Les Sentiers de la gloire de Stanley Kubrick
Avec Kirk Douglas, Ralph Meeker, Adolphe Menjou
De quoi ça parle ?
En 1916, durant la Première Guerre mondiale, le général français Broulard ordonne au général Mireau de lancer une offensive suicidaire contre une position allemande imprenable, surnommée "La fourmilière". Au moment de l'attaque, les soldats, commandés par le colonel Dax, tombent par dizaines et leurs compagnons, épuisés, refusent d'avancer. Les hommes du régiment sont alors traduits devant un conseil de guerre pour lâcheté.
Le contexte
Pour son 4e long-métrage, Stanley Kubrick décide d'adapter un roman d'Humphrey Cobb, Paths of Glory, dont le titre est emprunté à Thomas Gray, un poète anglais du XVIIIe siècle : "Les sentiers de la gloire ne mènent qu'à la tombe." Le ton est donné d'emblée : Les Sentiers de la gloire sera un brûlot antimilitariste. Pour son livre, Cobb, ancien combattant durant la Grande Guerre, s'est inspiré de l'affaire des caporaux de Souain, quatre soldats français fusillés pour l'exemple en 1915 pour s'être dérobés devant l'ennemi allemand lors d'une offensive suicide.
A l'origine, Stanley Kubrick édulcore le scénario de Calder Willingham et Jim Thompson afin de le rendre plus commercial -les trois soldats condamnés sont sauvés de justesse- mais c'est sans compter l'implication de Kirk Douglas qui s'est battu pour que United Artists produise le projet. L'acteur, qui porte le film sur ses épaules et est connu pour ses positions pacifistes, refuse le nouvel happy end imposé par Kubrick.
La polémique
Plus qu'un film de guerre, Les Sentiers de la gloire est un film contre la guerre, voire contre l'armée. L'opposition ne se joue pas entre deux camps -les Allemands n'apparaissent d'ailleurs pas dans le champ de la caméra- mais à l'intérieur d'un même camp, entre Dax (Douglas) et ses supérieurs. La hiérarchie militaire est mise à mal, les soldats ne sont que des pions, sacrifiés par ambition et par caprice.
Verdun et la guerre 14-18 : retour en huit films sur l'une des grandes tragédies du XXe siècleSi le film est très bien accueilli par la critique américaine au moment de sa sortie en 1957, il n'en est pas de même en France, d'autant plus que son armée est alors engagée dans le conflit algérien. Contrairement à la rumeur persistante, l'oeuvre de Kubrick n'a pas subi de censure, du moins pas dans le sens où on l'entend. Montré en Belgique, le long-métrage subit les attaques des militaires et des anciens combattants mécontents de l'image de l'armée proposée par le cinéaste américain. Échaudé par cet accueil, le distributeur United Artists décide de ne pas présenter le film à la commission française de classification. Autocensuré, Les Sentiers de la gloire n'a donc même pas fait l'objet d'une demande de visa. Il faudra attendre dix-huit ans, soit 1975, pour qu'il soit enfin visible sur les écrans de cinéma français.
D'autres films ont connu les affres de la censure. Les connaissez-vous ?