Il y’a cinquante ans, ce film aurait été un grand et fameux succès. Il y’a cinquante ans moins de monde aurait été dérangé par des acteurs plats et un scénario tellement incompréhensible qu’on en finit la projection avec un mal de tête infernal. Mais non, en fait, même si ce Brian de Palma serait sorti alors que le cinéma ne serait même pas né, le septième art aurait été brûlé, exterminé juste à cause de son scénario abrutissant. Les acteurs jouent mal, ils n’y croient pas, il suffit de voir Eckhart et Johansson en couple d’énervés compulsifs pour se rendre compte de la supercherie. Ils ne sont que d’immondes caricatures, dont le double-sens soi-disant présent dans leur relation ne fait qu’enfler un peu plus notre esprit critique. Certes, c’est bien filmé : du simple travelling toujours aussi bien maîtrisé par De Palma se rejoint le gros plan en grue, inventif mais lassant car répétitif. Des plans mous aucunement aidés par des lignes de dialogues jetées à la caméra par un casting endormi dès le départ. La présence d’un Josh Hartnett mollasson dans le rôle principal n’aide en rien. Il a su se débrouiller dans bon nombre de rôles, dans celui-ci il met son charisme en suspens et ses traits physiques en léthargie. On s’ennuie : le côté thriller est raté, aucun suspense n’en ressort, la voix OFF est retorde, le tout est mal pensé, mal fabriqué, idiot et surtout sans âme. Deux heures complétées par leur suite d’errements de « détectives » boxeurs du dimanche dans une enquête qui patine tellement que le spectateur, au final, s’en fiche plus que tout. Les révélations, censées apporter de la surprise et un certain renouvellement dans l’intrigue, ne sont qu’au final des passages gênants qu’on est bien heureux d’avoir passé. Il y’a eu des hauts et des bas dans la carrière de De Palma, mais ici on est dans les mêmes catacombes qu’avec une « Femme Fatale », et le « Dahlia Noir » était censé représenter le grand retour de De Palma derrière la caméra, quatre années après son arrêt contesté par les fans de toute activité cinématographique. Sacrée déception, alors qu’on retrouve les mêmes défauts, ces vides si présents dans l’écriture ou dans le montage qu’on aperçoit de plus en plus à mesure que ce réalisateur vieillit. Pour qu’on puisse retrouver un sens dans le travail donné par De Palma, il faudrait déjà commencer par lui offrir un contexte, c’est-à-dire un scénario affûté et bien écrit par un scénariste indépendant, et non plus Hollywoodien ni même une adaptation d’un vieux livre dont on voit ressortir des personnalités inertes d’idiotie et d’imbécilité. C’est aujourd’hui les valeurs dominantes dans la fin de carrière de ce metteur en scène, et on retrouve ça aussi chez Woody Allen, chez Terrence Malick voire chez un Spielberg parfois. Une partie de ces réalisateurs partent vers la simplicité et l’autre vers la difficulté scénaristique, tandis que l’un plonge dans l’aventure déraisonnée sous forme de thriller ou de film de guerre, l’autre avance dans le délire philosophique sans queue ni tête qui ressemble plus à une perte de temps qu’à autre chose. Il y’a donc un fossé dans le cinéma des seniors d’aujourd’hui, alors qu’une très faible poignée vise juste, les deux autres parties se dirigent vers une façon de faire barbante et peu enthousiasmante, car beaucoup moins maîtrisée qu’il y’a maintenant vingt années. Et c’est tout à fait normal. Qu’est-ce que le « Dahlia Noir »? Un vide scénaristique sans vie, prolongé par des acteurs à ce point mal dirigés qu’ils ont dû être bien contents lorsqu’ils ont quittés le plateau. Même sentiment vécu pour le spectateur lorsqu’il a quitté la salle. Un sentiment de partagé, un!