Au sein de l'empire du Milieu, la censure s'agite frénétiquement, dans tous les domaines possibles. Les films ne font pas exception. Au contraire même, avec des motifs parfois surréalistes, au-delà des raisons politiques particulièrement problématiques pour les Autorités de Pékin.
Tout ce qui a trait à la sorcellerie, spiritisme, morts-vivants, fantômes, etc... est banni des écrans chinois. L'homosexualité ? Un tabou. Tout ce qui est en rapport avec les "pseudo sciences" ou contre les lois de la physiques est proscrit : adieu par exemple un film comme Retour vers le futur. La liste est très longue... Nous en avions donné quelques exemples sidérants.
Brillante adaptation de la nouvelle Rita Hayworth et la rédemption de Shawshank, écrite par Stephen King et parue dans le recueil Différentes saisons, Les Evadés est devenue au fil des ans et par le bouche-à-oreille une oeuvre absolument culte. Un spectacle lyrique, cruel et bouleversant porté par de fabuleux comédiens, Tim Robbins et Morgan Freeman en tête.
Des évadés qui irritent Pékin
En 2012, le couperet chinois s'est abattu sur le film de Frank Darabont, du moins pendant quelques temps. Le film a en effet été totalement censuré des moteurs de recherches du web chinois, en raison d'une affaire qui a empoisonné la diplomatie sino-américaine : l'affaire autour d'un dissident, Chen Guangcheng.
Fameux avocat, aveugle de surcroît, militant des Droits de l'homme et luttant contre la corruption des dirigeants politiques chinois dans les campagnes, il fut finalement arrêté et emprisonné pendant quatre ans et trois mois, avant d'être assigné à résidence en 2010 dans sa maison située à Dongshigu. Deux ans plus tard, en avril 2012, il s'évade en pleine nuit et trouve refuge auprès de l'ambassade des États-Unis à Pékin.
Le 19 mai 2012, à la suite de longues tractations, lui, sa femme et ses deux enfants reçoivent finalement un passeport et l'autorisation des autorités chinoises de se rendre à l’aéroport international de Pékin pour un départ aux États-Unis.
L'affaire a eu un écho médiatique retentissant, au point que certains à l'époque ont parlé de The Dongshigu Redemption; analogie évidente au film de Darabont, The Shawshank Redemption en VO. La résonnance du thème du film, l'espoir, le désir de liberté d'un homme et sa détermination acharnée, son évasion spectaculaire aussi : des éléments et une comparaison avec une oeuvre qui suscitèrent la crispation de Pékin, ordonnant la censure du film sur internet.
"Je vous jure, où que j'aille dans le monde, partout, il y a des gens pour me dire à quel point "Les Evadés" a changé leur vie" racontait Tim Robbins, dans un entretien accordé à Vanity Fair en 2014. Citant même un échange qu'il a eu à ce sujet avec Nelson Mandela, prisonnier politique enfermé dans des conditions terribles durant 27 ans, qui deviendra le premier président de l'Afrique du Sud post apartheid. Et qui adorait Les Evadés. Un film décidément très inspirant.