Kalifornia est un film rageur, un premier film qui surprend assez venant de Sena, qui ensuite s’est surtout attaché à des produits calibrés, sans forcément perdre son talent de metteur en scène d’action, mais en perdant en personnalité.
Le métrage est un road-movie violent, qui finalement ne recourt pas tant que cela à la violence graphique, sauf à quelques occasions, assez rares pour surprendre du coup. Le scénario est un peu prévisible, un peu facile, dans le sens où on attend plusieurs rebondissements, et où la fin est tout de même très prévue. Le film, malgré ses airs roublards et violents ne parvient pas trop à s’affranchir complètement du schéma hollywoodien, et il en résulte un film plus consensuel et conventionnel qu’il en a l’air sur la forme. Par exemple, vers la fin il y a plusieurs circonstances qui sont incohérentes compte tenu de la nature des protagonistes exposés tout du long. Mais bon, erreurs d’un premier film sans doute, qui ne gâche pas l’intérêt global. Bon rythme, des scènes fortes, un road-movie dynamique et sérieux, pour un film qui possède une réelle personnalité.
Il la doit notamment à son casting. Brad Pitt trouve un de ses meilleurs rôles, indéniablement. Acteur que je trouve souvent trop fade, trop lisse, un peu poseur aussi, ici il est très bon, et finalement peut-être qu’il est davantage destiné à des rôles de méchants, à moins qu’on ne lui donne pas des rôles assez complexes. Reste qu’il impressionne, face à un duo de femmes très costaud et fort bien écrit : Juliette Lewis, actrice très talentueuse et trop rare, et Michelle Forbes, impressionnante elle aussi, doté d’un rôle féminin très solide, et dont on regrettera pareillement la rareté au cinéma. Enfin, David Duchovny est là, échappé du petit monde de la télévision, et même s’il est un peu en retrait au milieu des trois autres (faut dire qu’il a le rôle le plus attendu du lot), il ne démérite pas.
Formellement Sena réalise un très bon film. S’emparant de décors originaux qui rappelleront cependant l’ambiance des road-movie classiques, il distille une esthétique très moderne, s’appuyant sur une photo travaillée, sur des plans fouillée (l’ouverture est excellente) et sur une violence graphique judicieusement utilisée. La bande son est un peu en retrait, dommage dans un film de ce genre, mais enfin, il y a tout de même de bonnes choses.
Kalifornia est imparfait c’est vrai, mais ça reste un bon film coup de poing. Sans être aussi iconoclaste qu’il aurait pu l’être sur le papier, ça reste un très bon film d’acteurs, un film visuellement qualitatif et qui parvient à maintenir l’intérêt de son spectateur tout du long. Bref, ça reste une petite réussite, et probablement le meilleur film de Sena. 3.5