"25 Novembre 1970 : Le jour où Mishima choisit son destin" © Dissidenz Films
Le "Mishima" de Paul Schrader
Koji Wakamatsu : Je n’accepte vraiment pas ce film. Il a essayé de montrer Mishima, mais je ne pense pas que ce soit une image juste. C’est un film indigne vis-à-vis des personnes disparues et qui m'a mis très en colère : ça a été l'une des raisons qui m'ont poussé à faire 25 Novembre 1970 : Le jour où Mishima choisit son destin.
Un biopic à visage humain
Je voulais montrer le personnage de Mishima non pas en tant qu’homme littéraire mais en tant qu’être humain. C’était un homme de lettres très connu sur le plan international : j’aurais pu aborder énormément de choses par le biais de la littérature, mais j’ai décidé d’adopter une autre approche. (...) Sa manière de penser ne peut être comprise que par les Japonais, ou du moins par certains Japonais : aux yeux des étrangers, sa manière de vivre, et surtout de mourir en se suicidant de la sorte, doit sembler ridicule. Mais certains Japonais peuvent le comprendre. (...) Sachant que les avis sont très partagés au Japon. Certains trouvent ridicule de mourir comme ça. D’autres pensent qu’il est respectable et ont beaucoup d’estime pour son geste.
"25 Novembre 1970 : Le jour où Mishima choisit son destin" © Dissidenz Films
La sexualité de Mishima
Les gens disent un peu n’importe quoi le concernant. Beaucoup disent que c’était un homosexuel, or je ne suis pas totalement certain de ça. C’était un homme très viril. Je ne voulais pas le montrer comme une "curiosité" mais me concentrer justement sur son côté viril.
Le choix du titre
Les jeunes d’aujourd’hui ne connaissent pas les événements du 25 Novembre 1970. Je voulais donc utiliser cette date dans le titre. Et puis sans son entourage, il n’aurait jamais décidé de mourir lui-même. C‘est parce que Morita était tellement enthousiaste et motivé que Mishima était finalement presque obligé de prendre cette décision de mourir : il avait une sorte d‘obligation vis-à-vis de Morita, et s’est senti de fait obligé d’aller jusqu’au bout. C’est un aspect important de la culture japonaise : quand il y a des obligations, pour montrer sa loyauté vis-à-vis de quelqu’un, on ose décider de telles choses... Je pense qu’on le sent dans ce film. Mishima a rejoint la force d’auto-défense, qui est une sorte de milice japonaise, en sachant qu’il y mourrait. C’est ce qu’on montre dans le film : il savait pertinemment qu’il ne serait pas suivi par ses soldats et c’est d’ailleurs pour cela qu’il a tout organisé pour mourir là-bas. Il avait peut-être un tout petit espoir d’être suivi par ses hommes mais je suis quasiment sûr qu’il savait qu’il ne le serait pas.
Portrait de Koji Wakamatsu © Blaq Out
Le cinéma japonais aujourd'hui
Il y a des films vraiment inintéressants dans le cinéma japonais d’aujourd’hui. Et surtout il n’y a pas de films pour les adultes : ce sont essentiellement des films d’animation, des histoires avec des chiens et des chats ou des films tragiques où des gens meurent du cancer. Le fait que je sois le seul représentant du cinéma japonais à Cannes, c'est vraiment honteux. Autrefois il y avait de grands films japonais : aujourd’hui il n’y en a plus.
Propos recueillis au Festival de Cannes 2012 par Alexis Geng
25 Novembre 1970 : Le jour où Mishima choisit son destin
25 Novembre 1970 : Le jour où Mishima choisit son destin Bande-annonce VO
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