Voilà mon coup de cœur du mois de janvier. « M'entends-tu ? » est en quelque sorte l’exact opposé de « Emily in Paris ». Ce n’est pas tant parce que Montréal y remplace la Ville lumière, car la métropole du Québec, sans être aussi belle que celle de la France, a ses charmes. Mais ses attraits, ils sont cachés dans cette série qui se passe dans un quartier défavorisé. Au contraire, ce qu’on nous montre, ce sont des rues pleines de nids-de-poule, des trottoirs encombrés de poubelles ou de sacs percés, des maisons défraîchies. On n’y voit pas non plus de restaurants chics où l’on salive juste à voir les plats. Ici, on ne bouffe que de la malbouffe, dans des casse-croûte de deuxième ordre. Et les trois jeunes femmes dont on raconte l’amitié, Ada, Fabiola et Caro, ne sont pas canons. Elles ne changent pas non plus de tenue quatre ou cinq fois par épisode. Elles portent presque toujours les mêmes fringues, parce qu’elles n’en ont pas d’autres.
Cette série n’est pas pour autant misérabiliste. Sans doute parce que sa conceptrice, Florence Longpré, qui tient aussi le premier rôle, a abordé la narration sous l’angle de l’humour. On rit beaucoup donc, mais c’est souvent pour ne pas pleurer, en particulier dans la deuxième saison où l’on aborde de front la violence conjugale. Et puis, dans toutes ces histoires souvent dures, on trouve de la résilience, de l’amitié et de l’espoir.
Il y a dans cette série, qui s’étend sur trois ans, quelques grands moments de télé. Je pense, entre autres, à cette scène où Ada, excédée, sort dans la cour pour abreuver d’injures ses voisines du dessus, dont le chien jappe trop à son goût. S’ensuit une engueulade de haute voltige qui est une pièce d’anthologie. Je pourrais également citer la scène de l'amoureux dans l'échelle qui se fait souffler ses répliques par un ami, comme dans « Cyrano de Bergerac » ou le séjour dans un chalet ou l’après-midi dans un spa.