A l'occasion de la sortie de 8 novembre prochain de son film A Beautiful Day, qui lui a valu de remporter le prix du meilleur scénario au Festival de Cannes et a permis à Joaquin Phoenix de recevoir le prix d'interprétation masculine, nous avons rencontré la brillante réalisatrice écossaise Lynne Ramsay. Après être longuement revenue sur son travail sur A Beautiful Day et sur l'ensemble de sa carrière, elle nous a fait part de son ressenti au sujet de l'affaire Harvey Weinstein.
La cinéaste s'est alors souvenue de sa rencontre avec le producteur américain : « Je l'ai rencontré une fois et c'était une expérience assez étrange. Il voulait voir We Need To Talk About Kevin avant Cannes, s'est-elle rappelé, et j'ai répondu "Non, non" et il essayait de me convaincre en étant le plus charmant possible et en disant "C'est une véritable valeur ajoutée, pour toi." J'avais peur que s'il le voyait et s'il l'achetait, il tue le film dans l’œuf. C'était un gars vraiment intimidant. Je lui ai dit que je ne voulais pas qu'il le voie avant Cannes car je voulais que ça reste le premier endroit où les gens verraient le film, et il a juste mis fin au rendez-vous. »
Affaire Weinstein : quelques exemples de fictions qui montrent que tout le monde savait« Je comprends la peur des gens car il exerçait une telle hégémonie, il pouvait rendre les gens célèbres et j'ai réalisé à quel point un telle influence pouvait vraiment effrayer les gens, a poursuivi la réalisatrice de We Need To Talk About Kevin. Je ne savais pas tout cela, mais je me sentais vraiment bizarre. Bien sûr c'était une bonne chose de montrer votre film à Harvey Weinstein, mais j'avais aussi entendu les expériences d'autres réalisateurs dont il avait acheté les films et qui n'avaient jamais été jusqu'à la salle, donc j'étais terrifiée en tant que réalisatrice par cette idée, mais c'est un aspect très différent de ce qui est arrivé à ces femmes. »
Pour Lynne Ramsay, la libération de la parole des femmes constitue un véritable pas en avant : « Je pense que c'est une bonne chose que les femmes commencent à parler. Je crois que le pouvoir est une chose dangereuse et le cas de Harvey le prouve. Il était très puissant et les gens étaient vraiment intimidés. Je trouve cela très extraordinaire qu'elles aient le courage de parler de tout ça. » Et la réalisatrice de conclure : « Il est temps de laisser les femmes s'exprimer et de leur donner un peu le pouvoir, aussi. Les gens ne peuvent pas continuer à s'en sortir avec un tel comportement. Et ça ne devrait pas être possible de jouer de son pouvoir à de telles fins. »
