En début de mois, Spike Lee (Do the Right Thing, Malcolm X, BlacKkKlansman) a fait une brève pause dans son travail de président du jury lors de la quatrième édition du Red Sea International Film Festival (RSIFF) à Djeddah, en Arabie saoudite, pour monter sur scène et parler de sa carrière – et notamment de son Malcolm X légendaire et de son 5e film avec Denzel Washington à venir, Highest 2 Lowest.
Qualifiant son partenariat avec l’acteur de “duo dynamique de D et Lee”, le cinéaste a déclaré (via The Hollywood Reporter) : “Nous sommes frères. Nous faisons juste notre truc.” Malgré une longue “pause” entre leurs deux dernières collaborations, à savoir 18 ans depuis Inside Man, il a confié que cela ne lui avait pas semblé ainsi une fois sur le plateau. “Nous nous connaissons bien. De plus, nos familles sont très proches.”
L’aventure Malcolm X
En évoquant l’un de leurs projets les plus acclamés, Spike Lee a dévoilé à quel point tourner Malcolm X n’a pas été de tout repos : en effet, le réalisateur a dû faire face à de nombreux obstacles.
“La première fois que je suis venu à Djeddah, je tournais Malcolm X”, s’est-il souvenu. “J’étais là depuis deux semaines en attente de l’autorisation de la plus haute cour islamique pour amener une caméra à La Mecque pendant le Hajj.” Finalement, Spike Lee a été autorisé à y envoyer une équipe musulmane, qui est devenue la première à obtenir une telle autorisation, a-t-il déclaré.
“Ce film m’a presque tué”, a-t-il ajouté. “Ce film était en dessous du budget dès le début. Je le savais. Warner Bros. le savait.” La première version qu’il a montrée au studio, le jour du verdict de l’affaire des brutalités policières de Rodney King, durait 4 heures. “Los Angeles était en flammes”, a-t-il précisé. “On m’a dit de couper le film de manière significative, et j’ai dit non.”
“Absolument pas“, a-t-il également répondu à une suggestion selon laquelle il devrait tourner une scène sur la côte du New Jersey en janvier. Warner a dès lors arrêté le film après que Lee ait déjà déboursé 1 million de dollars, “la moitié de mon salaire. J’étais coincé.”
C’est alors qu’il a dressé une liste de personnalités noires à qui il essaierait de demander des dons financiers. “En fait, je suppliais : c’est le seul film qui puisse être réalisé. Le premier homme que j’ai appelé était Bill Cosby”, a-t-il avoué. L’acteur lui a remis un chèque lorsque le réalisateur s’est présenté à sa porte. Tracy Chapman, Janet Jackson, Prince étaient parmi les autres, avec Magic Johnson et Michael Jordan en dernier. Lee a d’ailleurs plaisanté sur le caractère compétitif de Jordan, disant qu’il avait demandé combien Johnson avait donné et lui en avait donné plus.
Il a également évoqué la scène avec Nelson Mandela qui était prévue pour le dernier jour de tournage : “Sur notre chemin vers Johannesburg, nous avons dû faire un atterrissage d’urgence à Nairobi à cause d’une alerte à la bombe. Ce film m’a presque tué”, a-t-il réitéré.
Mais le résultat a fait du film un chef-d’œuvre et Spike Lee a même qualifié le travail de Denzel Washington dans Malcolm X de “l’une des meilleures performances dans un biopic de tous les temps”, une performance pour laquelle il a été justement nommé aux Oscars. Il a aussi félicité son ami pour son récent rôle dans Gladiator II, pour lequel il vient d’être nommé pour un Golden Globe.
Spike Lee a, quant à lui, reçu un Oscar d’honneur en 2015, avant de remporter son premier Oscar en compétition en 2019 pour le meilleur scénario adapté pour BlacKkKlansman.
On attend désormais son prochain film avec Denzel Washington, Highest 2 Lowest, “une réinterprétation, pas un remake” de Entre le ciel et l’enfer de Akira Kurosawa, a déclaré Lee. Il a rappelé qu’à l’école de cinéma, il avait été initié au cinéma international et avait été fasciné par le travail du légendaire réalisateur japonais. “Donc, dès le début, j’ai été influencé par Kurosawa”, a-t-il déclaré.
Highest 2 Lowest n’a pas encore de date de sortie. En attendant, Malcolm X est à redécouvrir en VOD.