Mon compte
    Ce film de John Wayne a fait des dizaines de victimes
    Olivier Pallaruelo
    Olivier Pallaruelo
    -Journaliste cinéma / Responsable éditorial Jeux vidéo
    Biberonné par la VHS et les films de genres, il délaisse volontiers la fiction pour se plonger dans le réel avec les documentaires et les sujets d'actualité. Amoureux transi du support physique, il passe aussi beaucoup de temps devant les jeux vidéo depuis sa plus tendre enfance.

    Sorti en 1956 avec un John Wayne improbable grimé en Gengis Khan, "Le Conquérant" est surtout passé à la postérité pour des raisons absolument dramatiques. La raison ? Un certain Dirty Harry. Et ce n'est pas le personnage joué par Clint Eastwood...

    Visage carré, mâchoire serrée, posture virile, il a incarné le héros sans peur et sans reproches de l'âge d'or Hollywood. John Wayne, surnommé The Duke, fut l'acteur icône et fétiche des cinéastes Howard Hawks et John Ford, presque toujours l'archétype du cow-boy téméraire investi par la volonté de faire triompher la loi.

    Mais John Wayne, c'est également l'improbable Conquérant, long métrage dans lequel l'acteur incarne le chef mongol Gengis Khan.

    Sorti en salles en 1956, John Wayne incarnait dans ce film Temujin, un combattant qui deviendra Gengis Khan, fondateur, au début du 8e siècle, de l'Empire Mongol. Réalisée par Dick Powell, l'œuvre, éreintée par la critique, se distingue par une qualité de jeu discutable et par l'erreur de casting flagrante de son personnage principal.

    Mais si le film est passé à la postérité pour l'incongruité de son casting, il l'est davantage pour des raisons absolument dramatiques. L'équipe du film fut une victime collatérale de retombées radioactives d'un site d'essais nucléaires de l'armée américaine...

    Dirty Harry, ce n'est pas qu'un personnage joué par Clint Eastwood

    19 mai 1953, désert du Nevada. Dans la zone militaire de Yuccat Flat, le Laboratoire National de Los Alamos, créé dans le cadre du Projet Manhattan durant la Seconde guerre mondiale, procède à un nouveau test d'explosion nucléaire. Nom de code : Harry.

    D'une puissance de 32 kilotonnes, l'explosion atmosphérique est formidable. A un détail près. En raison d'un mauvais calcul et d'un changement de la direction des vents, les retombées radioactives de l'explosion s'éparpillent sur plus de 3000 comtés dans le pays...

    Des retombées aux conséquences sanitaires dramatiques, qui vaudront à cet essai nucléaire le surnom de "Dirty Harry".

    Deux ans après l'explosion, Howard Hughes envoie son réalisateur Dick Powell tourner non loin du site, à Saint George dans l'Utah, son nouveau film, Le Conquérant. John Wayne a donc hérité du rôle-titre de Gengis Khan.

    S'inquiétant tout de même de la proximité de la zone des essais nucléaires et d'éventuelles radiations, Howard Hughes sonda le Commissariat à l'énergie atomique américain, pour avis. La réponse ? Aucun problème, le site est parfaitement sûr...

    RKO

    L'équipe de tournage est ainsi exposée pendant trois mois à des radiations 400 fois supérieures à la dose normale acceptée communément. Elle totalisait 220 personnes et sur ce nombre, 91 ont développé avant 1981 une forme de cancer et 46 en sont mortes, dont John Wayne.

    Si l'intéressé était un gros fumeur (entre 4 et 6 paquets par jour, puis deux après le film Alamo) il développa un cancer du poumon en 1964, puis un cancer de l'estomac. Wayne amena même ses deux fils, Patrick et Michael, sur le lieu de tournage du film : les deux développèrent plus tard eux aussi un cancer.

    Petite anecdote glaçante supplémentaire : un compteur Geiger, pour mesurer la radioactivité, fut même amené sur le site du tournage par Wayne. Le compteur s'affola tellement que l'acteur pensa qu'il était détraqué...

    Il reste d'ailleurs de cette séquence un célèbre cliché, que voici :

    RKO

    Depuis 1990, un fonds de soutien créé par le Congrès américain, destiné à venir en aide aux populations affectées par les retombées de Dirty Harry, a versé plus de 2 milliards $ d'aides sous formes diverses. A Saint George, le taux de cancers reste encore, 71 ans après l'explosion, anormalement très élevé.

    FBwhatsapp facebook Tweet
    Sur le même sujet
    Commentaires
    Back to Top