Jean Poiret, de son vrai nom Jean Gustave Poiré, voit le jour dans le quatorzième arrondissement. Issu d’un milieu modeste, son père Georges est ouvrier-verrier et sa mère Anne-Marie aide-comptable. Il passe son enfance à Villejuif en région parisienne. Passionné par le théâtre, il décide, à l’adolescence, de devenir comédien et apparaît pour la première fois sur les planches en 1944 dans une pièce de John Millington Synge. En 1951 et 1952, il tient le rôle de Fred Transport, un des héros de la série radiophonique Malheur aux Barbus de Pierre Dac et Francis Blanche.
En parallèle, Jean Poiret suit des cours d’art dramatique de la Rue Blanche à Paris sous la direction de Jean Le Goff et Julien Bertheau. C’est ici, et plus précisément aux matinées classiques du Théâtre Sarah Bernhardt, qu’il rencontre en 1952 Michel Serrault. S’ils essaient tous deux à l’époque de décrocher des petits rôles dans des pièces classiques, leur entente est immédiate. Très vite, Jean Poiret et Michel Serrault interprètent ensemble le sketch Jerry Scott, vedette internationale, et poursuivent rapidement leurs carrières respectives en duo. Ils font les beaux soirs de l’Olympia, le Bambino, et l’Alhambra.
Acteur en devenir, Jean Poiret fait ses premiers pas au cinéma en 1953 en apparaissant dans Les Trois Mousquetaires, sous la direction d’André Hunebelle. A cette époque, le comédien épouse Françoise Dorin, avec qui il aura une fille, Sylvie. En 1955, grâce à Cette sacrée gamine avec Brigitte Bardot et Serrault, le comédien se fait connaître du grand public. Tout au long de sa carrière, il tournera avec Michel Serrault une trentaine de fois, de Assassins et voleurs (1956) de Sacha Guitry à C’est pas moi, c’est l’autre (1962) de Jean Boyer, en passant par La Gueule de l’autre (1979) de Pierre Tchernia.
En 1961, Jean Poiret fait une nouvelle rencontre déterminante dans sa carrière durant le tournage de Snobs : Jean-Pierre Mocky. Leur nom est aujourd’hui associé à huit autres films, parmi lesquels Un drôle de paroissien (1962) avec Bourvil, La Bourse et la vie (1966) avec Fernandel, Le Miraculé (1986) avec Jeanne Moreau et Une nuit à l’Assemblée Nationale (1988) avec Michel Blanc. L’acteur fait également le bonheur de la télévision où ses talents d’amuseur font mouches. En 1970, on le retrouve aux côtés de Bourvil dans Le Mur de l’Atlantique de Marcel Camus. Le succès n’étant pourtant pas au rendez-vous, il retourne au théâtre, un art qui ne l’a jamais déçu. C’est d’ailleurs en 1973 qu’il rencontre l’actrice Caroline Cellier, sa compagne qui devient la mère de son premier fils, Nicolas, cinq ans plus tard.
Le 1er février 1973, le duo Poiret-Serrault atteint à travers La Cage aux folles la consécration. La pièce de l’écrivain/comédien connait un succès triomphant. La coopération entre les deux artistes étant extrêmement fusionnelle, ils prennent du plaisir à improviser durant les représentations. En 1978, Jean Poiret décide d’adapter au cinéma sa pièce mais se contente d’y être scénariste. L'acteur italien Ugo Tognazzi reprend son rôle de Renato Baldi, tandis que son partenaire Michel Serrault y joue Zaza Napoli : une prestation qui lui vaut en 1979 le César du meilleur acteur. Le film est très vite un immense succès et engendre deux suites : La Cage aux folles II (1980) de nouveau réalisé par Edouard Molinaro et La Cage aux folles III (1985) mis en scène par Georges Lautner.
Après avoir joué dans de nombreux films au succès mitigé durant une dizaine d’année, Jean Poiret revient au cinéma en tant qu’interprète et scénariste de La Gueule de l’autre (1979) de Pierre Tchernia mais surtout dans Le Dernier Métro (1980). Sous la direction de François Truffaut et aux cotés de Catherine Deneuve et Gérard Depardieu, il incarne un metteur en scène nommé Jean-Louis Cottins. Alors que le film récolte huit oscars, le comédien y voit une certaine renaissance en déclarant par la suite que "C’est à partir du dernier métro que j’ai eu l’impression de faire du cinéma". En 1985, Claude Chabrol lui offre le premier rôle de deux de ses films : Poulet au vinaigre et Inspecteur Lavardin, qui font l'objet d'une adaptation pour la télévision. Jean Poiret adapte également sa pièce de théâtre "Joyeuses Pâques" pour le cinéma. Dans le film du même nom réalisé par Georges Lautner, c’est Jean-Paul Belmondo qui reprend son rôle aux côtés de Sophie Marceau.
Pour son premier et dernier passage derrière la caméra, le comédien adapte un roman d'Alexandre Jardin, Le Zèbre, dans lequel il met en scène son épouse Caroline Cellier et Thierry Lhermitte. Victime de deux infarctus, il fait ses adieux à la scène, sans voir paraître son film, prévu trois mois plus tard. L’acteur qui aimait rire et faire rire s’éteint le 14 mars 1992 à l’âge de 65 ans.
Auteur : Charles Dervaux