“On en êtes-vous, Leos Carax ?”
Pour une exposition qui n’a finalement pas eu lieu, le musée Georges Pompidou avait demandé au cinéaste Leos Carax de répondre en images à la question : “Où en êtes-vous, Leos Carax ?”
Avec C’est pas moi, le cinéaste tente une réponse, pleine d’interrogations. Sur lui, "son" monde. “Je sais pas. Mais si je savais, je répondrais que…”
Une plongée dans l’intime psychée d’un cinéaste de légende
Récompensé au Festival de Cannes d’un prix de la jeunesse en 2012, puis d’un prix de la mise en scène en 2021, respectivement pour Holy Motors et Annette, le cinéaste Leos Carax faisait cette année son grand retour sur la croisette pour présenter C’est pas moi.
Moyen métrage de 40 minutes initialement destiné au musée George Pompidou, ce nouveau projet est le plus personnel, malgré sa durée. En effet, il répond à une question aussi existentielle que vertigineuse : “Où en êtes-vous Leos Carax ?”.
Sa réponse, C’est pas moi, est un “autoportrait vu de dos”, comme il l’explique lui-même. Multipliant les références à son univers, de même que les images oniriques, voire quasi-prophétiques lorsqu’il s’attache à représenter la société dans laquelle il évolue, Leos Carax cherche à définir le cadre de sa vie, à contextualiser son existence de sa naissance à sa consécration. Se perdant dans les images d’archives de ses parents, de ses enfants, tissant des liens avec ses propres œuvres pour y rencontrer ses personnages, le cinéaste donne à ce voyage intérieur des allures de rêve lucide, à mi-chemin entre le documentaire et la pure fantaisie.
“Le monde que j’ai trouvé à ma naissance (l’ombre noire d’Hitler, mes sœurs et parents, etc.). Le monde que j’ai découvert plus tard : amis, amours, compagnons et compagnes de travail. Ma fille. Mes chiens. Et toutes celles et ceux qui m’ont invité au voyage. Penseurs, artistes, résistants, qui depuis toujours ont préparé le terrain pour que s’élève en pleine mer une île [...] C’est un film que je devais monter et redescendre seul. Un petit film réalisé au lit et à la table de montage (même si ces tables n’existent plus). Un film né du jour et de la nuit. Lors de mes insomnies, me venaient deux-trois images, correspondances, raccords, coq-à-l’âne. Et le matin, à ma table, sur le logiciel de montage, je tentais de mettre tout ça en musique. Avec des images de mes archives, ou des images trouvées sur le Web, que je remplacerai ou non plus tard, par d’autres, tournées avec mon téléphone ou avec une équipe.”
Les amateurs de l’œuvre du cinéaste apprécieront ses retrouvailles avec l’un de ses personnages les plus récurrents et indéchiffrables, le mystérieux Monsieur Merde, incarné par le grand Denis Lavant. Nommé aux César pour sa performance hors-normes dans Holy Motors, le comédien fait son grand retour aux côtés de son ami, ou plutôt face à lui, comme un reflet dans un miroir tendu à la réalité. Apparaissant comme un guide et complice dans cette exploration ultra-sensorielle et personnelle, ce personnage aux multiples visages brouille davantage les pistes entre réalité et fiction pour laisser le spectateur trouver sa propre réponse à la question “Qui est Leos Carax ?”
Expérience de cinéma aussi personnelle qu’universelle, l’indescriptible C’est pas moi, signé Leos Carax, est à découvrir en salle dès maintenant.