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    The Evil Within : Vous en voulez en gore ?
    Olivier Pallaruelo
    Olivier Pallaruelo
    -Journaliste cinéma / Responsable éditorial Jeux vidéo
    Biberonné par la VHS et les films de genres, il délaisse volontiers la fiction pour se plonger dans le réel avec les documentaires et les sujets d'actualité. Amoureux transi du support physique, il passe aussi beaucoup de temps devant les jeux vidéo depuis sa plus tendre enfance.

    Terrifiante et cauchemardesque descente aux enfers, "The Evil Within" est la nouvelle itération du maître-artisan qui a renouvelé le genre Survial Horror avec la sage Resident Evil : Shinji Mikami. Plongée dans les méandres d'une âme torturée...

    Bethesda

    Les amateurs de Survival Horror sont décidément à la fête en ce moment. Après l'extraordinaire Alien : Isolation sorti au début du mois chez SEGA (lire ici notre article), c'est au tour de Bethesda de sortir, depuis le 14 octobre dernier; The Evil Within, anciennement connu sous le nom de Project Zwei. Un jeu très attendu par les fans, et pour cause. Il est signé par l'un des maîtres du Survival Horror, en tout cas celui qui l'a profondément renouvelé (et non pas inventé) : Shinji Mikami. Un juste retour aux sources en somme; l'intéressé ayant délaissé au grand désespoir des fans la franchise Resident Evil, qui peine d'ailleurs à retrouver un vrai second souffle depuis le départ de son géniteur.

    Visions d'horreur

    Appelé en urgence à l'hôpital psychiatrique de Beacon, l'inspecteur Sebastian Castellanos et ses équipiers découvre un véritable carnage. Après avoir vu ses collègues de la police se faire massacrer par ce qui semble être un homme doté d'une force et d'une rapidité surnaturelle, Sebastian est pris en embuscade et se fait assommer. Soit, pour le joueur, le début d'une effroyable plongée dans les méandres nauséeux du subconscient du héros, à la manière d'Inception.

    Bethesda

    À son réveil, il se retrouve pendu par les pieds dans un monde alternatif et cauchemardesque. Tout autour de lui, des corps mutilés, des bruits de succion. Et un colosse, croisement improbable entre le monstre du baron Frankenstein et Leatherface, qui débite amoureusement un corps supplicié sur son étal. Après s'être détaché à l'aide d'un couteau puis avoir subtilisé les clés de la porte de sortie dans le dos de l'artisan boucher, Sebastian tente de s'échapper, avant d'être pris en chasse par son geôlier, armé cette fois-ci d'une tronçonneuse. Blessé au pied, notre personnage claudique, se faufile dans les casiers pour lui échapper, démuni, sans arme ni soins. Tomber nez à nez avec lui, c'est la mort instantanée.

    En pas même 15 min de jeu au cours de cet extraordinaire premier chapitre, les nerfs sont déjà mis à très rude épreuve. Un hors-d'oeuvre assez traumatisant en fait, qui n'est qu'un avant-goût du festival de chair torturée que Mikami réserve au joueur tout au long des 15 chapitres que dure The Evil Within. Soit, en difficulté intermédiaire, au moins 15h à 20h de jeu.

    Bethesda

    Au prix d'une santé mentale de plus en plus précaire, Sebastian avance dans un environnement extrêmement oppressant. Un sentiment d'ailleurs renforcé par le choix du cadrage de l'action, très cinématographique, avec des bandes noires façon cinémascope, qui ressert le champ de vision et participe à l'atmosphère suffocante du titre.

    Un titre ou le héros avance lentement. Pas question de foncer dans le tas. Bien qu'il ait la possibilité de booster sa santé, le rythme de sa course ou encore ses armes, il reste néanmoins plutôt vulnérable, surtout au corps à corps. Or il est fréquent de tomber sur des grappes d'ennemis, parfois armés avec tout ce qui tombe sous leurs mains (faux, couteaux de cuisine, hache...). Les munitions étant rationnées (évitez donc de passer en difficulté "détente"...), il vaut mieux privilégier dans la mesure du possible les approches discrètes et éliminer furtivement les ennemis.

    Bethesda

    C'est d'ailleurs là qu'il faudra tirer profit du level design créé par des développeurs sadiques pour tenter d'attirer les créatures. Les environnements de The Evil Within sont en effet gorgés de pièges, comme les bombes à détection de mouvements, pluies de flèches, herses sortant du sol et / des murs, pièges au sol façon Booby Trap...Des pièges qui se retournent d'ailleurs allègrement contre le joueur s'il ne prend pas gare où il pose le pied (ou relève la tête...). Et ca arrive souvent, surtout dans les moments de stress avec les ennemis à ses trousses.

    Tant qu'à parler des ennemis, très variés, on décerne une mention spéciale aux boss que Sebastian croise sur sa route. Que ce soit la rencontre -hyper stressante- avec la soeur mutante de la Sadako de Ring en passant par l'homme coffre-fort et son marteau attendrisseur de viande (humaine bien entendu), les affrontements sont très réussis, notamment parce qu'ils requièrent pas mal de sang froid pour éviter les coups (qui font bien mal...) et comprendre comment en venir à bout.

    Mikami Anthology

    Ce qui frappait déjà lors des premières présentations du titre, et plus encore une fois le jeu essoré, c'est combien The Evil Within peut être au fond perçu comme le prolongement direct de Resident Evil, en particulier le 4e opus. On ne compte plus les clins d'oeil, des séquences façon "fort Alamo" contre les zombies qui rappellent celles du village espagnol dans le 4e volet de Resident Evil, en passant par le chapitre qui se déroule dans un manoir (Allô ? Le manoir Spencer ?) avec son laboratoire secret...Mikami ou l'art de l'auto citation même, comme ce plan dans The Evil Within où l'ancien chauffeur ambulancier transformé en zombie grignote un corps avant de se retourner. Clin d'oeil hommage évident à ce fameux plan de Resident Evil 1. Pour être encore plus clair, voici les deux pour comparaison, ci-dessous.

    Le plan dans The Evil Within :

    et celui dans Resident Evil :

    Du pure fan service donc, mais qui ne donne pas nécessairement l'impression que Mikami tourne en rond. Car si The Evil Within se nourrit aussi d'autres influences vidéoludiques (Silent Hill en tête de liste), c'est également une déclaration d'amour inconditionnelle au cinéma d'horreur bis -mais pas seulement - qui a biberonné le créateur, tant il multiplie les hommages, volontaires ou non. Des films de George A. Romero en passant par Tobe Hooper, le torture porn façon Hostel, le Shining de Kubrick, les Evil Dead de Sam Raimi, jusqu'au shutter Island de Scorsese. Le tout saupoudré d'un zeste de folklore japonais, comme les croyances entourant les Yurei, des esprits troublés et malveillants de gens morts qui n'ont pas eu accès au paradis. Des personnes généralement décédées de façons brutales, qui ont laissé derrière eux une vie incomplète, du chagrin ou même un désir de vengeance. Un personnage au centre des films comme The Ring, The Grudge ou même Silent Hill, dont Mikami s'est inspiré.

    Bethesda

    Si le titre n'est bien entendu pas exempt de tout reproche, notamment technique; qu'il ne donne peut-être pas assez de chair à ses personnages; que l'histoire est un peu trop elliptique; The Evil Within se rattrape largement par son design franchement réussi, la générosité de sa durée de vie, la variété des situations rencontrées, au milieu desquelles émergent des séquences de pure terreur d'anthologie. Le patron est (enfin) revenu dans la maison du Survival Horror. Et bon sang que ça fait du bien !

     

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