Les jeux du cirque modernes : "On achève bien les chevaux"
Pour les Romains, il fallait au peuple du pain et du cirque, selon l'expression "Panem et circenses". Pour les laisser pour compte de l'Amérique de la Grande Dépression, il n'est désormais plus question que de faire le cirque dans des marathons de danse sans fin, pour un peu de pain. La crise, qui jette dans la rue et la misère des millions d'américains, touche tout le monde, et installe les citoyens dans un état de désillusion tel que c'est tout le système de valeurs à la fois morales et économiques qui est très durement remis en cause.
C'est ainsi qu'il faut voir de la part d'Horace McCoy, auteur du livre dont est tiré le film, le gigantesque bal comme la mise en abime cruelle d'une société où l'argent (facile) devient le seul prisme de référence d'une communauté qui n'en a plus que le nom. C'est d'ailleurs cette métaphore implacable qui a motivé le choix du réalisateur Sydney Pollack, qui, avec le recul de trente ans écoulés depuis les événements lorsqu'il réalise le film, a pu mettre le doigt sur l'une des dérives dangereuse d'un modèle de société qui donne à ce point à l'être humain la condition d'esclave. Une Amérique qui se violente toute seule, qui s’enfonce dans le précipice sans personne d'autre qu’elle-même pour l’y pousser.