Durant l'hiver 1991, la Croatie se défend contre l'agression militaire de la Serbie voisine. Parmi les victimes innocentes de ce conflit, Aleksandra Zec, adolescente d'origine serbe, odieusement lynchée à Zagreb. Une génération après, alors que dans les écoles croates, les élèves serbes continuent d'être assimilés aux "ennemis" d'hier, Oliver Frljić adapte "l'affaire Zec" au théâtre, avec Nina, serbe, née en 2001, dans le rôle-titre. Devant la caméra de Nebojša Slijepčević, les répétitions avec la troupe se transforment en psychothérapie collective, entrecoupée par des plans sur une scène vide hantée par les récits personnels qui s'y déposent en voix- off. Par une savante mise en abyme du jeu/je des acteurs qui travaillent sur leur propre mémoire, mise à distance par le dispositif théâtral, Srbenka délimite un espace public susceptible de briser le cycle de la vengeance. Le film de Slijepčević constitue aussi une puissante réflexion sur une des fonctions possibles de l'art : assécher, mètre par mètre, le cloaque de haine alimenté par les entrepreneurs de la purification ethnique qui continuent de sévir aujourd'hui.