Originaire d'Italie, Ernest Borgnine ne se destine pas particulièrement à la comédie. A 18 ans, il s'engage dans la Navy, jusqu'en 1945. Ce n'est qu'à la fin de la guerre qu'il s'inscrit à la Randall School of Drama, à Hartford. Il fait ses débuts sur scène à Broadway, quatre ans plus tard, dans la pièce Harvey. En 1951, Borgnine déménage à Los Angeles : il décroche des petits rôles grâce aux films Whistle at Easton Falls, de Robert Siodmak et China Corsair de Ray Nazarro. C'est en 1953 qu'il incarne pour la première fois un personnage d'envergure, dans le film multi-oscarisé Tant qu'il y aura des hommes, où il est le sergent "Fatso", violent et cruel. Il donne ensuite sa pleine mesure dans Un homme est passé (1954), Vera Cruz (1954) ou Johnny Guitar (1954), trois films qui l'imposent comme l'un des "méchants" d'Hollywood.
Tantôt truculent, tantôt inquiétant, Borgnine trouve sa consécration personnelle en interprétant Marty (1955), pour lequel il remporte l'Oscar du meilleur acteur, ce qui lui permet d'aborder une nouvelle facette de son travail d'acteur : il y trouve le rôle d'un boucher timide et tendre. Véritable bourreau de travail (près de trois films par an), il enchaîne les rôles et malgré lui, retrouve son emploi-type de "dur", d'ours mal léché et violent, notamment dans Quand le clairon sonnera (1955) ou Les Vikings (1958). Il récolte encore une récompense de meilleur acteur au festival international du cinéma de Locarno pour The Rabbit trap (1959) de Philip Leacock.
Malgré ces succès, il continue ses apparitions en guest dans des films plus ou moins bons. Il part en Europe et notamment dans son pays d'origine pour tourner, entre autres, la comédie Le Jugement dernier de Vittorio De Sica, pour lequel il campe un pickpocket. Robert Aldrich lui confie un rôle dans Le Vol du Phénix (1965), puis l'engage pour endosser le costume du savoureux général des Douze Salopards (1967). Borgnine est également engagé dans La Horde sauvage (1969) de Sam Peckinpah, aux côtés de William Holden. Parallèlement, l'acteur est occupé à tenir tant bien que mal en main l'équipage de la série Sur le Pont, la Marine !, dans laquelle il jouera de 1962 à 1966 pour un total de 138 épisodes !
La dualité de Borgnine est d'être un tendre enfermé dans un visage de truand. Ses rôles sont empreints de cette dualité lorsqu'il alterne le bandit de bas étage d'Un Colt pour trois salopards (1971), avec Le Prince et le pauvre (1977), film pour toute la famille. Aldrich lui fait confiance une nouvelle fois, mais toujours en méchant, pour affronter Lee Marvin dans L' Empereur du Nord (1973). Il est également le chef d'une secte satanique dans La Pluie du diable (1975). Certains films sont acceptés à la va-vite et ses apparitions tournées aussi vite. Mais il y a toujours cette volonté de montrer "autre chose" chez Borgnine, qui le pousse notamment à accepter un rôle de journaliste pour Le Trou noir (1979), un film de science-fiction nominé aux Oscars pour ses effets spéciaux.
Dans les années 80, la carrière de Borgnine bat de l'aile. Pour un New York 1997 (1981), de John Carpenter, combien de Jour de la fin du monde (1980), de Ferme de la terreur (1981) ou de Skeleton Coast (1987) ? Si l'acteur s'en donne toujours à cœur joie, il semble enchainer les films avec une indifférence totale. Il joue également dans plusieurs téléfilms, dont Les Douze Salopards 2 (1985) avec Telly Savalas. La télévision l'attire encore lorsqu'il joue pendant quatre ans le gérant d'une compagnie d'hélicoptères, Santini Air, spécialisée dans les cascades de films hollywoodiens dans Supercopter.
C'est à nouveau le temps des mauvais films pour Borgnine qui fait de petits rôles : un médecin pour Tides of War (1990), un grand-père dans Les Nouvelles aventures de Merlin l'enchanteur (1996), un producteur bienveillant dans BASEketball (1998). De cette décennie, c'est surtout Bienvenue à Gattaca (1997) qui mérite la mention. Il s'essaye ensuite (avec succès) au doublage dans Charlie 2 (1996) ou Small Soldiers (1998).
Depuis 1999, il prête sa voix à l'homme-sirène vieillissant de Bob l'éponge. Il produit et incarne le chef du FBI Edgar Hoover en 2000. De juges en grand-pères gâteaux (mais pas gâteux!), Borgnine continue de jouer, inoxydable. En 2004, il est Rolling star, dans le film inspiré de la bande dessinée, Blueberry. Loin des personnages sanguinaires qui l'ont rendu célèbre, il incarne un vieil homme doux et rêveur. Il participe au dernier épisode de la série Urgences, qui lui vaut une nomination à l'Emmy de la meilleure apparition guest. En 2010, sa participation à Red (comme archiviste de la CIA) lui fait côtoyer Bruce Willis, qui n'était pas né que Borgnine tournait son premier film ! A 90 ans passés, son image d'éternel méchant lui colle à la peau, et il double un rat dans The Lion of Judah (2010).
En 2011, il est à l'affiche du film de science-fiction Enemy Mind, figure dans la comédie Snatched, et joue un patron de boîte de nuit à la retraite dans Night Club.
Auteur : Corentin Palanchini