Elevée par une mère infirmière, Victoria Merida grandit à Malaga puis à Madrid. Sa vocation première est la danse classique, qu'elle pratique avec ardeur jusqu'à l'adolescence. Encouragée par son professeur, elle accepte néanmoins son premier rôle au cinéma dans Obsession (1975). Celle qui s'appelle désormais Abril incarne, à 16 ans, la reine Isabelle aux côtés de Sean Connery et Audrey Hepburn dans La Rose et la flèche, puis tient le rôle périlleux d'un homme qui devient femme dans Cambio de sexo (1977), première étape d'une longue collaboration avec Vicente Aranda, cinéaste qui permettra à l'actrice d'obtenir un Prix d'interprétation à Venise en 1991 pour Amants.
Venue, par amour, s'installer à Paris au début des années 80, Victoria Abril tourne dans La Lune dans le caniveau et L'Addition, décrochant pour ces deux compositions de femme passionnée une nomination au César du Second rôle en 1984 et 1985. Elle donne la réplique à David Carradine (On the line) et tourne avec Oshima (Max mon amour), mais c'est dans son pays natal qu'elle trouve les rôles les plus intéressants, en particulier grâce à Almodovar. Après un rendez-vous manqué (Qu'est-ce que j'ai fait pour meriter ca?, qu'elle refusa) et une brève apparition dans La Loi du désir, elle est en 1990 l'héroïne d'Attache-moi !, une star du X séquestrée par Antonio Banderas. Pour le pape de la movida, elle incarne aussi la fille de Marisa Paredes (le mélo) Talons aiguilles (1992) puis la redoutable "Andréa la balafrée" (Kika).
Proche de Balasko et Jugnot depuis qu'elle a joué dans Nuit d'ivresse (pièce écrite par la première et interprétée par le second), Victoria Abril ne tarde pas à devenir, grace à ces deux acteurs-réalisateurs, aussi populaire de ce côté-ci des Pyrénées. Ces piliers du Splendid la dirigent dans leurs comédies à succès : Une époque formidable... (Jugnot, 1991) et Gazon maudit (Balasko, 1995), dans lequel elle campe une femme mariée qui se découvre des penchants homosexuels.
Appréciée pour son mélange de fantaisie, d'énergie et de sex-appeal, qu'on retrouve dans 101 Reykjavik ou encore Cause toujours ! de Jeanne Labrune, Victoria Abril tourne en Espagne dans des oeuvres sombres (Personne ne parlera de nous quand nous serons mortes, qui lui vaut un Goya en 1996, le thriller Entre les jambes ou Le 7ème jour de Saura). En France, dans les années 2000, elle multiplie les rôles comiques, le plus souvent écrits par des femmes, de Charlotte De Turckheim à Florence Quentin (Leur morale... et la nôtre, 2008).