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    Dans "La Fête des mères", je mets un peu à mal la notion d’instinct maternel...
    Laetitia Ratane
    Laetitia Ratane
    -Rédactrice en chef adjointe
    Très tôt fascinée par le grand écran et très vite accro au petit, Laetitia grandit aux côtés des héros ciné-séries culte des années 80-90. Elle nourrit son goût des autres au contact des génies du drame psychologique, des pépites du cinéma français et... des journalistes passionnés qu’elle encadre.

    Rencontre avec Marie-Castille Mention Schaar, réalisatrice du film choral émouvant et déculpabilisant, emmené par Audrey Fleurot, Clotilde Courau, Vincent Dedienne ou encore Nicole Garcia...

    UGC Distribution

    AlloCiné : La maternité a déjà eu quelques visages marquants au cinéma. Vous avez choisi d'aborder la thématique à travers le genre du film choral. Quel regard souhaitiez-vous proposer et quels clichés souhaitiez-vous évacuer ?

    Marie-Castille Mention Schaar: Le film choral était le genre idéal pour s’approcher de la vie. La vie commence en sortant du ventre de notre mère. Et nous avons tous une relation unique, complexe, riche avec celle qui nous mis au monde. J’avais besoin de cette richesse, de ce foisonnement de personnages qui comme dans la vie, peuvent seulement se croiser l’espace d’un instant. Et dans la vie, il y a des sourires et des larmes.

    Lorsqu'on fait un film choral, se pose vite la question du casting, souvent 4 étoiles. Aviez-vous une idée préalable, une envie d'acteurs ou d'actrices pour votre choeur ?

    Ce qui me guide toujours dans un casting, c’est la correspondance entre un personnage et un acteur. Rien d’autre. Y croire. Ne pas m’interdire de composer ce chœur avec des acteurs qui sont à priori, de familles, d’univers différents, à partir du moment où pour moi, première spectatrice, ils sont justes pour le rôle.

    Vous avez déjà, sous des angles différents et plus ou moins directement, abordé la maternité que ce soit dans Bowling ou dans Le Ciel attendra dans lequel le regard maternel est précieux. Est-ce un angle qui vous tient particulièrement à cœur ?

    C’est peut-être plus les combats qui me tiennent à cœur. Celui de garder le droit de naître dans sa ville pour Bowling. Celui de la déradicalisation pour Le Ciel Attendra. Je suis particulierement émue par les combats menés par les femmes…

    Vous mettez en outre beaucoup de vécu dans vos films. Que ce soit le vôtre (Ma Première fois) ou celui des autres (Les Héritiers, Bowling…). Qu'en est-il pour La Fête des mères ?

    On ne peut pas écrire un film sur le rapport à la filiation et à la maternité sans mettre un peu de la fille et de la mère que je suis… Mais pas forcément là où le croit…

    Certaines scènes mettent en relief une sorte "d'abus de pouvoir" comme vous le dites vous-même, de la mère, qui sait mieux que le père, dont elle se "fout de la fête" ou qui "se sent supérieure parce qu'elle s'est reproduite". Une vision qui fait tomber quelque peu la figure maternelle de son piédestal….

    Oui, on a beaucoup de pouvoir en devenant mère. Et on peut en abuser. On peut prendre beaucoup de place et en laisser trop peu au père. Je mets un peu à mal aussi la notion "d’instinct maternel" …

    Est-ce à dire que les fêtes des mères et pères sont des célébrations dépassées aux vues des compositions familiales d'aujourd'hui ? Certaines écoles mettent en place la fête des gens qu'on aime. Quel est votre avis là-dessus ?

    Je n’ai pas vraiment d’avis. Les gens qu’on aime, essayons de les célébrer à chaque fois qu’on le peut.

    Mettre en scène une femme présidente de la République Française ET mère (jouée par Audrey Fleurot), c'est audacieux. Que fallait-il faire ou ne pas faire à son sujet ?

    Ce qui m’intéressait c’était une mère ET présidente de la République. Pour explorer l’idée que toutes les femmes sont égales devant ce mystère de la maternité et qu’on peut être désemparée, déprimée, déstabilisée dans cette relation avec son enfant quelque soit notre statut social professionnel. Et puis comme Geena Davis le dit, "if she can see it, she can be it"…

    Vous explorez la dualité entre être mère et faire carrière à travers cette figure nouvelle qui plus est en plein baby blues. Une manière de montrer qu'on est loin d'avoir tout réglé sur la question  en termes de pression sociale ?

    Oui. Quelles seraient les réactions des Francais si la femme qu’ils ont élue à la Présidence accouchait pendant son mandat ? Quand on voit la difficulté, les à priori, les réactions que les femmes rencontrent encore bien trop souvent dans le monde du travail... Seront-elles aussi disponibles, compétentes, attentives, motivées...

    Lors d'une scène très émouvante, Carmen Maura dédramatise le poids que l'on se met sur la maternité en particulier et sur la parentalité en général en disant à sa fille : "S'il pouvait parler, ton bébé te dirait : Relax maman je t'aime."

    Si on peut sortir de ce film en se déculpabilisant un peu par rapport à tous les reproches qu’on peut se faire en tant que mère... Tout ce qu’on fait mal... Tout ce qu’on ne fait pas. On est toutes pareilles. Et on sait bien que nos enfants nous reprochent toujours quelque chose comme nous, nous le reprochons à nos mères. Tout va bien !

    Votre film peint également de beaux personnages masculins incarnés par Vincent Dedienne, Pascal Demolon ou Gustave Kervern. Un contrepoint essentiel ?

    Oui. Montrer aussi cette douceur et cette sensibilité chez ces fils, chez ces pères ou futurs pères.

    Dans quelle mesure vous êtes vous inspirées des "mères courages", ou plus généralement marquantes du cinéma ? Y'a t-il un film que vous aimez particulièrement sur la thématique ?

    Deux films sur ce thème ont marqué ma vie : Terms of Endearment  avec Shirley MacLaine et Debra Winger. Et Le Choix de Sophie avec Meryl Streep…

    Propos recueillis par Laetitia Ratane, le 16 mai 2018.

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