout un thriller, une énigme à résoudre !"
    Emmanuel Itier
    Emmanuel Itier
    -Correspondant
    Basé à Los Angeles, Emmanuel Itier accompagne AlloCiné sur les sorties américaines, en assurant interviews/junkets et couverture d’événements US.

    Une enquête qui se déroule entièrement à travers des écrans ? C’est le pari fou du réalisateur Aneesh Chaganty avec "Searching – Portée disparue", au cinéma le 12 septembre prochain. AlloCiné l’a rencontré, ainsi que les deux acteurs principaux.

    AlloCiné : Pouvez-vous nous parler de la difficulté que vous avez eu à imaginer et tourner ce film unique de par son style visuel ?

    Aneesh Chaganty : Ce qui est amusant c’est que nous avions refusé plusieurs fois de faire un film se passant entièrement sur des écrans d’ordinateur. La compagnie du légendaire réalisateur Timur Bekmambetov (Wanted, Ben Hur) était derrière ce projet, intitulé Searching. Timur était fan de mes court-métrages et il savait qu’ayant travaillé chez Google, où je réalisais des pubs, j’étais le candidat idéal pour mettre en scène ce film qui lui tenait à cœur. Mais j’étais obstiné et je ne voyais vraiment pas comment nous pouvions créer un film avec de vrais émotions et un vrai suspense via des écrans d’ordinateur. J’ai continué à leur répondre négativement malgré le budget raisonnable offert et le fait que je pouvais enfin réaliser un long-métrage. Ce jeu de ping-pong avec Timur a mis un certain temps à se résoudre jusqu’au jour où, avec mon partenaire et co-scénariste Sev Ohanian, nous avons tous les deux eu la même idée d’une scène d’ouverture parfaite pour Searching - Portée disparue. C’est devenu la scène que vous verrez et elle a servi de déclic pour nous faire comprendre qu’il y avait en fait moyen de créer un film à grand suspense et avec beaucoup d’intensité émotionnelle. Au fur et à mesure de la mise en place de ce film ultra complexe à tourner nous nous sommes aussi rendus compte qu’avec un peu de chance le public allait vite oublier qu’il regarde des écrans d’ordinateur du début à la fin…

    Quel fut le plus grand défi de ce film ?

    Aneesh Chaganty : Sans hésitation, le montage ! Car toutes les images que nous filmions étaient des images d’écran d’ordinateur et de téléphone, de go-pro, etc. C’était donc un véritable rubik’s cube à assembler et sans mode d’emploi. Nous avions juste une histoire avec des dialogues solides pour permettre de donner un sens tangible à cette entreprise. Sans compter que nos monteurs bossaient avec un équipement primaire, deux ordinateurs très simples qui plantaient sans cesse. Je remercie mes monteurs qui nous ont sauvés du désastre. Nicholas D. Johnson et Will Merrick méritent un Oscar ! Evidemment je ne vais même pas parler du nombre de mémoire vive que nous avons dû utiliser pour ce film puisque tout est constamment digitalisé et n’existe que sur des RAM d’ordinateurs.

    Sony Pictures Entertainment Deutschland GmbH

    Est-ce que ce processus influe sur la mise en scène des acteurs ?

    A.C. : Oui car il s’agit de tourner un film live et ensuite de l’inclure dans un film animé par un ordinateur. Tout ce que nous tournions dans le "vrai" monde a été filmé par une armée de caméras go-pro, d’Iphone et de mini drones. Et toutes ces images sont ensuite digitalisées dans l’ordinateur puis "mises en page", animées afin de donner l’impression que tout se passe sur des écrans d’ordinateurs ou de téléphones portables. Pour les acteurs j’imagine que ce fut déconcertant car ils ne savaient pas vraiment ce que nous allions faire des divers "moments" que nous tournions avec eux. De plus quand vous voyez John Cho par exemple taper sur l’ordinateur, il doit donner l’impression qu’il sait où regarder sur l’écran et où se trouve le clavier alors qu’en fait il n’a même pas d’ordinateur devant lui car ce “monde” est ensuite recréé au montage et en post-production. Il y a aussi très peu de conversations live et d'interactions entre les acteurs puisque la plupart du temps ils communiquent via écrans interposés.

    c'était déconcertant de ne pas avoir en permanence John devant moi

    Est-ce que le fait que vous, acteurs, étiez rarement en face l’un de l’autre a rendu les choses plus compliquées ?

    Debra Messing : Oui, absolument, c'était déconcertant de ne pas avoir en permanence John devant moi pour me donner la réplique. Ce fut une première pour moi. En même temps je suis fascinée par la technologie et donc j’ai beaucoup appris en tournant ce film. Je devais imaginer en permanence un écran devant moi ! Je suis tellement reconnaissante envers Aneesh pour cette expérience unique où l’on a créé un nouveau langage cinématographique.

    John Cho : Pour moi c’était un pas de plus dans le monde des effets spéciaux. Avec Star Trek j’ai l’habitude de tourner sur des fonds verts mais c’est vrai qu’ici il a fallu encore plus donner libre cours à mon imagination. D’autant que par moment, certains décors, comme l'intérieur de l’Enterprise de Star Trek, sont construits en taille réelle afin que tous les acteurs puissent jouer les uns en face des autres. Mais avec Searching, comme l’a expliqué Debra, ce ne fut que très, très rarement le cas.

    Au final de quoi parle vraiment ce film et quel regard portez-vous sur la technologie d’aujourd’hui ?

    John Cho : En fait, pour moi, ce film est avant tout un thriller, un film à suspense, une énigme à résoudre ! Evidemment ce film dit aussi qu’il ne faut pas tomber dans le piège de la technologie et en devenir son esclave. Il ne faut pas se perdre dans les divers écrans de nos portables, tablettes et autres ordinateurs.

    Debra Messing : Que l’on aime la technologie ou pas elle n’est pas prête de disparaître. Il nous faut donc dialoguer entre nous, surtout entre générations, et apprendre comment mettre la technologie à notre service et non l’opposé. Ce film c’est aussi un regard sur la famille. Comment en tant que parents on croit connaitre ses enfants tout en se trompant profondément. Il faut donc apprendre à mieux nous comprendre, à nous retrouver et je crois que la technologie peut nous y aider.

    Sony Pictures Entertainment Deutschland GmbH

    A.C. : Je pense que l’on "tire" trop facilement sur la technologie aujourd’hui et tous les moyens de communication à notre portée. En fait je pense que la technologie est aussi bonne que mauvaise. Cela dépend comment vous l’utilisez et pendant combien de temps par jour ! Je pense que ce film montre que toute technologie n’est qu’un outil à notre service et qu’il ne faut surtout pas remplacer nos relations humaines par des relations uniquement virtuelles. Ce qui est intéressant avec Searching c’est de voir que la technologie qui est à l’origine du problème, du drame dont vont souffrir nos protagonistes est aussi, à la fin, la solution qui va les sauver et leur redonner un souffle de vie. C’est un film qui incite au dialogue, sans claquer la porte aux divers choix qui nous sont offerts. C’est pour cela que j’ai vraiment aimé filmer cette aventure fascinante autant sur le plan technologique que sur le plan humain.

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