Itinéraire d’une artiste née
En 2011, la cinéaste danoise Lea Glob, alors étudiante en école de cinéma, se prépare à être diplômée. Pour achever son cursus, il lui faut néanmoins réaliser un court film qu’elle souhaite consacrer à une jeune artiste. C’est dans ce contexte qu’elle fait la connaissance d’Apolonia Sokol, jeune peintre parisienne aux ascendances danoises et polonaises dont la vie bohème fascine immédiatement la réalisatrice.
Bien vite, l’exercice de style dépasse le cadre scolaire. Touchée par cette talentueuse artiste au quotidien hors-normes, Lea Glob décide de prolonger l’expérience : le projet de fin d’études de 20 minutes se meut en long-métrage qui, pendant 13 ans, suivra le quotidien d’Apolonia.
Étudiante, féministe, peintre reconnue… Plongez dans l’art et dans l’intimité d’une artiste émergente et découvrez son inoubliable évolution à l’échelle d’une décennie.
Portrait d’une jeune fille en feu
Diplômée de l’école des Beaux-Arts de Paris, désormais reconnue à l’international, Apolonia Sokol mène une vie bohème dont l’originalité a captivé Lea Glob et ne manquera pas de fasciner les spectateurs de son long-métrage documentaire. Car avant de se voir offrir une résidence à la prestigieuse Villa Médicis romaine, Apolonia a grandi dans le théâtre parisien de ses parents, où elle est filmée avec spontanéité dès sa plus tendre jeunesse. Un terreau fertile propice à la naissance d’une jeune pousse de la création, où celle-ci côtoyait la scène artistique émergente et les figures emblématiques de la cause féministe. Parmi elles, la célèbre Oksana Shachko, fondatrice du mouvement Femen.
“Je suis arrivée à un moment de leur vie où Oksana et Apolonia étaient très proches, raconte la cinéaste, elles étaient tout le temps ensemble. Nous nous sommes toutes les trois rencontrées à Paris - nous étions toutes de jeunes artistes aux trajets et méthodes différentes. Nos vies se croisaient.”
Il semblait donc plus qu’évident que le destin d’Apolonia Sokol se lie étroitement aux luttes de son époque, d’autant que la figure féminine représente le cœur de sa peinture figurative. Autoportraits ou représentations d’unité sororale, voire romantiques, les femmes sont le principal sujet d’Apolonia, un miroir tendu à toute une génération.
“Apolonia a le don d'être un miroir pour les gens, analyse Lea Glob. Mais c’est aussi un fardeau. Je ne suis pas la seule personne à voir cela en elle. Les gens sont très en colère contre elle, en tombent amoureux ou en deviennent obsédés. Il y a quelque chose de spécial dans sa façon d'être. Comme je l'ai dit dans le film, je ne sais pas qui a capturé qui, en fait - si j'ai capturé Apolonia sur le film ou si c'est elle qui m'a capturée dans son théâtre.”
Tel un miroir tendu par la peintre elle-même, le portrait d’Apolonia intègre par touches légères des éléments de l’histoire de sa réalisatrice, mais aussi de l’insaisissable Oksana Shachko, et donne finalement naissance à une nouvelle image de la femme, moderne et aux innombrables facettes.
Figure fascinante et flamboyante que la cinéaste Lea Dunham disait “impossible à oublier”, Apolonia Sokol est à découvrir dans l’art et l’intimité avec le documentaire Apolonia Apolonia, en salle cette semaine.