Fils d'une actrice allemande catholique et d'un metteur en scène protestant, Michael Haneke grandit en Autriche. Étudiant en philosophie et en psychologie à Vienne, il monte des pièces de théâtre avant d'écrire et de réaliser de nombreux téléfilms jusqu'au début des années 90. Refusé par les chaînes de télévision, Le Septième continent devient son premier long métrage de cinéma en 1989. Ce film inaugure une trilogie sur la "glaciation émotionnelle" ("emotionale Vergletscherung") qui se poursuivra avec Benny's Video (1992) et 71 fragments d'une chronologie du hasard (1994). Sélectionnés à la Quinzaine des Réalisateurs, les trois films, bâtis autour de faits divers, sont des constats dérangeants sur la violence dans les sociétés modernes, la désintégration des familles et le pouvoir des médias. Présenté en compétition à Cannes, Funny Games crée une onde de choc en 1997. Récit de la séquestration d'une famille par deux ados sadiques, cette œuvre éprouvante choque de nombreux spectateurs. Interrogé par Télérama à propos de cette hostilité, le cinéaste aux airs de professeur austère répondra : "Je trouve cela normal. Quand on vous donne une gifle, vous réagissez."
Devenu un des auteurs les plus cotés du cinéma européen, Michael Haneke engage Juliette Binoche pour Code inconnu, film-puzzle sur l'immigration, l'exil et l'incommunicabilité, tourné en partie en France. Le réalisateur connaît un grand succès avec son film suivant, La Pianiste, pour lequel il fait appel à une autre comédienne française, Isabelle Huppert. S'inspirant d'un roman de sa compatriote Elfriede Jelinek, il brosse le portrait d'une femme autoritaire et frustrée, écartelée entre une mère possessive et un jeune amant. En 2001, à Cannes, le film remporte le Grand Prix ainsi que des Prix d'interprétation pour Huppert et Magimel. Après Le Temps du loup, intrigante fable apocalyptique, Haneke convoque les fantômes de la guerre d'Algérie dans Caché, tourné à Paris en 2005. A Cannes, un Prix de la Mise en scène vient saluer cette œuvre oppressante, dont le personnage principal, aux côtés du couple Auteuil-Binoche, est une mystérieuse caméra.
Après avoir secoué les spectateurs français, c'est pour adresser un message au public américain qu'il réalise en 2007 un remake de Funny Games avec Naomi Watts et Tim Roth. Il retrouve sa langue maternelle avec Le Ruban blanc, réflexion subtile et troublante sur les racines du nazisme à travers le portrait d'un village allemand en 1913. Ce film en noir et blanc qui tient à la fois de la fable, du film historique et du thriller, décroche en 2009 la Palme d'Or à Cannes, une récompense qui avait jusqu'alors toujours échappé à Haneke. Le cinéaste autrichien regagne la Croisette en 2012 avec son poignant Amour, film sur la fin de vie et la souffrance de l'être aimé, qui remporte une deuxième Palme d'Or, classant ainsi le cinéaste parmi les rares réalisateurs à avoir été doublement primés à Cannes.