Fille d'un entrepreneur en menuiserie, Emilie Dequenne prend dès l'âge de 8 ans des cours de comédie. Bachelière à 16 ans, elle suit des études de sciences politiques, tout en rêvant de cinéma et de théâtre. Grâce à sa tante, qui a repéré l'annonce dans un journal, elle se rend au casting de Rosetta, un film de Luc et Jean-Pierre Dardenne. Presque aussi déterminée que le personnage, elle décroche, face à 2 000 concurrentes, le rôle-titre, celui d'une jeune femme, mi-petit soldat mi-petit chaperon rouge, prête à tout pour obtenir puis conserver un emploi. Le conte de fées ne s'arrête pas là, puisque sa performance lui vaut en 1999 un Prix d'interprétation au Festival de Cannes, ex-aequo avec une autre fille du Nord, Severine Caneele, pour L'Humanité.
Dès son deuxième long métrage en 2001, Emilie Dequenne change totalement de registre en incarnant l'héritière Marianne de Morangias dans le film d'aventure Le Pacte des loups, superproduction en costumes signée Christophe Gans. Jeune fille complexée face à Jugnot dans Oui, mais, elle campe pour Claude Berri une femme de ménage qui illumine le quotidien du bougon Bacri (2002). Pleine de fraîcheur, l'actrice, loin de l'univers âpre des Dardenne, s'illustre désormais dans la comédie (Mariées mais pas trop) et joue volontiers les séductrices (L'Equipier, mélodrame de Philippe Lioret en 2004), voire les mangeuses d'hommes (Avant qu'il ne soit trop tard). En 2005, on la retrouve à l'affiche de deux films d'époque, la fresque Le Pont du roi Saint-Louis et l'intimiste La Ravisseuse d'Antoine Santana.
Passant avec aisance du classicisme du Grand Meaulnes (2006) à la fantaisie des Etats-Unis d'Albert (id.), Emilie Dequenne s'essaie en 2007 au thriller avec Ecoute le temps et goûte, aux côtés de Sandrine Kiberlain et Denis Podalydès, à La Vie d'artiste de Marc Fitoussi, un cinéaste qu'elle retrouvera dix ans plus tard pour Maman a tort. On la voit également chez André Téchiné pour qui elle joue en 2009 La Fille du RER, l'histoire d'un mensonge devenu l'un des faits divers les plus médiatisés. Elle partage la même année l'affiche avec Omar Sharif du premier film de Laurent Vinas-Raymond, J'ai oublié de te dire, drame identitaire d'amour et de peinture, puis elle rejoint le casting de l'étrange survival à la française, La Meute, inscrivant ainsi un genre nouveau à sa palette de comédienne.
En 2012, Emilie Dequenne livre une performance bouleversante en mère de famille désespérée qui commet l'irréparable dans A perdre la raison aux côtés de Tahar Rahim et Niels Arestrup. Librement inspiré de l'affaire Geneviève Lhermitte, ce drame vaut à la comédienne plusieurs prix, dont le Magritte (l'équivalent belge des César) de la meilleure actrice et le Prix d'interprétation féminine à Un Certain Regard au Festival de Cannes.
Elle continue de s'illustrer aussi bien dans le thriller (La Traversée et Möbius) que dans la comédie (Divin enfant) et le drame (Par accident, Les Hommes du feu). Trois ans après la comédie romantique Pas son genre, elle retrouve Lucas Belvaux dans un registre plus grave avec Chez nous, qui ausculte les rouages de l'extrême droite en France. Également sollicitée par la télévision, elle apparaît au générique de plusieurs téléfilms — dont La Consolation en 2017, qui revient sur le viol qu'a subi enfant l'animatrice Flavie Flament — et séries, comme À l'intérieur et Un homme ordinaire, consacrée à l'affaire Dupont de Ligonnès. En 2021, elle reçoit le César du meilleur second rôle féminin pour son interprétation d'épouse trompée dans Les Choses qu'on dit, les choses qu'on fait d'Emmanuel Mouret.