Profondément marqué par la guerre (il est retrouvé survivant dans les décombres de sa maison à Varsovie, tandis que son père résistant est fusillé par les Nazis), Jerzy Skolimowski manifeste peu d'intérêt pour les études, et se fait même souvent renvoyer. Il entreprend néanmoins des études universitaires de Littérature et d'Histoire afin d'échapper au service militaire. Il se forme par la suite à l'école de cinéma de Lodz, en compagnie en particulier de Roman Polanski, pour lequel il écrira en 1962 le scénario de son premier film : Le Couteau dans l'eau. Passionné de Jazz, sa collaboration avec Krzysztof Komeda lui permet de rencontrer Andrzej Wajda. Ce dernier lui confie alors l'écriture du scénario des Sorciers innocents. A peine âgé d'une vingtaine d'années, Jerzy Skolimowski a déjà à son actif plusieurs receuils de poèmes, une pièce de théâtre, des court-métrages, un documentaire (Akt) et plusieurs scénarii.
Dans la mouvance du vent libertaire qui balaye le cinéma d'Europe Centrale dans les années 60, avec des cinéastes comme Milos Forman qui insufflent un traitement ironique aux conflits inter-générationnels, Skolimowski participe au renouveau du cinéma polonais. L'engagement physique, la dépense, l'énergie se retrouvent justement dans ses films, tant dans la mise en scène et le montage qu'à l'écran, et resteront tout au long de sa carrière un signe particulier de sa poétique. Avec Signes particuliers: neant en 1964 (jusqu'à Success is the best revenge en 1984), il inaugure le premier film semi autobiographique d'une série de six sur le thème de la perte de l'innocence , dans lesquels il tient notamment le rôle récurrent du personnage Andrzej Leszezyc. Après La Barriere en 1966, il signe Le Depart, dans lequel il dirige Jean-Pierre Léaud; un film jugé mineur par son auteur, en dépit de l'Ours d'or qu'il remporte au Festival du film de Berlin. Il n'a selon lui pas la force ni la virulence de Haut les mains, qu'il a conçu comme "un gigantesque cri silencieux, une provocation pour les 32 millions de Polonais pour les faire réagir sur ce qui ne va pas dans le pays". Le film est d'ailleurs rapidement interdit, et ne sortira qu'en 1980.
A la fin des années 60, le cinéaste émigre au Royaume-Uni; sa carrière s'internationalise. Ses premiers films dotés de budgets conséquents, comme Deep End, Les Aventures du brigadier Gérard (1970) ou encore Roi, Dame, Valet sont des échecs cinglants, en dépit d'acteurs et d'actrices de renom en haut de l'affiche (Claudia Cardinale, Gina Lollobrigida, David Niven...). Sa carrière subit une éclipse qui durera jusqu'au succès critique du Cri du sorcier en 1978, suivi par celui de Travail au noir. Porté par Jeremy Irons, et prenant pour toile de fond la loi martiale décrétée par Jaruzelski en Pologne en 1980, le film reste le plus grand succès commercial du cinéaste, couronné du Prix du Meilleur scénario au Festival de Cannes en 1982. Avec Le Bateau phare (1985), il signe sa première collaboration avec le cinéma américain. En 1988, il réalise Les Eaux printanieres; l'occasion pour lui de revenir sur un genre qu'il avait tenter d'aborder sans succès dans Roi, Dame, Valet.
Après la sortie de Ferdydurke en 1991, il s'éloigne de la caméra, consacrant surtout son temps à la poésie et la peinture. Il continue pourtant à fréquenter les plateaux mais en tant qu'acteur. Ainsi, on peut le voir chez Tim Burton dans le délirant Mars Attacks, ou encore dans Avant la nuit (2000) de Julian Schnabel. En 2007, David Cronenberg le sort de sa semi-retraite en lui confiant un rôle ambigu dans ses Promesses de l'ombre. Un rôle qui peut-être participe à lui redonner le goût à la réalisation puisqu'il sort en 2008 le drame inquiétant Quatre nuits avec Anna, plus de quinze ans après son précédent film. Il se lance ensuite dans son film suivant, le physique Essential Killing, qui met en scène la chasse à l'homme lancée contre un taliban évadé incarné par Vincent Gallo. Le film est présenté à la Mostra de Venise en 2010 où il obtient le Grand Prix du Jury et le prix d'Interprétation pour Gallo.