Issu d'un milieu bourgeois, de père chimiste et de mère institutrice, ainé de trois garçons, William Holden suit des études scientifiques à la South Pasadena High School. Rien ne le prédestine alors à une carrière de comédien. Mais son passage au Pasadena Junior College, où il découvre la radio et le théâtre, change la donne. Il joue alors dans de nombreuses pièces au niveau amateur, et c'est dans l'une d'entre elles, jouée au théâtre Playbox et où il se glisse dans la peau d'un homme de 80 ans, qu'il se fait remarquer par la Paramount Pictures. Nous sommes en 1937, et William Holden signe avec le studio un contrat d'acteur de quelques mois. Suffisant pour lancer sa carrière.
En 1939, William Holden, jeune adulte, obtient son premier rôle en tête d'affiche dans L' Esclave aux mains d'or, où il incarne un violoniste devenu boxeur aux côtés de l'expérimentée Barbara Stanwyck. Il impressionne mais pas autant que le film, qui ne fait pas recette. Sa carrière ne décolle pas et les années 40 sont celles des seconds rôles, années durant lesquelles il sert également son pays dans l'armée de l'air. Toujours très porté vers la comédie et décidé à ne pas perdre la main, il joue dans des films de propagande de la First Motion Picture Unit, la société de production de l'US Army.
C'est en 1950 que le destin frappe à la porte de William Holden. Alors qu'il ne parvient pas à véritablement lancer sa carrière, le cinéaste Billy Wilder fait appel à lui pour tenir la vedette du film noir Boulevard du crépuscule aux côtés de Gloria Swanson. Son rôle de scénariste malchanceux, qui le fait accéder à la renommée internationale, lui vaut une nomination à l'Oscar du Meilleur acteur. Le film, un classique du septième art, marque le début d'une sublime collaboration avec Billy Wilder, qu'il retrouvera pour Stalag 17 et Sabrina.
Les années 50 font de William Holden l'une des plus grandes stars de l'époque. Acteur complet au physique avantageux, il compose des personnages à la fois décontractés et cyniques qui font merveille dans tous les genres. Qu'il soit prisonnier de guerre dans Stalag 17, qui lui vaut l'Oscar du Meilleur acteur, qu'il séduise Audrey Hepburn dans Sabrina, qu'il incarne un arriviste dans La Tour des ambitieux, qu'il devienne un réalisateur cynique dans Une Fille de la province, ou qu'il joue dans des films plus légers comme Comment l'esprit vient aux femmes ou La Lune était bleue, Holden semble toujours aussi à son aise. En 1957, celui qui incarne l'homme viril dans toute sa splendeur est au pic de sa popularité en incarnant le Capitaine Shears dans Le Pont de la rivière Kwai.
Après le succès du Le Pont de la rivière Kwai, William Holden, déçu par l'industrie hollywoodienne, part s'installer en Europe. Un exil outre-Atlantique qui ne l'empêche pas de de continuer à tourner : il s'illustre notamment dans une série de westerns comme Les Cavaliers de John Ford ou Alvarez Kelly et Deux hommes dans l'Ouest. Cette période n'est pas couronnée de succès et il faudra attendre 1969 et La Horde sauvage de Sam Peckinpah pour revoir le comédien en haut de l'affiche.
L'homme d'affaire et l'amoureux de l'Afrique qui se dépense sans compter pour la sauvegarde de la faune sauvage figure ensuite aux génériques du film-catastrophe La Tour infernale et de films dans lesquels il dévoile une facette plus sensible. Ses prestations désabusées dans le Breezy de Clint Eastwood ou le Network de Sidney Lumet sont ainsi marquantes. Quelques mois après la sortie du S.O.B de Blake Edwards, il connaît une fin tragique en partie due à son alcoolisme notoire. Ivre, il fait une chute dans sa villa de Santa Monica qui lui est fatale. Légende du septième art à la carrière éclectique, William Holden ne s'est pourtant jamais vu comme une star. Ainsi, avec le cynisme qui le caractérisait, il n'hésitait pas à affirmer : "Je suis une putain, tous les acteurs sont des putains. Nous vendons nos corps au plus offrant."
Clément Cuyer