Banderas, Cassel, Perlman, Pitt, Dewaere, Connery : ils ont tous traversé (et marqué) l'œuvre de Jean-Jacques Annaud. A l'occasion de la sortie de "Or Noir", le cinéaste évoque ces rencontres... Propos recueillis par Brigitte Baronnet et Yoann Sardet
"Je ne peux pas l'évoquer sans avoir beaucoup d'émotion. Je me suis battu pour l'avoir, car le producteur n'en voulait pas dans la mesure où il prenait des substances, etc... Mais Patrick a arrêté ces substances pour faire le film –il a recommencé après. Ca a été une relation d'une incroyable tendresse. Il était, comme moi, très pudique. Avec Patrick, on s'est beaucoup plu parce qu'on était très différents. Sous mon apparente fragilité, j'étais finalement assez solide. Alors que lui qui était fort comme un boxeur était tout en doutes et en tourments. On a été des compagnons vigilents, des compagnons très à l'écoute l'un de l'autre. Je revois toujours son regard d'enfant à al fin de la première prise : il me disait toujours 'Alors ?' Et moi, évidemment, je trouvais toujours une raison pour améliorer la prise. Il se jetait sur moi, il me prenait à la gorge, il me soulevait car il était fort comme un taureau, et soudain son visage s'épanouissait, il était tout sourire, il me reposait et il me disait 'Alors regarde, tu vas voir la deuxième, tu vas voir..'. Et il repartait devant la caméra pour m'étonner de nouveau. C'était Patrick : très impulsif, complètement tendre, complètement à fleur de peau, fragile..."
"C'était un acteur passionnant, car il amenait cette tonalité de doute. Il était à la fois gai et triste : quand Patrick riait, c'était comme une cloche avec une fêlure. La note n'était jamais pure. Il y avait une profondeur, une douleur, toujours. C'est ce qui le rendait passionnant. Avec Patrick, j'ai toujours eu un rapport au-delà du cinéma. Je lui prêtais ma maison de campagne. Il venait sans prévenir, c'était son refuge. Il se sentait bien là, parce qu'il savait que je l'aimais beaucoup et que je ne lui demandais aucun compte. Il s'est confié à moi avant de mettre fin à ses jours, avec discrétion toujours, mais j'ai compris. Ca m'avait bouleversé évidemment, mais je n'ai même pas pu le dissuader. De toute façon, ce n'était pas ça qu'il me disait, mais c'était ça qu'il voulait que je comprenne : donc je n'étais pas censé répondre à une question qui n'était pas posée... Il y a d'ailleurs toujours une clé cachée pour lui, je ne l'ai pas retirée. Mais c'était un personnage fascinant, et qui manque énormément. Il a une tonalité assez irremplaçable." Jean-Jacques Annaud
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