Quelques heures avant de recevoir son Prix Lumière, à Lyon, Tim Burton a accordé une masterclass dans l'enceinte du Théâtre des Célestins. Au cours de cette rencontre, organisée dans le cadre du Festival Lumière, il est revenu sur son enfance, sa place à Hollywood et sa passion pour l'horreur.
AlloCiné a assisté à l'événement et vous propose de le revivre à travers trois parties. Après avoir abordé son rapport compliqué avec Hollywood et son aventure sur Batman, ce troisième volet se concentre sur ses inspirations "monstrueuses" et ses collaborations de longue date.
Quand il parle de son enfance, à Burbank, une ville située en Californie, Tim Burton se souvient d'une vie monotone. Le seul moyen de rompre avec l'ennui ? Le cinéma. "Je me suis souvent refugié dans l'obscurité des salles, se remémore-t-il. Les films étaient ma forme de thérapie, d'exploration. Ils nourrissaient mes rêves, ma créativité. J'avais l'impression d'appartenir à quelque chose."
L'objet de sa fascination ? Les films de monstres et ce, dès son plus jeune âge. "Petit, je voulais être Godzilla. Je voulais entrer dans l'un de ces costumes et détruire Tokyo", lance-t-il. Le réalisateur précise : "Je n'ai jamais eu peur de ces films, au contraire, j'ai toujours eu une grande affection pour les monstres. J'ai un lien très fort avec eux, aussi bien psychologiquement qu'esthétiquement." Il rendra même hommage à une figure de l'horreur, Béla Lugosi, l'interprète de Dracula, dans Ed Wood en 1994.
Parmi les artistes qu'il admire, Tim Burton cite Roger Corman et Mario Bava, icône du cinéma italien. "Mon objectif était devenir quelqu'un comme lui", explique-t-il. Le cinéaste revendique également sa sensibilité européenne. "Les films d'horreur Universal, même s'ils étaient faits en Amérique, étaient dirigés par des réalisateurs européens."
Il poursuit : "Leurs univers renvoyaient à la fantaisie, aux contes de fées, aux fables, à travers des images graphiques fortes. J'ai toujours senti une connexion avec le cinéma japonais, italien et français. Il y a une dynamique cinématographique qui, je pense, m'a emporté."
Dans l'univers de Tim Burton, certains noms sont majeurs, comme celui du musicien Danny Elfman. Il a composé la partition de son premier long métrage, Pee-Wee Big Adventure, et l'a suivi dans la plupart de ses œuvres. "Nous avons survécu à plus de 30 ans d'amitié, donc je continuerai mon travail avec lui. Nous venons justement de faire la mini-série Mercredi."
Impossible de ne pas penser également à Johnny Depp. Depuis leur rencontre sur Edward aux mains d'argent, le duo s'est retrouvé sur sept autres films. "C'est un homme très différent de moi, fait savoir Tim Burton. Il vient d'une banlieue un peu white trash, mais j'ai tout de suite senti qu'on allait s'entendre, même sans se parler. Je savais qu'il était capable d'essayer de nouvelles choses. Il n'a jamais hésité à s'imposer des défis et c'est sans doute pour cela qu'on s'entend si bien."
Le réalisateur est également revenu sur son travail avec Marion Cotillard et Eva Green, deux Françaises qu'il décrit comme "de vraies stars de cinéma à l'ancienne". Il a rencontré la première en 2003 sur Big Fish : "Je ne connaissais pas très bien son travail, mais elle était incroyable. Elle a survécu dans l'Alabama pendant six mois et rien que pour ça, chapeau !"
Quant à Eva Green, il a travaillé avec elle à trois reprises, pour Dark Shadows en 2012, Miss Peregrine en 2016 et pour Dumbo en 2019 : "Elle était tellement préparée et précise. Pour Dumbo, elle a appris à faire du trapèze et elle était si douée qu'elle aurait pu rejoindre un cirque si elle le voulait. Une actrice comme elle, vous vous nourrissez de son énergie, vous ne savez jamais ce qu'elle va faire par la suite. C'est une vraie joie de travailler avec des gens comme ça."
Tim Burton a évidemment mentionné Vincent Price, qui a joué un rôle important dans le début de sa carrière. En 1982, il lui dédie même son court métrage Vincent. "Je me suis beaucoup inspiré de ma relation avec lui pour Ed Wood", révèle-t-il. En 1991, il joue dans Edward aux mains d'argent. Ce fut l'une de ses dernières apparitions avant sa mort, en 1993.
Le remise du Prix Lumière à Tim Burton, le 21 octobre 2022 :
Propos recueillis par Thomas Desroches, à Lyon, le 21 octobre 2022.