Ça parle de quoi ?
Lors de l'exécution de son dernier contrat, un tueur à gage provoque la cécité d'une jeune chanteuse. Pour trouver l'argent nécessaire à l'opération de la jeune femme, il accepte un nouveau contrat.
On refait le film
Alfred Hitchcock. Michael Haneke. Leo McCarey. Takashi Shimizu. Francis Veber. Lisa Azuelos. Et maintenant John Woo. Le réalisateur de Volte/Face, Mission : Impossible II ou À toute épreuve rejoint en effet la liste des cinéastes qui ont eux-mêmes signé le remake de leur propre film. Un exercice des plus particuliers, surtout dans le cas du metteur en scène hong-kongais, de retour dans les salles françaises pour la première fois depuis le 25 mars 2009, car il s'attaque à la relecture de l'un de ses meilleurs opus.
The Killer donc. Sorti en France en 1995 (cinq ans après son pays d'origine), ce polar met en scène Chow Yun-Fat, l'acteur fétiche du cinéaste, dans la peau d'un tueur à gages qui accepte un dernier contrat pour permettre à la jeune chanteuse dont il a provoqué la cécité de payer son opération. Réputé pour sa violence et son lyrisme, le long métrage dédié à Martin Scorsese est vite devenu une référence en matière d'action, et il contient tous les éléments constitutifs du style de John Woo, ralentis, colombes et symboles religieux en tête.
Avec Une balle dans la tête et À toute épreuve, The Killer avait permis au réalisateur de tamponner son passeport pour Hollywood. Trente-cinq ans plus tard, il en est revenu et c'est en France qu'il pose ses caméras. À Paris plus précisément, théâtre de ce remake en projet depuis de nombreuses années, dans lequel son personnage principal devient une femme : Zee, incarnée par Nathalie Emmanuel (Game of Thrones, Fast & Furious).
Il s'agit là du plus gros changement opéré par ce Killer nouveau, car la trame reste globalement la même. Avec toujours ce policier qui tente d'arrêter l'héroïne avant de faire équipe avec elle, et qui est incarné par notre Omar Sy national, autre tête d'affiche d'une distribution au sein de laquelle se croisent également Sam Worthington (et son plus bel accent irlandais !), Eric Cantona ou Saïd Taghmaoui.
Hommage à Alain Delon
Autant de comédiens et comédiennes grâce auxquels John Woo revisite l'une de ses oeuvres majeures, tout en rendant un hommage appuyé à l'un de ses films favoris : Le Samouraï de Jean-Pierre Melville avec son Alain Delon taiseux, et dont il a failli réaliser un remake il y a quelques années. Le projet n'a pas abouti, mais on en retrouve très clairement des traces dans les tenues portées par Nathalie Emmanuel à l'écran, qu'il s'agisse de son grand imperméable ou du chapeau qu'elle revêt dans la scène qui fait basculer le récit vers une histoire de rédemption, et où elle se bat avec... un sabre.
Bien évidemment, les fans de l'original se prêteront au jeu de la comparaison avec ce film, mais c'est un exercice qui peut se révéler fascinant. Surtout dans le cas d'un auto-remake et avec un cinéaste au style si reconnaissable, dont on retrouve très vite tous les élements, dans l'une des premières scènes, qui convoque piegons et ralentis dans une église. Ou lors du final aux allures de ballet, où cet amoureux de la comédie musicale lâche les chevaux.
Voir un film de John Woo en salles est devenu assez rare pour rechigner à découvrir celui-ci. Et on notera cette drôle de coïncidence, car le long métrage sort un an après le dernier long métrage de David Fincher, qui portait le même titre et mettait en scène un tueur à gages qui se retournait contre ses employeurs dans les rues de Paris (au début du moins). Il s'agissait, certes, d'une adaptation du roman graphique d'Alexis Nolent, mais il était déjà difficile de ne pas penser à l'auteur de Volte/Face, avant même qu'il ne revisite lui-même sa propre oeuvre.