Voilà un film qui divise! Et qui est globalement plutôt mal coté... Pour ma part, c'est avec enthousiasme que je vais prendre sa défense, car il constitue à ce jour peut-être le meilleur film de Ruiz. Il est évident que «Klimt» (2006) est un ouvrage difficile d'accès. Il est nécessaire pour l'aborder de connaître au préalable l'oeuvre de Klimt, mais aussi la peinture viennoise de l'époque, de Schiele à Kokoschka. Il faut être informé de ce que sont la «Sécession» et la musique viennoise perdue entre les derniers reliefs des valses de la famille Strauss et les expérimentations avant-gardistes de la seconde école de Vienne. Il faut savoir qui est Wittgenstein et connaître un peu le contexte politique et social d'un empire austro-hongrois à la dérive. Pourtant, on ne peut pas légitimement reprocher tout cela au réalisateur chilien, à moins de faire de l'inculture une vertu. Mais là n'est pas l'essentiel! Tout ce contexte ne constitue en réalité que l'arrière-fond d'un magnifique hommage à Klimt, contexte qui nous est présenté selon la manière fantasmatique dont le peintre se le représente depuis son lit d'hôpital. Car Ruiz renoue à sa manière avec le projet de Watkins de nous reconduire aux sources subconscientes de l'acte créateur. Et, si l'oeuvre du peintre est assez peu présente, c'est en réalité tout le film qui constitue une peinture «à la manière» de Klimt, manifestant une incontestable pénétration de l'esprit de celui-ci. Il faut dire que le style plutôt chargé de Ruiz (lequel me dérange souvent dans ses autres films) est ici tout à fait en situation, rejoignant le goût pour la surcharge ornementale typique du peintre autrichien. En bref, un film somptueux qui, je l'espère, aura sa revanche...