Allociné : Avez-vous éprouvé des réticences à jouer un personnage de dix ans plus âgé que vous ?
Julia Roberts : Aucune. Si on m'avait demandé de jouer un personnage de trente ans plus vieux que moi, je l'aurais fait sans me poser de question. Interpréter cette femme était si motivant que ce n'est pas ce genre de détails qui allaient m'arrêter. J'ai essayé de lui ressembler au maximum. En plus, elle n'a pas eu peur de dire qu'elle avait eu recours à la chirurgie esthétique : j'ai donc réalisé tout un travail sur mon visage pour obtenir celui d'une femme de cinquante ans qui a fait appel à ce domaine. C'était très intéressant de relever le défi.
Quelles sont les motivations de Joanne?
Elle est passionnée. C'est une femme qui est guidée par sa foi en l'équité, la justice et la religion. Elle est très croyante. Ce que je respecte profondément chez elle, c'est qu'elle a de fortes convictions et que rien ne peut l'en détourner. Elle se bat pour ce qu'elle croit et on ne voit plus beaucoup ça aujourd'hui. Elle sait qui elle est, d'où elle vient, et comment elle voit le monde.
Comment la voyez-vous ? Vous êtes-vous documentée sur elle ?
Joanne est vraiment de celles qui vous pousse à vous engager, elle a beaucoup d'énergie. Quand elle s'adresse à vous, elle vous donne le sentiment d'être la personne la plus importante du monde. Elle est fantastique rien que pour ça. Sinon, j'avais effectivement de quoi me documenter sur elle, elle est assez connue à Houston. Elle a animé un talk show pendant un moment, et elle est apparue dans différents programmmes : j'ai donc pu l'observer sous tous ses aspects et l'étudier de plus près.
Est-ce que le grand avantage de Joanne n'a pas été d'être riche ?
Beaucoup de personnes sont riches et ne font rien. Pour Joanne, on peut dire qu'elle ne possédait pas de réelles compétences lui permettant de s'impliquer dans les affaires politiques, mais elle avait un plus : elle fait partie de ces merveilleuses personnes qui, quand elles s'intéressent à quelque chose, s'investissent à fond . Et elles n'abandonnent pas tant qu'elles ne pensent pas avoir totalement accompli leur devoir. C'est tout simplement passionnant.
Parlons de votre carrière... Comment ont évolué les rôles pour lesquels on vous sollicite ?
Je pense que lorsqu'on prend de l'âge et qu'on acquiert de la maturité, les rôles qu'on vous propose deviennent plus intéressants et plus complexes. Il est évident, par exemple, que des filles de vingt ans ne peuvent pas jouer le personnage d'Anna dans Closer, entre adultes consentants [de Mike Nichols, réalisateur également de La Guerre selon Charlie Wilson]. J'apprécie énormément les rôles qu'on m'offre aujourd'hui.
Souhaitez-vous interpréter des personnages plus proches de Joanne que de Anna [Anna est aussi le prénom de la star de "Coup de foudre à Notting Hill" dont William Thacker, incarné par Hugh Grant, tombe amoureux] ?
Je lis toujours une quantité de scénarii de comédies romantiques. J'ai toujours dit que ce n'est pas que je refuse de faire ce genre de films, mais c'est juste que je n'en ai pas lues qui soient très satisfaisantes. Et je me sens plus attirée par des rôles qui sont davantage éloignés de ma propre vie. Jouer quelqu'un comme Joanne est un tel plaisir. Elle a une personnalité si forte, elle est si différente, que c'est une chance de pouvoir l'interpréter.
Envisagez-vous un rythme différent pour votre carrière, en enchaînant moins de films?
Oui, tout à fait. Je n'ai jamais voulu mener ma carrière de manière effrénée, parce-que je pense qu'il faut prendre du temps pour récupérer, pour faire d'autres choses, pour se réinvestir à nouveau avec joie. J'ai toujours apprécié ce luxe d'accorder un certain temps aux choses. Et je suis heureuse aujourd'hui d'avoir des journées pleines et remplies par des activités toutes différentes et prenantes.
Quel sera votre prochain film ?
Un film avec Clive Owen, qui s'intitule Duplicity.
Pour terminer, votre interprétation dans "La Guerre selon Charlie Wilson" ne laisse-t-elle pas présager une nomination à l'Oscar ?
Ce serait un grand honneur.
Propos recueillis pas Emmanuel Itier à Los Angeles le 7 décembre 2007