AlloCiné : Le public n'a pas l'habitude de vous voir dans des rôles comme celui-ci. Qu'est ce qui vous a poussé à accepter de jouer un personnage aussi sombre ?
Kevin Costner : Le choix a été très facile à faire. Le scénario, à mon avis, est brillant, et c'est même la véritable star de ce film. Même si je ne me reconnais pas en tant que personne dans ce personnage, je savais que j'étais capable de le jouer. Je me disais : "Ce n'est qu'un film." Et puis, les films que tu aimes sont ceux qui arrivent à te surprendre. Je pense que Mr. Brooks fait partie de ce genre de films.
Quelle part de Mr. Brooks y-a-t-il en vous ?
Nous avons tous une part de Mr. Books en nous dès lors qu'il s'agit de défendre nos filles. Nous tuerions pour elles. Mais... Mr. Brooks ne cherche en rien à se faire pardonner. Il n'est pas une bonne personne. Des familles ont été détruites par sa faute. Il est impardonnable. Mais ce pour quoi Mr. Brooks est a mon avis doué, c'est pour susciter de la sympathie chez les autres. L'empathie s'empare de nous lorsque l'on arrive à comprendre les gens. Prenez un serial-killer. Vous ne pourrez jamais rien lui pardonner. Mais vous apprenez un jour qu'il a eu une enfance difficile, qu'il a été violé à l'âge de 3 ans, etc... Vous ne lui pardonnez rien pour autant mais au fond de vous, vous vous dites : "Le pauvre, il n'a jamais eu de chance." Vous avez de l'empathie pour lui parce que vous arrivez à le comprendre un petit peu. Pour un film, l'acteur doit d'abord comprendre son personnage avant de penser à l'incarner. C'est pourquoi quand je joue ce rôle, Mr. Brooks reste en dehors de moi. En plus, je n'aime pas les films de serial-killer. Je n'aime pas les films effrayants. Je ne me sens pas à l'aise devant. Ca ne me procure aucune adrénaline. Alors pour que je devienne Mr. Brooks, il a du se passer beaucoup de choses. Mais je l'ai fait.
Pouvez-vous nous parler du personnage de Marshall, joué par William Hurt ?
C'est un personnage très marquant. J'aime quand il y a ce genre de personnage autour de moi dans les films. Je pense même que c'est important. Vous savez, dans le cinéma américain aujourd'hui, il y a parfois la tentation de la sagesse. Alors on vous demande ce que vous avez le plus détesté dans le film, puis ce que vous avez le plus aimé. Et aujourd'hui, dans la façon de faire des films, les scènes que tu as dit avoir détesté sont enlevées du film. Ca n'a pourtant aucun sens de faire ça... On m'a demandé ce que je pensais des personnages et j'ai répondu que celui que j'aimais le plus était celui de Marshall. Ils ont réécris des scènes pour Marshall. Je pense que le personnage de Marshall est parfait., tout simplement parfait.
Avez vous pensé à réaliser vous même ce film ?
J'y ai pensé. Nous en avons discuté avec Bruce A. Evans, l'un des scénaristes, qui voulait lui-même mettre en scène le film. C'était important pour lui de le faire. J'aurais pu le réaliser moi-même mais je me suis dit : "Laissons-lui sa chance."
Comment Bruce Evans vous a-t-il convaincu qu'il pouvait réaliser ce film ?
Et bien, je n'ai pas vu ses autres films (rires). Je ne le voulais pas. Je voulais juste essayer de le soutenir. Je lui ai dit que je voulais lui laisser la chance de réaliser ce film. Mais je voulais aussi protéger ce film en conservant le final cut.
Propos recueillis à Los Angeles par Emmanuel Itier en mai 2007