Les Croix de bois est une adaptation de l’œuvre écrite par Roland Dorgelès, en 1919. L’histoire s’inspire du vécu de l’auteur durant la Première Guerre mondiale, et son titre fait référence aux croix de bois posées au-dessus des cadavres, le long des chemins du front. L’écrivain a d’ailleurs participé à l’écriture du scénario et au découpage.
Le film a été tourné en Champagne, aux alentours de Reims, sur un vrai champ de bataille (les ruines du fort de la Pompelle et dans les chaos du Mont Cornillet), dont l’armée avec autorisé l’accès. Cependant, le tournage a été interrompu à plusieurs reprises, car des corps et des obus remontaient à la surface.
Dans une volonté de vérité, Raymond Bernard choisit un casting entièrement composé d’anciens combattants comme figurants. Charles Vanel se souvient à ce propos : "Nous n’avons pas eu besoin de jouer, nous n’avons eu qu’à nous souvenir". L’Armée française avait mis à disposition du cinéaste des bataillons de jeunes recrues, mais le metteur en scène ne fut pas convaincu par leur attitude.
Raymond Bernard évoque le souvenir de la première projection du film à Montmartre, dans la salle du Moulin Rouge : "Soudain je reçu un choc. Revenant à la réalité je réalisai que c’était mon voisin Roland Dorgelès qui, discrètement, pour attirer mon attention, venait de me donner un coup de coude. Comme je l’interrogeais du regard, d’un mouvement de tête il me montra notre illustre invité. Et je vis que le Président de la République pleurait. Ce fut l’instant le plus émouvant de ma carrière."
Le réalisateur tenait à projeter le film en avant-première aux anciens combattants de son régiment. Une expérience forte en émotion qu'il raconte : "Quel accueil allaient-ils faire à la résurrection que nous avions tentée ceux qui avaient réellement vécu les heures, qu’avec tant d’acharnement, nous nous étions efforcés de fidèlement évoquer ? J’avais pris place dans la cabine de projection car je tenais essentiellement à régler moi-même le son et, durant toute la durée du spectacle, je ne lâchai pas le potentiomètre qui permettait de le commander. (…) Avant de quitter la salle je fus nommé "soldat d’honneur" du régiment qui m’avait servi de modèle. Ce titre ne voulait rien dire ? Pourquoi ? Il signifiait peut-être que j’avais bien travaillé. Et j’en fus très fier."