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    Entre Engrenages et The Good Wife, que vaut la série 66-5 sur CANAL+ ?
    Jérémie Dunand
    Jérémie Dunand
    -Chef de rubrique télé / Journaliste
    Bercé dès l’enfance au rythme de Sous le soleil, de P.J., ou des sagas de l’été, il se passionne de plus en plus pour les séries françaises au fil du temps. Et les dévore aujourd’hui (presque) toutes, de Balthazar à Scènes de ménages, en passant par Hippocrate, Candice Renoir, Ici tout commence.

    CANAL+ lance ce soir "66-5", sa nouvelle création originale avec Alice Isaaz dans le rôle d'une avocate, transfuge de classe, qui retourne plaider dans son quartier d'origine. Un "presque spin-off" d'"Engrenages" très réussi, sur fond d'émancipation.

    De quoi ça parle ?

    Jeune avocate d’affaires dans un prestigieux cabinet parisien, Roxane voit sa vie bouleversée quand son mari, associé du cabinet, est accusé de viol. Ramenée malgré elle dans la cité de son enfance, elle va tenter de se reconstruire en tant qu’avocate pénaliste au tribunal de Bobigny.

    66-5, créée par Anne Landois (Engrenages) avec la collaboration d'Audrey Fouché.

    Chaque lundi à 21h sur CANAL+ à partir du 18 septembre (deux épisodes par semaine) et disponible à la demande sur myCANAL

    66-5
    66-5
    Sortie : 2023-09-18 | 52 min
    Série : 66-5
    Avec Alice Isaaz, Raphael Acloque, Nailia Harzoune
    Presse
    3,5
    Spectateurs
    3,6
    Voir via MyCanal

    C'est avec qui ?

    Pour incarner Roxane, jeune avocate pénaliste de 32 ans qui doit faire face au scandale qui touche son mari tout en composant avec son propre passé qui la rattrape au sein du quartier où elle a grandi, la production de 66-5 a fait appel à Alice Isaaz (La Crème de la crème, Le Mystère Henri Pick), vue récemment sur Netflix dans Notre-Dame, La Part du feu et au cinéma dans Apaches et Couleurs de l'incendie.

    Face à elle, les abonnés de CANAL+ retrouveront notamment Raphaël Acloque (Les Hautes herbes, Alger confidentiel) dans le rôle de Bilal, l'amour de jeunesse de Roxane, Eric Pucheu (Vortex, Les Engagés) dans la peau de Samuel, l'époux de l'héroïne accusé de viol, et Nailia Harzoune (Disparu à jamais, Le Grand Bazar), qui prête ses traits à Yasmine, la meilleure amie de Roxane.

    Sans oublier Rani Bheemuck (Demain nous appartient), Melvin Boomer (Sage-Homme, Le Monde de demain), Rachid Guellaz (Validé), Alain Bouzigues (Caméra café) ou encore Julien Masdoua (Un Si Grand Soleil), qui complètent le très beau casting de 66-5.

    Denis Manin - Sortilèges Productions / Canal+

    Ça vaut le coup d'œil ?

    Après B.R.I., qui reviendra prochainement pour une saison 2, CANAL+ frappe à nouveau un grand coup avec 66-5, qui ouvre dès ce soir la saison 2023-2024 de la chaîne en matière de fictions françaises originales.

    La scénariste et productrice Anne Landois, aux commandes des saisons 3 à 6 d'Engrenages, retrouve CANAL+ après un détour par TF1 pour La Promesse et poursuit l'exploration de ses thématiques phares (les rouages du système judiciaire français et de la police, la banlieue, les blessures du passé).

    Cette nouvelle série pourrait en effet presque s'apparenter à un spin-off d'Engrenages qui aurait délaissé tout le reste pour se concentrer sur un seul aspect : les coulisses du monde des avocats pénalistes.

    "Quand j'ai arrêté de travailler sur Engrenages, à la fin de la saison 6, Canal+ m'a demandé de réfléchir à une nouvelle série policière", explique Anne Landois lorsqu'on l'interroge sur la genèse du projet.

    "Je me suis retrouvée assez rapidement embarrassée parce que, qui dit nouvelle série policière dit "s'être déjà détachée d'Engrenages", ce qui n'était pas du tout mon cas. J'ai réfléchi et, dans Engrenages, à mon avis, il y avait un aspect qui n'était pas assez traité, c'était les avocats. J'étais un peu enfermée avec le rôle d'Audrey Fleurot et il y avait tout un aspect sur les pénalistes qui m'intéressait. C'est comme ça que le projet est né".

    Aidée une fois de plus de l'avocate pénaliste Clarisse Serre, qui l'avait énormément conseillée et accompagnée à l'époque de la série avec Caroline Proust et Audrey Fleurot, Anne Landois a également eu envie de délaisser Paris et son palais de justice "poussiéreux" pour ausculter une autre vision de la justice : celle du Tribunal de Bobigny.

    Denis Manin - Sortilèges Productions / Canal+

    "Comme Clarisse m'avait traînée à un milliard d'audiences à Bobigny, j'ai eu la sensation qu'il y avait une arène assez originale dans ce tribunal de banlieue, et qu'on pouvait en tirer une modernité, un souffle, de la lumière, et une représentation de la banlieue qu'on connaissait mal", explique la créatrice de 66-5, qui donne un nouveau souffle à la fiction judiciaire (un genre très américain qui a toujours eu un peu de mal à s'imposer en France).

    Avec son héroïne qui doit se reconstruire et décide de donner un coup de fouet à sa carrière d'avocate suite aux accusations de viol dont fait l'objet son mari, qui l'a aidée à s'élever socialement, 66-5 fait évidemment penser à The Good Wife dans ses premières minutes.

    Avant d'opérer un transfuge de classe inversé et de ramener Roxane vers le quartier de Bobigny où elle a grandi. Et qu'elle a fui pour des raisons que l'on découvrira au fil des épisodes.

    Refusant de renoncer à sa carrière, le personnage interprété par Alice Isaaz accepte de prendre un dossier au Tribunal de Bobigny pour aider son amie d’enfance Yasmine. Cette expérience lui permet alors d’assumer son envie profonde : devenir avocate pénaliste. Et c'est finalement en s'emparant de ce qui arrive à son mari que Roxane parvient à rebondir et à s'émanciper.

    Autour de ce très beau portrait de femme, 66-5 déploie un féminisme pluriel, en s'intéressant également à la meilleure amie lesbienne de l'héroïne, à sa mère, restée à Bobigny et avec qui elle entretient une relation conflictuelle, ou à une juge d'instruction qui a su s'imposer dans un univers loin d'être tranquille ou facile pour une femme.

    Des héroïnes du quotidien que l'on suit avec plaisir et qui nourrissent, elles aussi, les questionnements et la trajectoire de Roxane.

    Denis Manin - Sortilèges Productions / Canal+

    Un peu lente à démarrer, la série se révèle de plus en plus addictive et profonde au fil des épisodes, et parvient à faire ce que la télévision réussit rarement : montrer une banlieue différente, lumineuse, loin des clichés, où règne un vrai esprit communautaire, et s'intéresser à une classe populaire blanche trop rare à l'écran.

    "J’ai d’abord imaginé l’image de 66-5 lumineuse et chaude. C’est une série d’été, les corps sont mis en évidence", explique Danielle Arbid (Dans les champs de bataille, Peur de rien), qui a réalisé les quatre premiers épisode de la série.

    "Je voulais filmer Marseille à Paris, et m’inscrire à l’opposé de ce que l’on trouve habituellement dans les séries sur le monde des cités. Je voulais rendre grâce à leurs habitants. Dans 66-5, cette banlieue tant malmenée devient un endroit moins hostile qu’à l’ordinaire. C’est un univers risqué mais aussi fait de sensualité, de métissage et de modernité".

    Portée magistralement par une Alice Isaaz extrêmement juste, qui apporte force et détermination à cette Roxane qui évolue entre deux mondes et ne cesse de franchir le périph dans des allers-retours virevoltants qui sont au cœur-même du récit, 66-5 doit également beaucoup à ses seconds rôles.

    De Nailia Harzoune, qui apporte beaucoup de lumière à l'ensemble dans le rôle de Yasmine, à Raphaël Acloque, extrêmement magnétique dans la peau de Bilal, qui ramène constamment Roxane vers ce passé qu'elle a tant cherché à fuir. Et qui va à nouveau la tirailler, jusque dans son travail et l'affaire de trafic de stupéfiants qu'elle va devoir gérer.

    Passionnante de par sa plongée dans le monde des avocats pénalistes et dans l'univers du Tribunal de Bobigny, 66-5 installe une arène et des personnages d'une richesse folle et parvient à faire cohabiter au sein de ses huit épisodes réalisme, violence et romanesque. Une vraie réussite dont on espère déjà une saison 2 très bientôt.

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