Une étiquette, c’est souvent très dur à décoller. Mais, un rôle culte dans une série culte, c’est peut-être encore plus la tannée. Surtout lorsque ce rôle vous a révélé au grand public, vous a ouvert les portes de la gloire et que la série en question continue, dix ans plus tard, d'être rediffusée dans les foyers du monde entier, comme si le temps n’avait pas passé. Pour Jennifer Aniston, ce rôle, c’est évidemment celui de Rachel Green dans Friends.
"La" Rachel, le Brad Pitt et les tabloïds
Si chacun à leur manière, les Friends sont passés à autre chose, ils resteront, qu'ils le veuillent ou non, nos bons copains du Central Perk. Mais, à sa manière, Jennifer Aniston est un peu un cas d’école. De ses comparses de la sitcom culte, elle est la seule à avoir réussi à mener une carrière sur le grand écran sans s'être, toutefois, jamais vraiment et totalement dépatouillée de l'image de Rachel. Il faut dire que la dulcinée de Ross avec son petit côté "girl next door" a su séduire le monde entier, le public, son network et la presse, créant même au passage un phénomène de mode dans les années 90. La coupe "Rachel", vous vous en fichez peut-être, mais on ne pourra pas nier qu'il n'est pas donné à tous les personnages de fiction de parvenir à susciter ce genre d'engouement.
=> Les succès et les échecs des Friends
En marge du phénomène Friends, Aniston a rapidement été abonnée aux comédies romantiques tout en menant en parallèle une vie privée qui, ironiquement, a souvent plus passionné que ses romances à l'écran. En épousant Brad Pitt, elle est même presque devenue un symbole, celui de la jolie fille qui parvient à faire tomber l'acteur le plus beau du monde. Cette union "parfaite", on le sait, s'est mal terminée. Et, quand le conte de fées s'est transformé en cauchemar, il a donné lieu à une médiatisation à outrance dans les tabloïds et ailleurs, créant un précédent dans le genre de l'info "people". Entre la team "Jen" et la team "Angelina", la "victime" et "la maîtresse", les coeurs balançaient...
La charade a duré des années et a clairement eu un impact sur la carrière de Jennifer Aniston. Jusqu'à sa relation avec Justin Theroux, l'actrice était, au moindre tournage, toujours épiée et suspectée d’être en couple avec son partenaire à l’écran. Toutes ses histoires étaient racontées et le moindre kilo gagné était (et est toujours) soupçonné d'être un futur nouveau-né en puissance. C'est comme s’il fallait que, pour réparer l'affront qu'elle avait subit, Jen, la petite fiancée des Américains, devait absolument trouver chaussure à son pied. Comme si carrière ne pouvait pas être juste... une carrière.
Avec le temps, Aniston a perdu de son côté "girl next door", devenant une véritable star, sexy en diable, surmédiatisée et à qui tous les magazines de mode demandent des conseils capillaires et santé quand ils ne la nomment pas "plus belle femme" ou autres appellations flatteuses. Pourtant, l'actrice de 46 ans reste encore et étrangement affublée de cette fragilité, de cette aura de copine sympa à qui on ne voudrait pas qu'il arrive du mal et qui mériterait bien des rôles un peu plus consistants. Cake, en salles cette semaine, pourrait justement marquer le tournant qu'Aniston attendait, celui qui prouverait qu'elle est bien plus que Rachel, une ex et une star...
Jennifer Aniston : une actrice qui sait prendre des risques
Depuis de nombreuses années, on a l’habitude de voir Aniston toute pimpante, sexy et piquante. C’est même devenu – à son avantage ou son désavantage – sa marque de fabrique. Mais, dans Cake, ne vous attendez à rien de tout ça. Pour le rôle, l'actrice s’est livrée sans aucun artifice pour donner vie à Claire, victime d’un terrible accident qui souffre, depuis, de graves séquelles physiques et psychiques. Claire ne peut pas bouger comme elle l’entend et sa vengeance et sa frustration, elle l'exerce sur ceux qui ont bien voulu rester à ses côtés. Le visage abimé et sans maquillage, le corps affublé de cicatrices, la voix dure et ferme, Aniston apparaît sous un jour nouveau. Bien sûr, elle n’est pas la première actrice à s'être transfigurée pour un rôle mais Aniston s’y est mis tard, après avoir justement passé des années à entretenir une image sexy.
Cette image sexy, c'est aussi celle à laquelle on l'a cantonnée. Aniston l'a déjà déclaré, ce n'est pas qu'elle ne reçoit pas de scripts pour de beaux rôles dramatiques, c'est surtout qu'elle n'est pas retenue. Il n'est donc pas étonnant de savoir qu’elle attendait un rôle comme celui-ci depuis des années. A l'AFP, elle avait d'ailleurs déclaré espérer que de nouveaux horizons allaient s’ouvrir grâce à cette performance. "Grâce à ce rôle, je me sens plus sûre de moi. Je l’ai fait pour moi, je l'ai fait pour voir si je saurais explorer ce genre d’univers. Et je suis très fière d’avoir réussi à aller aussi loin", nous confiait-elle également lors de la promotion du film.
Jennifer Aniston, caissière et nympho !
Avec Cake, Jennifer Aniston fait ce qu'elle n'avait pas encore pu faire sur un écran. Mais, ce n'est pourtant pas la première fois qu'elle accepte un rôle à contre-emploi. Dès 2002, elle tenait le rôle principal de The Good Girl, un film indépendant dans lequel elle jouait une caissière qui s’ennuie au bras de son mari (John C. Reilly) et qui trouve du réconfort dans ceux de Jake Gyllenhaal. Un film plus proche du drame que de la comédie et qui avait alors séduit toute la critique. Des années plus tard, à la sortie de Comment tuer son boss, son rôle de dentiste totalement nymphomane avait également surpris un public pas vraiment habitué à la voir prendre autant les "devants" en tablant, en plus, sur une hilarante vulgarité. A noter que les producteurs ne voulaient pas qu’elle porte une perruque brune de peur qu’on ne la reconnaisse pas sur les affiches, le "look" Aniston étant bel et bien une question à ne pas négliger...
Aniston en femme indésirable ? C'est dans "Life of Crime" !
Jennifer Aniston, une productrice qui (re)prend son pouvoir
A l’époque de son union avec Brad Pitt, Jen s’était déjà montrée intéressée par la production, les deux époux ayant fondé Plan B , société qui a notamment produit Troie, Charlie et la chocolaterie ou encore Les Infiltrés. Depuis 2008, l’actrice a retenté l’expérience avec une autre partenaire, Kristin Hahn, en lançant Echo Films. La société leur a notamment permis de monter Cake mais aussi le projet The Goree Girls, qui racontera l'histoire du premier groupe féminin de country né dans la prison de Goree au Texas dans les années quarante. Aniston sera l'une des stars de cet alléchant projet qui, à nouveau, devrait l'éloigner de ses propres sentiers battus.
Cette société de production lui permet effectivement de s’affranchir de ce que le cinéma lui propose en général pour tenter d’explorer des rôles différents, comme nombre d'actrices tentent désormais de le faire. A l'AFP, elle avait ainsi expliqué : "Si vous attendez que les gens viennent vous chercher, rien ne se passe. Il faut générer son propre travail et puis c'est beaucoup plus intéressant. Au début du projet "Cake", il n'y avait pas de producteurs."
Une réalisatrice en devenir ?
Si Echo Films lui permet de trouver des rôles plus intéressants, elle permet également à Aniston de passer derrière la caméra. Depuis son lancement, elle a ainsi pu réaliser le court-métrage Room 10, avec Robin Wright mais aussi le segment Mia avec Patricia Clarkson et Tony Shalhoub issu du téléfilm Un combat, 5 destins, qui racontait les différentes trajectoires de patients atteints d'un cancer. Ces deux expériences lui auraient donné le goût de la réalisation, l'actrice attendant désormais de trouver le bon projet pour se lancer sur le grand écran.
Parodies, autodérision... Aniston reste une reine de la comédie
Si aujourd'hui, l'actrice tente de conquérir le drame, elle n'en abandonne pas moins le genre qui l'a fait connaître et dont elle maitrise parfaitement les codes : la comédie. Passée maître dans l'art de la comédie romantique, Jennifer Aniston est apparue dans de nombreuses comédies pures et dures mais est aussi une adepte de l'auto-parodie.
On ne compte plus ses apparitions dans des émissions de télé américaine où elle accepte de rejouer l'époque Friends, de s'engueuler pour de faux avec ses anciens collègues ou de se moquer de l'image qu'elle dégage. Pour sa bonne copine Courteney Cox, Aniston s'est d'ailleurs toujours tenue prête, acceptant des apparitions hilarantes dans Dirt et Cougar Town à une époque où elle ne faisait plus de télévision. Dans Burning Love, la websérie de Ken Marino qui parodie les émissions à la "Bachelor" et compagnie, elle a même accepté de se cacher sous un déguisement de nounours pendant tout un épisode ! Et pour les besoins de South Park, rappelons qu'elle avait joué les enseignantes acariâtres pour notre plus grand plaisir...
"Bien ! Tu mérites de crever sale petit bâtard !"
Jennifer Aniston, l'une des femmes les plus puissantes d'Hollywood
Actrice, productrice et réalisatrice, Jennifer Aniston est aussi une femme d'affaire de talent. Elle a développé sa propre gamme de parfums, elle prête son image à plusieurs marques et est également la cofondatrice de Living Proof, une marque de produits capillaires. Son coiffeur, Chris McMillan, qui avait créé la coupe "Rachel", en fait d'ailleurs partie ! En dehors de tous ses revenus, Aniston reste également une valeur sûre du box-office. Depuis 2001, elle apparaît dans les listes des acteurs les mieux payés et, en 2014, elle était encore considérée par Forbes comme l'une des femmes les plus riches d'Hollywood (une enquête du Hollywood Reporter la plaçant à la quatrième place derrière Jennifer Lawrence, Cameron Diaz et Scarlett Johansson.)
1 - Bruce tout puissant | $ 242,829,261 | 2003 | |
2 - Les Miller, une famille en herbe | $ 150,394,119 | 2013 | |
3 - Marley et moi | $ 143,153,751 | 2008 | |
4 - La rupture | $ 118,703,275 | 2006 | |
5 - Comment tuer son boss | $117,538,559 | 2011 |
Plus surprenante qu'il n'y paraît et toujours aussi sympathique, Jennifer Aniston semble aujourd'hui tenter de mener sa carrière dans différentes directions, conservant bien évidemment le genre de la comédie en haut de sa liste. Un genre qu'elle aime, qui fonctionne toujours au box-office et qui lui permet par ailleurs de financer de plus petits films, plus intimistes et plus profonds, comme Cake. Est-ce que ce film lui permettra de gommer définitivement le nom de Rachel ? Il est fort probable que non, Friends devant encore squatter nos écrans pour longtemps (et on ne s'en plaindra pas). Mais, il est certain qu'avec Cake, l'actrice a rappelé qu'elle était loin de se limiter à un seul et unique registre... Et pour ça, pas besoin d'oublier Friends, il suffit juste d'aller au cinéma.