Russell T Davies n'en avait peut-être pas la prétention, mais il vient de placer son It's A Sin dans les meilleures séries sur l'homosexualité (faisant au passage de l'ombre aux productions de Ryan Murphy, qui a trouvé ici un concurrent sérieux), qui tire à balles réelles droit dans le cœur. Cinq petits épisodes de 45 minutes pour boucler cette mini-série, et l'on n'a pas pu ciller une seule fois, on n'a pas regardé notre montre, trop occupé qu'on était à adorer les rôles et à pester contre les "germaphobes de l'extrême". Le mélange d'émotions est sincère, oscillant entre joie de prendre part à la fête de ce groupe de jeunes homosexuels qui vivent leur sexualité avec fierté et courage, peur de voir l'un d'eux attraper le sida (qui pullule dans les années 80 sans que personne n'en connaisse rien), colère de constater le manque de tolérance (intelligence tout court) de la part de nombreux hétérosexuels qui les fuit comme la peste ou envoient la police les matraquer sans pitié (on n'a pas pu s'empêcher d'utiliser notre dictionnaire d'insultes devant le téléviseur lors des séquences-chocs), et évidemment tristesse profonde lorsqu'on assiste à la lente agonie des malades du VIH. On a été vraiment conquis par les choix faits du casting qui placent en personnage principal (Ritchie) le jeune acteur Olly Alexander, qui est un musicien militant pour l'égalité et le respect de l'homosexualité (et LGBT+) ayant lui-même vécu une jeunesse faite de harcèlement homophobe. Sa composition s'appuie sur son expérience, et rend son rôle plus crédible, bien entouré par la bande adorable d'acteurs qui forment cette belle troupe d'amis. Côté guest-stars, on reconnaîtra Neil Patrick Harris dans un rôle qui lui va si bien (on est toujours ravi de revoir notre Barney hilarant, surtout s'il s'agit de personnages dramatiques comme ce charmant confectionneur de costumes cachant son homosexualité), et Stephen Fry qui s'amuse à jouer les peaux-de-vaches. Et comment oublier les meilleurs invités de cette série : les Daleks. Le temps d'un petit "caméo", on sautera de notre fauteuil en voyant débarquer nos aliens robotiques préférés, qui rendent évidemment hommage à la série Doctor Who dont Russell T Davies est le "papa" du revival (pour les fans : étant dans les années 80, on voit une scène de la première version de la série, arrêtée en 1995, et non pas celle de Davies qui débutera en 2005, d'où le design des Daleks "à l'ancienne"). On accroche aussi à la BO faite de très bons tubes des années 80, allant de l'entraînant Sweet Dreams au si beau Who Wants To Live Forever (Queen, dont la chanson reprend tout son sens en accompagnant un personnage dans la mort imminente). On ressent bien la peur de toute une génération face à un virus qu'elle ne comprend pas (tiens ? cela ne nous rappelle pas une actualité ?), sans jamais tomber dans l'abus de violons tire-larmes, une petite prouesse en soit. It's A Sin parvient donc à nous faire plonger dans son époque pour le meilleur et surtout le pire, et nous invite à sa fête en nous promettant une larme entre deux sourires. Ça serait péché de ne pas y succomber.