L'année 1968 n'a pas été de tout repos pour Louis de Funès. Depuis quatre ans, il est pourtant la star comique la plus reconnue du cinéma français, avec à son actif parmi les plus grands succès du moment : Le Corniaud, La Grande vadrouille, la trilogie Fantômas (qui pourrait connaître une toute nouvelle adaptation) ou encore Oscar !
Pourtant, il va être victime d'une sombre affaire.
Vous gagnez trop d'argent !
Au mois de septembre, Louis de Funès reçoit une lettre signée "Pierre Langlois" indiquant : "Il faut verser 150 000 F pour aider mon groupe, vous gagnez trop d'argent dans cet État bourgeois". A titre de comparaison, 150 000 francs de 1968 seraient équivalents, selon l'Insee, à plus de 200 000 euros de 2022 !
Ce chantage est organisé par un groupuscule baptisé "Delta 4", formé à la suite des événements de mai et de juin. Mais le véritable responsable se dénonce près d'un mois plus tard.
On apprend alors qu'il s'agit d'un certain Jacques Robert, un homme de 34 ans avec des antécédents psychiatriques. Jugé pour cette affaire, il est condamné à 18 mois de prison pour tentative d'extorsion de fonds.
Robert fera à nouveau parler de lui en 1977 lorsqu'il détournera un avion d'Air Inter, mais cette fois, ses actes auront des conséquences plus funestes. L'assaut de la police fera un mort, un blessé grave et trois blessés légers.
Assez ironiquement - ou peut-être n'est-ce pas un hasard - Louis de Funès sera à nouveau victime d'un maître-chanteur mais cette fois "pour de faux" dans Jo, de Jean Girault, sorti en 1971, soit trois ans après cette affaire.
Le contexte n'y est toutefois pas le même car, dans le film comme la pièce dont il s'inspire, le chantage concerne cette fois un secret entourant la femme du personnage principal, jouée par l'incomparable Claude Gensac.
Encore des ennuis pour De Funès !
Plus tôt dans l'année 1968, pendant les événements de mai durant lesquels une partie des jeunes Français se rebelle contre l'ordre établi, Louis de Funès voit le tournage du Gendarme se marie, troisième opus de la saga, perturbé. Les techniciens, poussés par leurs syndicats, sont prêts à arrêter la production du film de Jean Girault.
Pris de panique, De Funès a peur qu'on vienne chez lui voler son argent durement gagné - rappelons que le comédien a connu des décennies de "vaches maigres" au cours desquelles il faisait de la figuration au cinéma le jour et jouait du piano la nuit pour payer ses factures et faire vivre sa famille.
L'acteur comique charge donc son réalisateur et ami Jean Girault de se rendre le plus vite possible dans sa propriété et d'y déterrer un coffre-fort rempli de lingots d'or ! On imagine alors très bien la scène, comme tirée de Faites sauter la banque (de Jean Girault, d'ailleurs) avec un De Funès portant casque de chantier sur la tête et plan à la main !
Le metteur en scène s'exécute mais ne retrouvera jamais le précieux trésor, et la grève est prononcée sur le tournage, au grand dam de De Funès, qui continue chaque jour à venir sur le plateau pour montrer son désaccord. Il se résigne jusqu'à ce que le tournage reprenne début juin.
Le Gendarme se marie est-il le meilleur film de Louis de Funès selon vos votes ? En tout cas, lors de sa sortie le 30 octobre 1968, le long-métrage réalise un score impressionnant au box-office avec 6,82 millions d'entrées en France, soit moins que le premier épisode des aventures de Cruchot et Gerber (7,8 millions), mais plus que Le Gendarme à New York (5,49 millions).
Le Gendarme en balade sortira deux ans plus tard et ne déméritera pas avec 4,87 millions de tickets vendus.