Producteur et distributeur roué avec son frère Bob, découvreur de talents mais aussi brutal businessman en quête de rentabilité, lobbyiste émérite (plus de 300 nominations aux Oscars pour "ses" films et un paquet de statuettes, avec entre autres "exploits" celui d’avoir fait triompher Shakespeare in Love face au Soldat Ryan et à La Ligne rouge en 1999...) : Harvey Weinstein est un personnage incontournable de l’industrie, nabab abondamment cité, récompensé, vilipendé ou parodié. Honoré lors d’une soirée au festival de Toronto, il a lâché au Daily Beast quelques déclarations dignes d'intérêt (et d'une bonne foi discutable), revenant notamment sur son rôle dans le développement du Seigneur des anneaux de Peter Jackson (les deux frangins ont été crédités au générique même si le projet avait été récupéré par New Line) et de Gangs of New York, dont l’histoire veut qu’il ait été "allégé" d’une bonne heure par "Harvey les doigts de fées", un habitué des coupes sombres qui aurait ainsi sucré le final cut au bon Martin Scorsese. On a le droit d'accueillir sa version des faits avec distance, mais quand le monsieur s'exprime, cela peut donner de sympathiques aphorismes (voir ci-dessous : "[...] la dictature c’est mieux. La démocratie ça marche pour les gouvernements, pas pour les films").
Sur "Gangs of New York"
[...] Marty a présenté le final cut du film, et il faisait 3h36. Si vous pensiez qu’il y avait de l’action dans le film, vous auriez dû voir ce qui se passait dans la salle de montage ! Mais nous avons ramené le film à 2h36. La conclusion de l’histoire, c’est que le film a été un grand succès, 10 nominations aux Oscars et 200 millions de dollars de recettes, et il a relancé sa carrière après quelques revers de fortune. Et [Martin Scorsese] dit « Harvey m’a toujours dit : ‘Je veux sortir le director’s cut’ ». Donc dans le commentaire du DVD il déclare : « Vous pensez que je suis assez idiot pour sortir le director’s cut de 3h36 ? Cela prouverait que Harvey est un génie ! ».
Sur "Le Seigneur des anneaux" de Peter Jackson, qu'il avait développé à l'époque Miramax (studio alors affilié à Disney) des frérots :
Quand j’étais gamin j’ai aimé un livre appelé Le Seigneur des anneaux. J'ai mis dix millions de dollars dessus, créé un studio en Nouvelle-Zélande appelé Weta, missionné Peter Jackson pour écrire les trois scénarios et je suis allé chez Disney parce que nous avions une limite de 40 millions de dollars – on ne pouvait pas faire un film plus cher – et j’ai dit : « Voici trois scénarios fantastiques. C’est Le Seigneur des anneaux. » [...] Michael Eisner [ex-PDG de Disney, ndlr] a dit « Personne n’ira voir Le Seigneur des anneaux. Oublie ça. » Cela m’a brisé le cœur parce que c’était mon projet personnel. J’ai demandé, « Michael, ça te dérange si je garde mes droits de production sur le projet puisque personne n’ira le voir ? » et il a répondu « Très bien, tu peux les avoir. » Laissez-moi vous dire, je n’ai pas besoin de mettre mes enfants à la fac – je regarde laquelle je peux me payer. Il y a eu ça, et puis j’ai fait un film appelé Fahrenheit 9/11 et Disney s'est terriblement énervé contre moi… J’ai réalisé que la dictature c’est mieux. La démocratie ça marche pour les gouvernements, pas pour les films.
Précisons que la relation de cette histoire par le madré Harvey Weinstein est un brin elliptique et ne correspond pas totalement aux versions qu’on a pu lire par ailleurs : relation abominable entre Jackson et le camp Weinstein/Disney, qui a demandé au réalisateur de réduire la trilogie en un seul film après des mois de travail, avant que Jackson ne trouve refuge chez New Line et Warner, les Weinstein cédant leurs droits - merci Eisner, donc... - en échange d'un sympathique pourcentage des recettes (et d'un gros paquet de dollars, puisque quelques personnes sont allées voir le film...).
Gangs of New York
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AG