L'actrice italienne Alida Valli, qui s'est imposée comme l'une des plus grandes figures du cinéma italien, nous a quittés le samedi 22 avril dernier, à Rome à l'âge de 84 ans. "Une grande perte pour le cinéma, le théâtre et la culture italienne" a déclaré le président Carlo Azeglio Ciampi, tant la carrière de la Diva a marqué les consciences par sa richesse et son éclectisme. Apparue dans plus d'une centaine de films, de la comédie sentimentale au drame flamboyant (Senso) en passant par le film d'horreur (Suspiria), Alida Valli n'a pas seulement tourné pour les plus grands réalisateurs, elle était également considérée comme une véritable actrice populaire.
Alida Valli la résistante
Née le 31 mai 1921 en Yougoslavie, Alida Valli débute sa carrière à l'âge de 15 ans dans Les Deux sergents. Mais c'est véritablement pendant la Seconde Guerre mondiale que l'actrice arrive à se faire connaître du grand public dans le rôle-titre de Manon Lescaut. Elle gagne par la suite un prix d'interprétation à Venise pour Le Mariage de minuit et charme le public italien par sa beauté et sa prestance. Elle tourne ainsi plusieurs comédies romantiques qui font d'elle "la fiancée rêvée des Italiens". Entretemps, Alida Valli fait des jaloux en se mariant avec le peintre, compositeur Carlos de Mojo : une union qui s'achève quelques années plus tard par un scandale sexuel. Cependant, en ces temps de guerre, les débuts de l'actrice sont surtout marqués par ses convictions politiques et son refus de tourner sous la répression fasciste. Elle quitte ainsi l'Italie pour entamer une carrière internationale.
Alida Valli chez les plus grands
Conscients de la renommée de l'actrice et touchés par sa présence, les réalisateurs les plus "en vogue" du moment se l'arrachent. Elle se retrouve donc en 1947 sous la direction de Alfred Hitchcock dans Le Proces Paradine. Après avoir tourné dans Le Miracle des cloches de Irving Pichel, Alida Valli accompagne Orson Welles dans le mythique Troisième homme de Carol Reed. L'actrice est alors mondialement connue et fait même un petit détour en France où elle apparaît dans Les Miracles n'ont lieu qu'une fois de Yves Allégret. En 1954, Alida Valli fait un retour fracassant en Italie où elle incarne le rôle de la Comtesse Livia Sierpieri dans le flamboyant Senso de Luchino Visconti. C'est alors que l'actrice se réconcilie avec son pays d'origine en donnant la réplique chez les réalisateurs italiens les plus renommés. Elle rencontre ainsi Michelangelo Antonioni (Le Cri, 1957), tourne sous la direction de Pier Paolo Pasolini (Oedipe roi, 1967) puis apparaît chez Bernardo Bertolucci (La Strategie de l'araignee en 1970, 1900 en 1976). Entretemps, Alida Valli n'abandonne pas sa carrière internationale et semble développer quelques affinités avec la France en tournant pour René Clément dans Barrage contre le Pacifique (1957), Georges Franju dans l'angoissant Les Yeux sans visage (1959) ou encore Claude Chabrol dans Ophélia (1962).
Au service de l'horreur
Virage à 180 degrés pour Alida Valli. Dès le début des années 70, l'actrice concentre principalement sa carrière sur les films de genre démontrant ainsi sa large palette de jeu et sa capacité à passer du drame costumé au film d'horreur. Sa prestance inspire les réalisateurs, qui confient souvent à l'actrice des rôles de baronnes et de "grandes dames" mystérieuses. Elle se retrouve ainsi sous la direction de Mario Bava dans Lisa et le diable en 1973, accompagne les exorcistes de L'Antéchrist (1974), ou inquiète Jessica Harper dans Suspiria (1976) de Dario Argento. En 1997, Le festival de Venise lui décerne par ailleurs un Lion d'Or pour sa contribution au cinéma italien.
Ravith Trinh avec AFP