Plusieurs jours après la parution des révélations du Parisien et de Libération au sujet de Sofiane Bennacer, accusé de viols et violences, les réactions se multiplient.
L'acteur Sofiane Bennacer (Les Amandiers) mis en examen pour viols et violencesL'un des deux producteurs du film Les Amandiers de Valeria Bruni Tedeschi, Patrick Sobelman (Agat Films), a assuré vendredi au micro de France Inter, puis dans un communiqué diffusé ce week-end (à retrouver en intégralité ci-dessous), que la production ne savait rien de ces accusations avant d'engager Sofiane Bennacer.
La production explique avoir d'abord été mise au courant de rumeurs, puis, deux jours après le début du tournage, d'accusations, mais "que [Sofiane Bennacer] n'avait jamais été entendu et qu'aucune enquête n'avait été ouverte". Et d'ajouter : "Nous en informons alors la réalisatrice. Mettant en avant la présomption d'innocence, celle-ci n'envisage pas de continuer le film sans ce comédien".
Quelques cinémas ont ensuite fait savoir leur décision de déprogrammer le film, ou d'en encadrer les projections. Le Concorde basé à La Roche sur Yon déprogramme purement et simplement le film, tandis que L'Ecran de St Denis en arrête l'exploitation temporairement pour organiser un encadrement des projections.
L'équipe du cinéma L'Ecran de Saint Denis détaille sa position : "En concertation avec la présidente de l’association, nous avons décidé de retirer temporairement le film de notre programmation. Ce n’est pas ici un appel à la censure du film, nous ne nous inscrivons pas dans cette idée, mais de temporiser : Nous ne voyons pas la programmation d’un cinéma et d’un film comme un acte fortuit, mais un choix d’animation culturelle dans le cadre d’une mission de service public.
Or ce choix n’a pas pu être fait avec l’ensemble des éléments nécessaires pour prendre parti sur la diffusion des Amandiers, ou comment la contextualiser. D’autant plus que, nous essayons dans notre travail d’offrir les films comme sujet de réflexion et de débats, et notamment sur les questions autour des droits des femmes."
Ce n’est pas ici un appel à la censure du film, nous ne nous inscrivons pas dans cette idée, mais de temporiser
Et d'ajouter : "Les Amandiers, qu’on le veuille ou non, est sorti de la simple exploitation pour devenir un objet de débat, à la croisée de plusieurs questions : celle de l’incapacité dans le milieu du cinéma de veiller à neutraliser des situations potentiellement toxiques, mais aussi celle du rôle d’une salle d’être une agora et pas seulement un simple lieu de diffusion, qui serait dans une neutralité « artistique » par rapport aux débats qui secouent notre société. Les cinémas doivent être aussi un « Safe Space » où les gens sont avertis de ce qu’ils vont voir et dans quel contexte, y compris des films potentiellement polémiques, et où on respecte leurs sensibilités."
Le distributeur du film Ad Vitam a pris l'initiative d'adresser un courrier aux exploitants de cinéma. "Nous avons bien conscience que le film connait aujourd’hui des tourments suite aux articles parus dans la presse ces derniers jours. (...) Nous imaginons que vous risquez d’être confrontés à certaines questions et réactions de votre public. Vous pouvez bien sûr entourer la diffusion du film de toute précaution qui vous semblerait opportune (discussion avec le public, indication sur l’enquête en cours…).
Les Amandiers est une œuvre collective. (...) Il nous semblerait normal que ce film puisse poursuivre sa vie en salles. Mais sachez que face à cette situation, nous comprenons et respectons toutes les positions et décisions que vous prendrez quant à l’exploitation du film dans votre salle. Cette décision appartient à chacun d’entre vous." Retrouvez le communiqué complet sur le site de Boxofficepro.
Plusieurs journaux ont assuré un suivi de l'affaire ces derniers jours, dont Le Monde, Télérama et Libération. Libération s'est penché sur la question de la présomption d'innocence invoquée par Valeria Bruni Tedeschi.
Sofiane Bennacer accusé de viols et violences : Valeria Bruni Tedeschi prend la paroleLibération a sollicité une juriste pour savoir si la production du film aurait pu mettre fin au contrat d'un acteur sur la base d'une plainte. "Un licenciement pour cause réelle est sérieuse et envisageable." Et d'ajouter : "La dissimulation de l'existence d'une plainte pour viol par un candidat constitue un manquement au devoir de loyauté et de bonne foi. Dans un contexte de moindre acceptation sociale des violences sexuelles, elle est en outre susceptible de nuire à l'employeur qui pourrait être suspecté d'indifférence sur ce sujet."
La journaliste Marine Turchi, spécialisée dans le suivi d'affaires de violences sexuelles pour Mediapart, a également fait un point sur la notion de "présomption d'innocence". "Ce principe judiciaire fondamental n’empêche pourtant ni la parole, ni la liberté d’informer, ni la mise en place de mesures conservatoires", indique Mediapart.
Pour mémoire, l'acteur Sofiane Bennacer, actuellement à l'affiche des Amandiers de Valeria Bruni Tedeschi, a été mis en examen. Cette mise en examen pour viols et violences sur plusieurs ex-compagnes, remonte à octobre dernier. Elle a été confirmée par le parquet de Mulhouse, à BFMTV.
Il a été placé sous contrôle judiciaire, avec interdiction de se rendre à Strasbourg, Mulhouse, ainsi qu'en Île-de-France. Sofiane Bennacer nie ces accusations et a porté plainte contre les quatre plaignantes pour diffamation, précisent nos confrères, rapportant les informations du parquet de Mulhouse.
Comme le rappelle le site de BFMTV, "l'affaire avait commencé en 2021, après une plainte pour viol déposée par l'une de ses anciennes compagnes. Depuis, trois autres femmes ont indiqué avoir subi des viols ou des violences de la part de l'acteur, portant le nombre de plaignantes à quatre. Sofiane Bennacer a été mis en examen dans le cadre de trois premières plaintes, et a été placé sous le statut de témoin assisté pour une quatrième".
Après l'article du Parisien en début de semaine, de nouveaux témoignages ont accusé l'acteur Sofiane Bennacer de "violences sexuelles et physiques". Deux nouvelles victimes le mettent en cause pour des "violences sexuelles et physiques". Elles ont décidé de ne pas porter plainte.