Nouveau monstre, nouvelle culture, nouveau look. George Waggner a la lourde tâche d’introduire un personnage très discutable dans l’univers des monstres Universal. Après avoir exploité le succès de Frankenstein à travers quelques suites de bons goûts, l’homme-loup apparaît comme un cousin éloigné des vampires et du mythe de Dracula. Entre le glauque et de subtil, on parvient à élargir cette famille de monstres, liés aux hommages de ceux qui ont précédés.
Essentiellement nocturne, on nous plonge dans un studio dont les décors bluffent. On s’y croit à l’air libre, tout en baignant dans l’atmosphère dérangeant qui souligne les superstitions qui en découlent. L’Angleterre devient alors une terre où ce genre de croyance alimente les méfaits de la lycanthropie. Il s’agit d’un maléfice qui ronge l’âme et qui fait resurgir des instincts primaires. Larry Talbot (Lon Chany Jr.), jeune héritier d’un domaine, correspond parfaitement à la définition que l’on s’efforce de développer. Cet homme, aussi touchant, tendre et cultivé est tranché entre deux bords, celui de la rationalité et d’une malédiction qui le mettra à l’épreuve. Innocent, il finit tout de même par se faire agresser. Et de cet affrontement dont il ne ressort pas indemne, il devient le monstre qui l’a attaqué, comme si cette rencontre l’attirait dans le côté obscur. Il découvre ainsi une nature animale qui le contraint à réagir à ses pulsions, sous l’effet de la lune.
On peut ainsi y voir une double personnalité dans ce personnage tourmenté, qui peine à rester crédible une fois transformé. Le maquillage ne lui rend pas service, malgré la prestation de l’acteur. Le concept de bête incontrôlable nous en fait immédiatement écho au cas du docteur Jekyll et de M. Hyde. Cependant, on ne donne pas assez de temps et de relief à cette face cachée, indomptable, même pour le père du concerné, Sir John Talbot (Claude Rains). Tout le jeu de cache-cache prend forme de façon honnête, tout en faisant le pont avec la montée du Nazisme au moment même où le film est réalisé. Une discrimination sans concession, la chasse au lieu de la compréhension et de la curiosité, tous les facteurs peuvent rappeler ce naufrage où l’humanité s’est abandonnée dans un conflit qui se veut uniquement bestial.
« Le Loup-Garou » convainc par son décor brumeux et presque authentique. Tout est présent afin que l’on baigne dans l’étrangeté et ce bon point rattrape bien les déchirures scénaristiques. La métaphore se transmet correctement afin que l’on s’identifie rapidement aux personnages, superstitieux ou non. Le passif d’un homme parvient à nous captiver, à défaut de nous émerveiller. Néanmoins, les bases ont été posées, en attendant de découvrir de nouvelles aventures aux côtés de la bête.