En maître incontesté de l'humour noir, Albert Dupontel nous fait part de son incroyable talent une fois encore. Un talent trop rare au sein de la comédie française. Un personnage unique, trublion des normes universelles, farfadet du second degrés, autant psychopathe que génie. Son identité lui colle à la peau, et son cinéma découle d'une fantaisie très chargée émotionnellement. Rien que le titre prête à réfléchir: pourquoi Enfermés dehors?! On s'interroge d'entrée de jeu, se questionne sur la manière dont on va nous manger. Cette folie artistique qui transpire de chaque plans, cet humour déjanté, complètement barré, psychédélique, les gros plans nauséeux, les acrobaties en tous genre; mais quel spectacle! Combien de réalisateurs oseraient faire de tels choix et les assumer jusqu'au bout? Je vous le demande. A ma connaissance, très peu. L'humoriste ne s'encombre pas de fioritures, de chutes prévisibles et de niaiserie potaches. Je dirais même que c'est tout l'inverse, le tragicomic dans toute sa splendeur, cartoonesque parfois, mais toujours avec ce soucis du détail, cette subtilité qui dégage une puissance atypique. On ne sait même pas par où commencer, dérouté par la subtilité du message. La précarité ambiante étant le centre névralgique des débats. Si les sans abris sont ici dépeints d'une manière caricaturale, les agents de la maréchaussée en prennent aussi pour leur grade. C'est en réalité une satire fichtrement intelligente sur un aspect de notre société. Cet homme désœuvré, délabré psychologiquement, profitant d'une opportunité hors du commun pour se rendre utile, donner un coup de main; rien que ça suscite le respect. L'aspect judiciaire étant traité avec beaucoup d'autodérision, on s'en doute. Et même le casting envoi du lourd avec un jeu d'une précision exemplaire. Preuve en est qu'une équipée de seconde zone est capable de prodige. Mention spéciale pour l’énergie déployée par Nicolas Marié. En definitive, cette oeuvre ne laisse pas indifférent. C'est une pépite en son genre, un hommage remarquable au burlesque et au comique de situation. Avis aux adorateurs de cinéma à contre courant. 4,5/5