Le 29 avril 1987, L'Été en pente douce, porté par Jean-Pierre Bacri, débarque au cinéma et rassemble près de 800 000 spectateurs. Second long-métrage du réalisateur Gérard Krawczyk après Je hais les acteurs, ce drame suit le personnage de Fane (Bacri).
Bougon au grand cœur, il débarque dans le village où vivait sa mère qui vient de décéder. Il est accompagné de son frère Mo, handicapé mental léger, et de Lilas, jeune femme au physique spectaculaire qu'il vient de sauver des bras d'un homme qui la battait.
Ils s'installent dans la maison de la défunte, convoitée par un voisin garagiste. Tandis que l'été s'installe, Fane, Mo et Lilas vont vivre une relation à la fois douce et tumultueuse, tandis que le garagiste les harcèle...
Avant de s'embarquer dans l'aventure Taxi à la fin des années 1990, réunissant plus de 20 millions de spectateurs en 3 films, Gérard Krawczyk a mis en scène L'Été en pente douce en 1987. Ce drame intimiste est situé dans un petit village français, Martres-Tolosane.
Il s'agit d'une commune située dans le centre du département de la Haute-Garonne, en région Occitanie. "Le tournage était magnifique. On nous a accueilli formidablement bien", se souvient le cinéaste, rencontré à l'occasion de la ressortie du film.
UN PETIT VILLAGE BUCOLIQUE
Ce dernier confie avoir eu beaucoup de mal à trouver le lieu idéal avec son équipe. "On a fait des repérages partout, dans toute la France, y compris en Corse", explique-t-il. C'est le chef-opérateur du film, Michel Cenêt, qui a déniché ce petit village alors qu'il voyageait en camping-car.
"Il y avait un garage et un hangar qui touchait le garage. Il n'y avait pas de maison. On l'a construite sur le hangar", révèle Gérard Krawczyk. Selon le metteur en scène, le tournage de L'Été en pente douce a beaucoup marqué ce village et toute son équipe. "Quand on est partis, on pleurait. Ça a marqué tellement le village que la mairie a gardé les inscriptions qu'on voit dans le film."
"Je me souviens d'ailleurs que des fans étaient allés filmer sur les lieux 20 ans après. Ça fait maintenant 36 ans que l'oeuvre est sortie mais je vois encore des vidéos sur YouTube. Une grande projection en plein air du film est d'ailleurs prévue bientôt dans le village, soutenue par la région Occitanie", affirme le réalisateur.
Quand on est partis, on pleurait. Ça a marqué tellement le village que la mairie a gardé les inscriptions qu'on voit dans le film.
Par ailleurs, selon Gérard Krawczyk, la station-service du film était déjà vintage à l'époque. Elle ne fonctionnait plus et l'équipe a tout repeint et mis en place de fausses pompes. "Les gens s'arrêtaient pour faire le plein et on leur disait 'Mais non, il n'y a pas d'essence'", se souvient le cinéaste.
Avant sa ressortie du 9 août en version restaurée, L'Été en pente a d'abord été projeté au cinéma de la plage au Festival de Cannes 2023. Une "belle surprise" pour le réalisateur. "Il y avait plus de 700 personnes pour cette projection, c'était formidable. La vie des films, c'est quelque chose."
Pour le metteur en scène, "les longs-métrages sont un indicateur de l'évolution de la société. Je parle notamment de la sensibilité à la sensualité, la sexualité." À sa sortie en salles, L'Été en pente douce a failli être interdit aux moins de 16 ans. "À l'époque, c'était une grosse interdiction. Finalement, ça n'a pas été le cas."
"De plus, le délai entre la sortie au cinéma et la diffusion à la télé était plus important que maintenant. Il avait cette image de film un peu sensible, un peu érotique. Il passait donc le soir à 23 heures. Il pouvait donc passer sous les radars et comme vous étiez enfant dans les années 1990, vous ne l'avez pas vu à cette époque", explique le réalisateur.
Selon Gérard Krawczyk, le problème de ces films sortis à la fin des années 1980, c'est qu'ils ont été pour la plupart oubliés au moment du passage au DVD. "Après avoir été édité en VHS, ils n'ont pas connu d'éditions DVD. Ce qui fait que leur visibilité a vraiment chuté. Il y a aussi eu toute une mutation sur la définition de la vidéo avec une nécessité de restaurer les films pour qu'ils puissent passer à la télé dans une bonne qualité", soutient l'artiste.
Il y a un tout un pan de la production cinématographique française qui est restée absente aux yeux du public pendant des années.
"Comme cette restauration coûtait cher, beaucoup de producteurs n'ont pas fait ces dépenses-là. Les films sont donc restés sur les étagères. L'Été en pente douce a été restauré en 4K il n'y a pas longtemps. Le coût de la restauration a freiné la diffusion et la présence de ces films. Il y a un tout un pan de la production cinématographique française qui est restée absente aux yeux du public pendant des années", déplore Gérard Krawczyk.
PAS TOUCHE AU MONTAGE
Si L'Été en pente douce a été restauré en 4K, hors de question pour le cinéaste de retoucher le montage du film ou de le modifier. "Ce qu'il faut savoir, c'est qu'il faut parfois restaurer des films dont le réalisateur ou le chef-opérateur sont morts. Les personnes qui ont acquis les droits s'occupent alors de la restauration", explique le metteur en scène.
"Cependant, dans le droit d'auteur français spécifique, on doit respecter l'oeuvre originale. Il est interdit de remonter le film. Il est interdit de l'étalonner d'une façon qui ne serait pas conforme à l'original. On doit respecter l'intégrité de l'oeuvre. Ce n'est pas le cas pour le droit d'auteur anglo-saxon qui est le copyright."
"Quand vous avez les droits d'un film, ce qui est une grande bataille à Hollywood, vous avez le droit de remonter le film. Ils peuvent ne pas le sortir, le couper, le modifier, faire ce qu'ils veulent. C'est une grosse différence avec la France. Si le metteur en scène est toujours vivant et qu'il a envie de changer des choses, il peut le faire. De mon côté, je n'ai pas eu envie de changer quoi que ce soit. Et de toutes façons, on ne le pourrait plus car on n'a plus le matériel d'origine, les rushs etc. Je n'aurais pu que couper ou inverser des séquences mais je ne vois pas pourquoi j'aurais fait ça."
Dans le droit d'auteur français spécifique, on doit respecter l'oeuvre originale. Il est interdit de remonter le film.
Le cinéaste explique ensuite que le travail a surtout consisté à redonner une meilleure définition au film en restaurant les images. "On a vraiment fait un gros travail. Comme j'ai aussi une formation à l'image, j'étais présent pour étalonner plan par plan le film. Il y a beaucoup plus de détails qui remontent et dans le jeu des acteurs, on a accès à une finesse qu'on n'avait pas avant. C'est très chouette. Même si on ne dit plus trop chouette aujourd'hui (rires)."
UN CASTING PARFAIT
Si Gérard Krawczyk a choisi Jean-Pierre Bacri, Pauline Lafont, Jacques Villeret et Guy Marchand pour incarner les rôles principaux de L'Été en pente douce, c'est parce qu'ils correspondaient parfaitement aux personnages. Pour le cinéaste, personne ne pouvait mieux les interpréter.
"Pour Bacri, ça ne s'est pas fait tout de suite. Pour Pauline c'était tout de suite. En plus, on avait tourné ensemble dans Je hais les acteurs. Pour moi c'était évident. C'était notre Marilyn Monroe française. [L'actrice est décédée tragiquement en 1988 à l'âge de 25 ans] C'était 'The Girl Next Door', la fille du coin de la rue. Elle avait une beauté très terrienne, voluptueuse. À l'époque, c'était un peu l'ère des mannequins très minces qui vous regardent avec froideur. Elle contrastait énormément", se souvient le cinéaste.
"C'était différent pour Jean-Pierre Bacri. C'était quelqu'un d'exceptionnel, une belle personne, mais ça a été compliqué pour l'imposer. Ce qui peut paraître étrange mais à l'époque, il n'avait pas encore eu ses succès avec Agnès Jaoui etc. On a quand même réussi à l'imposer. Au tout départ, Coluche devait jouer le rôle de Fane et Villeret devait donc être son frère. J'ai donc été en préparation chez lui."
"Il y a eu toute une histoire, Coluche devait faire un autre film, qui finalement ne s'est pas fait en plus. J'étais très déçu. J'ai donc fait Je hais les acteurs puis il m'a dit 'Quand j'aurais fini, je ferai du music-hall et après on fera ton film'. Malheureusement, il a eu son accident de moto. J'ai ensuite modifié le rôle pour Jean-Pierre Bacri et je suis très heureux qu'il m'ait fait ce cadeau avec sa performance. C'était formidable."
Bacri était quelqu'un d'exceptionnel, une belle personne, mais ça a été compliqué pour l'imposer.
"Il n'avait pas la notoriété ni l'aura qu'il a eu plus tard. Villeret était plus connu pour ses rôles comiques. Guy Marchand me semblait tout à fait le meilleur pour faire ce rôle de garagiste. Et Jean Bouise, qui est un très grand acteur, m'a dit une chose à l'époque : 'N'ouble pas de tirer tes personnages vers la lumière.' C'est ce que j'ai fait, j'espère. Cette phrase ne m'a jamais quittée. C'était un homme formidable."
UNE MUSIQUE MARQUANTE
Le metteur en scène évoque aussi la musique du film, composée par Roland Vincent. "Il a la particularité d'avoir fait la musique des films de Paul Vecchiali, qui faisait des longs-métrages d'auteur assez pointus. Roland Vincent est aussi un très grand mélodiste. Il a fait une quantité de musiques de chansons pour Michel Delpech qui sont connues dans le monde entier. Il a aussi travaillé avec Supertramp aux Etats-Unis."
"Roland avait fait la musique de Je hais les acteurs, qui était une musique symphonique, hommage aux films des années 40, inspirée des compositions de Max Steiner. John Williams et les grands d'aujourd'hui s'en inspirent encore d'ailleurs. Roland a donc composé la musique de L'Été en pente douce et il avait commencé pendant que je tournais et que je montais. Il ne m'avait rien fait écouter."
"Arrive le moment où il me fait écouter. C'était vachement bien mais ça faisait un peu rock californien genre Chris Rea. Je lui dis que sa musique est super mais que je n'ai pas fait le film qui va avec. Je commence à lui expliquer ce que j'attendais, que les personnages sont dans un village, c'est comme un western, il y a la rumeur du village et ils se débattent là-dedans. Je lui donne toutes ces infos et je comptais partir et le laisser travailler."
"Il me dit alors de rester. Les musiciens sont connectés, je ne sais pas à quoi. Il commence à plaquer des accords sur le clavier et la rythmique vient. 'C'est ça la rumeur ?', me dit-il. Oui, c'est ça ! 'Tu me dis western, des cris... Harmonica ?' Je lui dis oui. Il appelle un copain harmoniciste. Il arrive, se met devant l'écran vidéo et ils ont fait la musique en direct comme ça. Elle est formidable car elle fait véritablement partie du film."
"Un peu plus tard, il y a eu Bagdad Café avec sa chanson I'm Calling You. Si vous écoutez la rythmique, c'est la même que dans L'Été en pente douce. Ce n'est pas la même mélodie mais tout ça pour dire que Roland Vincent était en avance sur son temps."
UNE MENACE INQUIÉTANTE
Par ailleurs, le réalisateur est contre la modification des oeuvres qui seraient jugées "problématiques" de nos jours. On se souvient notamment des polémiques autour d'Autant en emporte le vent. "Je ne comprends pas du tout et je trouve que c'est excessivement dangereux. Mais c'est un autre dossier, celui du wokisme ou de l'appropriation culturelle."
"Je pense qu'un autre dossier existe, en dehors de ça. Au-delà de la législation française, qui protège les auteurs, on a un droit moral sur le film. Je parle du cinéma mais c'est valable pour d'autres univers artistiques. Ce droit fait que, pour le film, on dit abusivement que le réalisateur a le final cut. Ce qui est faux, il n'a pas le final cut. Par contre, il a ce pouvoir que n'a pas le metteur en scène américain : dans le code de la propriété intellectuelle en France, quand le film est terminé, le producteur, avec le réalisateur ou la réalisatrice, doivent le valider."
"Si l'un des deux ne valide pas, le film est bloqué et on part dans une bataille juridique très complexe, longue et pénible. En ce sens, il y a souvent eu des échanges, parfois conflictuelles, entre les producteurs, productrices et les réalisateurs, réalisatrices. Toutefois, ces échanges arrivent toujours à un accord pour le bien du film. Les cas où tout est bloqué restent très minoritaires. Aux Etats-Unis, il n'y a pas ce problème car le producteur décide à la fin. Légalement, il a le final cut, mais en général, il laisse le cinéaste faire son montage. On appelle ça le "director's cut", qu'on peut voir dans certains DVD."
LE DROIT D'AUTEUR ATTAQUÉ
Selon Gérard Krawczyk, c'est plus compliqué aujourd'hui en France à ce niveau car le droit d'auteur est extrêmement attaqué. "C'est très important pour tous les spectateurs de savoir ça. Le cinéma est sorti très affaibli de la crise sanitaire. Aujourd'hui, les grandes puissances sont les plateformes et la TV. Par conséquent, quand vous êtes en contact d'un diffuseur qui est extrêmement puissant, il peut imposer ce qu'il veut, même si ce n'est pas la loi."
"Quand vous avez un producteur qui n'a qu'un seul financeur : le diffuseur, cela affaiblit le producteur. S'il n'obtempère pas, il ne travaillera plus du tout avec la plateforme. Et le réalisateur non plus d'ailleurs. Des comportements changent beaucoup en ce moment. Nous sommes dans une situation où, petit à petit, l'usage qui faisait que ce droit d'auteur protégeait les oeuvres, s'est très affaibli aussi.
Nous sommes dans une situation où, petit à petit, l'usage qui faisait que ce droit d'auteur protégeait les oeuvres, s'est très affaibli.
"Au sein de l'ARP [association des réalisateurs et producteurs], on essaie de mener des combats pour le bien du cinéma, pas pour faire de l'auteur un capricieux. C'est pour préserver une certaine liberté d'expression, une singularité."
LA MENACE DES ALGORITHMES
Gérard Krawczyk alerte ensuite sur l'utilisation des algorithmes par ces plateformes. "Ce qui va se passer, et ce qui se passe d'ailleurs, c'est qu'on vous propose 'vous avez aimé ça, vous allez aimer ça.' Si vous aimez la peinture figurative, on ne va vous proposer que ça. Mais le plus grave, ce n'est pas ça. À la limite, si vous êtes un peu curieux, vous allez voir ce que donne l'impressionnisme."
"Comme eux produisent à travers des producteurs, ils passent des commandes par rapport aux algorithmes. Ils vont produire ce que les gens ont aimé. Ainsi, ils vont adopter des grilles pour les scénarios : 'Là, c'est trop lent, là, ça ne va pas etc.' Tout est en train de s'uniformiser. Il y a toujours des choses qui sortent du lot car ils ont un grand magasin, il leur faut de tout. Ils achètent donc de la haute couture, Scorsese (The Irishman), Fincher (Mank)..."
Selon le metteur en scène, le vrai volume de production et de diffusion est géré par l'algorithme et non par la singularité. "Or, qu'est-ce que nous voulons tous ? C'est de voir des choses qu'on a jamais vues, même si on nous a déjà raconté l'histoire, on a envie qu'on nous la raconte autrement. Pour l'instant, l'algorithme n'est pas capable le faire. Il va donc falloir cocher des cases."
"Et là je glisse vers votre question concernant la réécriture d'oeuvres anciennes pour ne pas offenser des communautés, avoir des postures qui seraient politiquement correctes. Ici, ce sont des cas supplémentaires. On va donc vers une uniformisation en plus de nouvelles cases qui, au départ, sont de vrais progrès, comme la parité dans les castings, les équipes techniques ou avoir des minorités visibles à l'écran, tout cela est formidable."
VERS UNE INQUIÉTANTE UNIFORMISATION DES OEUVRES ?
"Cependant, en faire un dogme pour raconter toutes les histoires quelles qu'elles soient, me semble totalement fou. On en arrive à des choses terribles comme Zoe Saldana qui s'excuse d'avoir incarné Nina Simone car elle avait la peau trop claire. Tom Hanks s'est aussi excusé car il a joué un homosexuel dans Philadelphia. Un acteur doit pouvoir tout jouer. Le champ d'un réalisateur, me semble-t-il, doit être infini. Je ne vais pas faire des films uniquement sur des chauves aux yeux bleus de plus de 50 ans. Ça n'a aucun sens."
"Ça me semble donc être une espèce de censure très préoccupante. Il y avait une blague qui circulait sur les réseaux sociaux et que je trouvais drôle : Dorénavant, quand vous aurez un nazi dans un film, il faudra qu'il soit joué par un vrai nazi. Si on en arrive là, effectivement, ça devient fou. Les réseaux sociaux ont exacerbé tout ça. C'est à dire que vous débattez avec vos amis, qui sont d'accord avec vous. Le jour où vous débattez avec des gens qui ne sont pas d'accord, ça devient extrêmement violent."
"Au lieu d'avoir un débat contradictoire, qui a toujours existé, qui peut aussi être un peu énervé, un peu rugueux... Mais au moins il existe. L'échange existe. Là, il n'existe plus. Pourquoi ? Car à ce moment-là, lorsque vous développez une opinion contradictoire, on vous assigne tout de suite à l'extrême et au pire. On décrédibilise votre parole en vous assignant au pire, au fascisme, au racisme, à l'homophobie etc. À partir de là, comment voulez-vous avoir un échange ?"
Lorsque vous développez une opinion contradictoire, on vous assigne tout de suite à l'extrême et au pire.
"Soit vous êtes dans le bon camp, soit dans le mauvais. Et cela clive une société, ça la rend violente, intolérante. C'est contraire au but premier, qui était de rendre visibles des gens stigmatisés. Ça fait l'effet contraire en réalité. Si on ne fait pas attention, on va avoir de gros problèmes car on va être très fracturés, clivés. Au lieu d'avoir cette tolérance, cette compréhension de l'autre, on sera chacun repliés dans sa communauté. On agira pour le bien de sa communauté même si éthiquement c'est tout à fait limite. Tout cela est très préoccupant."
Par ailleurs, Gérard Krawczyk estime qu'il ne pourrait pas faire L'Été en pente douce aujourd'hui, mais pas à cause des problématiques évoquées ci-dessus. "Je ne pourrais pas le faire pour une autre raison. C'est un film dit du milieu et c'est compliqué à financer. À ce niveau-là, je ne pourrais pas le faire de nos jours. Cependant, j'espère que je pourrais le faire quand même en passant au-dessus des cases à cocher. Au cinéma, les gros succès ne cochaient pas de cases. The Artist par exemple, ne cochait aucune case."
"Taxi a été refusé par tout le monde. Ça ne cochait pas de cases, contrairement à ce que tous les gens disent. L'Histoire du cinéma est pavée de gros succès car ces films étaient singuliers dans le moment où ils ont été proposés au public. Si on avait utilisé l'algorithme à ce moment-là, personne n'y allait, personne ne mettait un centime sur ces films. Ils n'auraient jamais existé."
Taxi a été refusé par tout le monde. Ça ne cochait pas de cases, contrairement à ce que tous les gens disent.
"C'est vraiment préoccupant. On voit de plus en plus les mêmes histoires, racontées de la même façon, et le public en a marre. Il va falloir s'attaquer à ça. En ce sens, je recommande à vos lecteurs un livre absolument brillant, qui évoque très bien cette situation, c'est Génération offensée de Caroline Fourest."
TAXI 5, UN REGRET ?
Gérard Krawczyk, artisan majeur du succès de la saga Taxi, a commencé à réaliser le premier opus, remplaçant au pied levé un Gérard Pirès souffrant après une chute de cheval. Il a ensuite mis en scène les 3 autres épisodes, rassemblant plus de 20 millions de spectateurs.
Malgré ce succès, c'est Franck Gastambide qui reprendra le flambeau en 2018 avec Taxi 5. "J'ai appris la mise en chantier du projet par la presse. J'ai trouvé ça un peu dommage. Après, je n'ai rien contre le fait qu'on ait voulu revisiter Taxi avec des acteurs différents, plus jeunes. Je n'ai pas vu le film et tout ce qu'on m'en a dit ne me donne pas envie de le voir. J'ai l'impression qu'on a perdu l'esprit de la saga", déplore le cinéaste.
"J'ai vu plusieurs films Alien, faits par des réalisateurs différents, mais l'esprit est toujours là. Après on peut en aimer un plus que l'autre, ce n'est pas un problème. La première chose que je regrette, c'est d'avoir appris Taxi 5 par la presse. Personne ne m'a appelé, ni la nouvelle équipe, ni Luc Besson. Ce n'est pas très grave non plus mais je ne peux pas dire que je m'en fiche."
"Je vais même vous dire, je pense qu'il faudrait en faire un nouveau, avec le même esprit, et finir. Avoir un très beau final où on dit au revoir à tout le monde un peu comme un groupe de musique qu'on a aimé pendant des années et qui se dit : 'Maintenant, on boucle avec vous, on a passé des années ensemble et c'était génial et on vous fait le grand final'. Je pense qu'il faudrait faire ça avec les acteurs originaux. J'ai des idées mais il faudrait que j'en parle à Luc Besson et que ses co-producteurs soient d'accord entre eux. Peut-être que Luc a d'autres idées pour faire un 6ème film et que c'est pas du tout les miennes. Je n'en sais rien, je ne lui en ai pas parlé."
"Après, je ne pense pas à mon retour au cinéma avec ça, j'ai d'autres projets. J'en avais deux qui se sont arrêtés, le premier était un gros projet américain stoppé à cause du Covid. C'était sur Paul Watson, l'activiste écologiste qui a quitté Greenpeace pour faire The Sea Sheperd. Le 2ème gros projet que j'avais, je l'ai écrit et c'était financé par les russes. Ça devait se passer sur 3 époques : tsariste, communiste et de nos jours. On s'occupait du financement, ça se passait bien et l'invasion de l'Ukraine par la Russie a enterré le projet", regrette Gérard Krawczyk.
Toutefois, le metteur en scène écrit un nouveau projet pour la France. Il en a aussi un autre prévu pour l'étranger et "qui est très excitant", révèle-t-il. "On a tous pleins de projets, on ne sait jamais s'ils vont se faire. Tout est possible. Et puis aujourd'hui, la situation est compliquée, les gens ne savent plus très bien ce qu'il faut faire, il faut cocher des cases. Quand j'écris une histoire, je ne pense pas à ça", conclut le cinéaste.