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    Mortal Kombat 1 : 30 ans après ses débuts, une franchise toujours aussi increvable
    Olivier Pallaruelo
    Olivier Pallaruelo
    -Journaliste cinéma / Responsable éditorial Jeux vidéo
    Biberonné par la VHS et les films de genres, il délaisse volontiers la fiction pour se plonger dans le réel avec les documentaires et les sujets d'actualité. Amoureux transi du support physique, il passe aussi beaucoup de temps devant les jeux vidéo depuis sa plus tendre enfance.

    Quatre ans après un 11e volet très solide, les géniteurs de l'increvable saga Mortal Kombat reviennent avec "Mortal Kombat 1". Un titre pensé comme un soft reboot, censé réunir les fans de la franchise et attirer de nouveaux joueurs. Pari réussi ?

    C'est peu dire que le parcours et la destinée du studio géniteur de la franchise Mortal Kombat est exemplaire, qui plus est dans un contexte incertain où les liquidations sans ménagement de studios par les éditeurs de jeux vont toujours bon train.

    Car depuis 30 ans, NetherRealm Studios, anciennement Midway Studios Chicago avant son rachat par Warner, a réussi à péréniser son existence en capitalisant presque exclusivement sur une seule et unique licence. Même si le studio s'offre de temps à autre, c'est-à-dire pas souvent, quelques récréations, comme en 2013 avec le réussi Injustice : les Dieux sont Parmi Nous et sa suite sortie en 2017, qui exploitaient la licence DC Comics, propriété de Warner.

    Car c'est un fait : la licence Mortal Kombat est surpuissante, avec plus de 80 millions d'exemplaires de jeux vendus depuis sa création. C'est la franchise la plus lucrative de la scène des jeux de combats en Versus, devant Smash Bros, Tekken ou Street Fighter.

    C'est dire si Warner Bros. Games n'est pas prêt de lâcher sa martingale. Et ca tombe bien : quatre ans après un très solide Mortal Kombat 11, l'éditeur et le studio balancent à nouveau dans la sanglante arène son nouvel opus : Mortal Kombat 1.

    Revoici le trailer d'annonce...

    Le mode histoire, grosse plus-value de Mortal Kombat

    Le mode histoire est selon nous LA plus-value de la licence par rapport à la concurrence. Initié avec le Cross Over Mortal Kombat Vs DC Universe en 2008, le story mode propre à Mortal Kombat a véritablement débuté avec le 9e volet de la saga, sorti en 2011.

    En 30 ans d'existence, la franchise MK a largement eu le temps de poser les bases de sa mythologie, de l'affiner et de la raffiner. D'un background totalement anecdotique et surtout prétexte à donner un semblant d'épaisseur à ses Kombattants, histoire de se démarquer un peu de la concurrence de l'époque, en l'occurrence Street Fighter II, le studio n'a jamais cessé de tisser au fil des années une toile de fond toujours plus riche, de nouveau personnages et antagonistes.

    Warner Bros. Games / NetherRealm Studios

    Hans Lo, le senor producer de Mortal Kombat X, que nous avions rencontré en 2015, ne nous avait justement pas caché que la tâche devenait vraiment compliquée de maintenir toute cette trame collective en place. Un difficile exercice d'équilibriste : injecter suffisamment de sang neuf pour ne pas donner l'impression de faire du surplace, sans pour autant s'aliéner les fans de la première heure, qui répondent toujours aussi présent.

    Tenant tout à la fois du soft reboot et de suite, le titre Mortal Kombat 1 souligne justement sa double ambition : une réinitialisation du compteur de la licence, dans une volonté manifeste d'élargir sa base de joueurs potentiels. C'est dans cette perspective qu'il faut insérer le mode histoire de ce MK1, très malin : si la mythologie est réécrite, le récit s'inscrit en même temps complètement dans le sillage du volet précédent. D'une pierre deux coups.

    Tour de passe-passe

    Le récit déployé dans le mode histoire de MK1 permet de redistribuer toutes les cartes. Liu Kang, qui n'est désormais plus le gardien du temps mais le dieu du feu, refaçonne les royaumes dans le but d'établir une harmonie générale et la paix.

    Dans cette nouvelle alternative de la mythologie Mortal Kombat, les anciens ennemis deviennent désormais des alliés ou des frères, comme les indéboulonnables Scorpion et Sub-Zéro, qui se livraient jadis à une lutte sans merci entre leurs deux clans, les Lin-Kuei et les Shirai Ryu.

    Si Johnny Cage est toujours une star des films d'action à l'égo surdimensionné, il est criblé de dettes à cause de son train de vie ruineux auquel il ne renoncerait pourtant pour rien au monde. Le Raiden ancien que l'on a toujours connu n'est plus le dieu du tonnerre et passe le plus clair de son temps à faire des travaux agricoles dans les champs, même s'il est quand même rompu aux arts martiaux.

    Et Shang Tsung, l'antagoniste historique de la licence ? Il est désormais un marchand ambulant à moitié paria, mais surtout un escroc vendant ses soi-disant potions miraculeuses, à la manière de ces arracheurs de dents et faux médecins qui écument les plaines de l'Ouest dans les Westerns. Un nouvel univers mis en coupe réglé donc. Du moins jusqu'à ce qu'un grain de sable ne vienne évidemment contrarier le tableau...

    D'une durée plutôt généreuse et découpé en quatre actes, ce mode histoire se suit comme une mini-série. Fort d'un scénario toujours aussi WTF, multipliant sans complexe les anachronismes, entre traditions millénaires et gadgets High Tech, le scénario apparaît logiquement comme un patchwork cousu de fils blancs et absolument ridicule aux profanes; mais qui fonctionne toujours aussi incroyablement bien en réalité.

    Entre éruption de violences et traits d'humour réguliers (et pas toujours fin cela dit...), le dosage tourne à plein régime, jusqu'à une conclusion qu'on a toutefois trouvé en retrait par rapport au reste de l'aventure.

    Extrêmement soigné dans sa réalisation, que ce soit le soin apporté aux Cut Scenes, aux mouvements de caméra laissant plus d'une fois découvrir de somptueux panoramiques de l'univers de MK, jusqu'à la mise en scène de ses personnages sur lesquels les joueurs prennent régulièrement le contrôle lors de transitions d'une grande fluidité, c'est un vrai régal. Pour tout dire, on a pris plus de plaisir à suivre cette histoire au long cours que le dernier volet cinématographique de la franchise.

    Warner Bros. Games / NetherRealm Studios

    En revanche, on regrette quand même qu'il soit impossible de suivre cette aventure en vostf. La VF est imposée. Si elle reste correct et fait le job, l'immersion en prend un coup, et il est assez incompréhensible que, depuis le temps, le jeu n'offre toujours pas la possibilité de suivre le story mode en vostf. Non pas qu'on aurait forcément adoré entendre la voix de Megan Fox doubler son personnage, la femme vampire Nitara, qui fait son grand retour après 17 ans d'absence, mais quand même...

    Bas gros poing

    Après cette très copieuse mise en bouche, place au bain de sang, avec un line-up de Kombattants plutôt généreux de 24 personnages, pour le lancement; du renfort étant évidemment prévu par la suite, avec, entre-autre, des guests comme le Homelander de la série The Boys ou Peacemaker.

    La première chose qui frappe, ou plutôt qui caresse la rétine, est le rendu visuel du titre, absolument magnifique. Ca fourmille de détails dans les arrières plans des environnements où les Kombattants s'affrontent, tandis que les personnages profitent d'un traitement royal lorgnant doucement vers le photoréalisme. On pensait que MK 11 avait atteint en la matière une sorte d'acmé, vu le travail d'orfèvre abattu par les sorciers de NetherRealm, c'était encore mal les connaître.

    Warner Bros. Games / NetherRealm Studios

    Un traitement visuel dont profitent non seulement les spectaculaires et ultra violents coups dit Fatal Blow, mais aussi bien entendu les fameuses Fatalities et autres Brutalities, sans lesquelles un Mortal Kombat n'est rien. Et de ce côté-ci, on est servi : l'équipe de NetherRealm fait preuve d'un raffinement exemplaire dans l'horreur absolue. Une violence décomplexée, tellement outrancière qu'elle en est régulièrement cartoonesque.

    La grande nouveauté de ce jeu de combat en Versus, c'est l'arrivée de Kombattants baptisés Kameo. Puisé dans une généreuse galerie de personnages historiques de la franchise (avec leurs tenues Klassiques !) mais non directement jouables, ils vous épauleront lors des affrontements. Sorte de Tag Battle en version light, ils peuvent intervenir en combat pour casser l'enchaînement de combo de l'adversaire, étendre le vôtre vous permettant de davantage frapper votre opposant, etc.

    L'adage "facile à prendre en main, difficile à maîtriser" prend encore une fois tout son sens. La phase d'entraînement et le tutoriel seront absolument incontournables, surtout si vous voulez vous frotter à des adversaires joueurs qui ne manqueront pas de vous corriger violemment en place publique...

    Une invasion pas si convainquante

    L'autre nouveauté de ce MK1, jouable en solo, est un mode saisonnier baptisé Invasions. Sorte de mini RPG façon jeu de plateau, vous déplacez votre personnage sur un ensemble de 8 zones. Au fur et à mesure de votre avancée, votre devrez relever différents défis, fabriquer / améliorer des talismans dans une forge pour booster les compétences et résistances de votre personnage, affronter plusieurs ennemis dans des tours, etc. C'est assez long, sympathique, mais finalement assez vite répétitif. Et si la prochaine saison offrira logiquement de nouveaux défis et parcours, les mécaniques de gameplay seront les mêmes...

    Quitte à offrir de petits jeux complémentaires, on songe par exemple avec bonheur à celui qui était proposé dans le jeu Mortal Kombat : Mystification sorti en 2004, qui proposait Puzzle Kombat; géniale variante de Tetris revue et corrigée à la sauce Mortal Kombat bien entendu. Il y avait même un simili jeu d'échec !

    Pour découvrir les fins de chacun des 24 personnages du roster de base, il faudra vous tourner vers les affrontements dans les Tours, qui correspondent en fait au mode arcade bien connu des amateurs.

    Warner Bros. Games / NetherRealm Studios

    Au rayon des griefs, on peste contre la disparition pure et simple de la Krypte, pourtant adorée des fans, dans laquelle, parfois au terme de parcours tortueux nécessitant de petites énigmes, on pouvait déverrouiller moyennant des pièces gagnées dans le jeu des Artworks, extraits de la BO, débloquer de nouvelles fatalités, des costumes alternatifs, etc. Certes, c'est en grande partie "corrigé" justement par le mode Invasions qui vous octroie ces gratifications, mais le plaisir n'est clairement plus le même.

    Arrive fatalement le bilan des courses. Contrairement à ses intentions, ce Mortal Kombat 1 ne constitue pas selon nous le point d'entrée idéal pour qui voudrait goûter pour la première fois aux joies "simples" du jeu Versus d'un MK, et plus encore pour son histoire. Il faudrait plutôt se tourner vers Mortal Kombat 11, qui nous semble plus abouti sur son contenu, plus riche et généreux. Quitte à jouer les prolongations après en basculant sur MK 1.

    Quant aux fans, il ne fait guère de doute qu'ils se jetteront de toute façon dessus. Et ils auraient tort de se priver. Car en dépit des (vraies) réserves susmentionnées, ce Mortal Kombat 1 a de sérieux et solides atouts à faire valoir. De quoi s'occuper un bon moment avant la sortie encore très lointaine de Mortal Kombat 2 en salle.

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