Neuf rôles que se partagent deux comédiens sont au centre d'une intrigue théatrale pour laquelle de multiples dénouements s'étalent suivant le même espace-temps: aujourdh'hui, 5 jours plus tard, 5 semaines plus tard, 5 années plus tard.
La singularité de la mise en scène et de la construction du récit -on n'en attendait pas moins de la part d'Alain Resnais- n'éclipse pas pour autant les savoureux et brillants numéros d'acteurs. Sabine Azéma (très séduisante) et Pierre Arditi s'entendent à merveille dans une diversité de rôles dont chacun exige une composition particulière. Leur connivence est évidente, leur interprétation superbe, nous faisant parfois croire qu'il y a neuf inteprètes.
Le travail de mise en scène est tout en élégance car Resnais (et l'auteur anglais qu'il adapte, Alan Ayckbourn) crée un véritable intérêt pour des personnages pourtant quelconques et un sujet sans relief ( les démêlés sentimentaux d'un couple à bout de souffle). La rusticité des quelques décors anglais reconstitués en studio et l'anachronisme apparent des patronymes anglais (qui contrastent avec les textes du duo Bacri-Jaoui et l'interprétation francisés), la beauté de la photographie et le mariage pimpant des couleurs ajoutent un charme joyeux et enrichissent un sujet généralement fantaisiste, parfois entrecoupé de moments plus amers.
"No smoking" n'est pas précisément une suite mais la deuxième partie d'un même film, à ceci près que la scène initiale entraine une autre situation dont le couple Coombes est cette fois-ci le sujet principal. Comme pour les époux Teasdale, les Coombes ont à résoudre une relation conjugale précaire et tout à fait banale. Sur le même mode que "Smoking", Resnais continue de modifier les destins des différents personnages selon les choix qu'ils font, selon qu'une phrase a été prononcée ou non. Dénués de signification psychologique, les protagonistes n'existent que par leur mise en scène, par l'évidente conviction des deux comédiens et par l'esthétisme coloré des décors factices et de l'éclairage.
En dépit de son aspect théatral, de petites histoire de couples communs, parfois adultères, de ces personnages qui disparaissent et reviennent à tour de rôle pour ne laisser, quoiqu'il arrive, qu'un ou deux interprètes en scène, le film apparait comme l'anti-vaudeville.
Amusant ou plus grave, toujours ludique, le récit pourrait s'étirer, non sans quelques langueurs peut-être, jusqu'à l'infini. Au terme du film, il apparait que cette fameuse cigarette allumée ou pas par sabine Azéma n'a que l'utilité du symbole déterministe invoquant les gestes et postures qui construisent chaque jour notre destin.