S'il a réalisé une poignée d'épisodes pour la saison 1 de la série Hatfields & McCoys, cela fait tout juste dix ans que le désormais trop rare Kevin Reynolds n'était pas passé par la case cinéma. Pour son retour, il signe un curieux Péplum biblique aux accents de film policier : La Résurrection du Christ. Rencontre express avec ses deux talents : Joseph Fiennes, qui joue un tribun (fictif) du nom de Clavius, aux ordres de Ponce Pilate; et l'acteur néo-zélandais Cliff Curtis, qui tente de se glisser dans la peau de...Jésus.
AlloCiné : quelle a été votre réaction lorsque vous avez appris que aviez obtenu le rôle de Jésus dans le film ?
Cliff Curtis : Honnêtement ? J’ai pensé qu’ils avaient fait une erreur ! Puis quand j’ai compris que c’était sérieux, j’ai trouvé que c’était un miracle. Quand j’étais petit, Jésus était pour moi le premier super-héros, comme un Batman ou un Superman. Je me disais même qu’un jour, je voulais être comme Jésus ! On ne devient pas Jésus à l’écran, je pensais que c’était impossible. En plus de cela, je voyais déjà venir les réactions du public et la polémique, me trouvant « trop ceci ou pas assez cela ». Du coup, j’ai adopté la stratégie du silence. J’incarne un Christ assez mutique et simple à l’écran. Mais comment incarner celui qui est censé être Amour ? Paix ? Car il s’agissait à travers lui de tenter d’incarner ces idées ; c’était difficile, d’autant que je ne suis pas nécessairement quelqu’un de pacifique par nature. Dans mon tempérament, je suis nettement plus proche de la personnalité de quelqu’un comme le personnage de Clavius, joué par Joseph Fiennes. Le film est intéressant, parce que son personnage central ne croit en rien, n’a pas la foi, si ce n’est celle de l’argent et du pouvoir. Il pense que les choses extérieures lui apporteront le bonheur et combleront le vide qu’il a en lui.
AlloCiné : Pensez-vous qu’en ces périodes troublées en matière de religion, un film comme celui-ci peut amener plus de dialogue, interpeller les gens ?
Cliff Curtis : Je pense qu’un film comme celui-ci reflète l’idée que l’Humanité n’a pas appris des leçons du passé. Le défi personnel et intérieur de Clavius, mené il y a 2000 ans, le conflit entre les habitants de Judée et les Romains, etc… Tout ça n’a au fond pas beaucoup changé. Le message de paix et de tolérance et la seule option utile que nous ayons si on veut s’en sortir. Car je ne sais pas si la guerre et la politique résoudront ce problème. Les adultes sont comme les enfants : il faut leur apprendre et leur inculquer encore et encore ces valeurs de tolérance, de générosité, de justice et de partage. Donc oui, je pense qu’il y a de la place pour des films tels que celui-ci. La source de l’amour est en nous, pas à l’extérieur. En ce sens, ce travail a été une vraie bénédiction pour moi. Je n’ai pas pris ça comme un job, mais comme une tâche spirituelle à accomplir.
AlloCiné : La vie du Christ a déjà été adaptée de nombreuses fois à l’écran. Qu’est-ce qui vous a attiré dans la version de Kevin Reynolds ?
Joseph Fiennes : C’est un réalisateur vétéran que j’aime avant tout. Avec ce film, il livre une histoire où le spectateur est porté par le destin du Christ à partir de sa crucifixion, sa résurrection et son ascension. Pour autant, ca ne ressemble pas vraiment à un péplum biblique. Que vous soyez croyant ou non, voire sceptique, je pense que vous aimerez le film. Mon personnage, Clavius, est fictif ; on évolue donc à la fois sur un film historique avec des faits réels, et en même temps la fiction. J’aimais beaucoup le prisme du film, qui est de montrer des événements à travers les yeux de non croyant qu’est Clavius. Par moment aussi, on est dans une sorte d’enquête policière, du moins au début, donc assez loin des canons du péplum biblique. Je trouvais donc le mélange de toutes ces composantes rafraîchissant et bienvenue.
Dans le film, mon personnage, de consistance plutôt solide et imperturbable, est confronté à l’idée du pardon, à l’idée qu’il y a une vie dans l’au-delà. L’idée d’avoir tort, d’être dans le doute, ne pas savoir ce qu’il y a au-delà de la mort, fait partie de ces interrogations que nous partageons tous.
AlloCiné : Etes-vous croyant, non croyant ou un sceptique ?
Joseph Fiennes : Disons que j’adhère à l’idée qu’il y a une sorte de conscience universelle. Pour mieux vous répondre, je vais vous citer Shakespeare, lorsque Hamlet dit à Horacio : « il y a plus de chose dans le ciel et sur la Terre que dans toute la philosophie ».
AlloCiné : Dans ces temps religieux troublés, qu’est-ce qu’un film comme celui-ci peut apporter selon vous ?
Joseph Fiennes : Je pense qu’il y a toujours eu et qu’il y aura toujours des tensions à ce sujet. D’une manière tout à fait modeste et humble, j’espère que ce film permettra aux croyants et non croyants de s’asseoir dans une salle de cinéma et de profiter d’un film sans se battre !
AlloCiné : Pouvez-vous parler de votre expérience de travail avec Kevin Reynolds ?
Joseph Fiennes : c’est quelqu’un de très bienveillant, amical. C’est un réalisateur qui aime les acteurs, ce qui n’est pas toujours le cas chez d’autres !
Propos recueillis par Emmanuel Itier