Dupont Lajoie : les secrets du tournage

En dénonçant le racisme ordinaire qui peut être présent au sein de la classe moyenne française, Dupont Lajoie s'inscrit de manière parfaitement logique dans le parcours du metteur en scène Yves Boisset, lequel a cherché à plusieurs reprises, via ses films, à défendre ses convictions de gauche en s'inspirant d'évènements réels. Considéré comme un cinéaste politique, Boisset a passé sa carrière à aborder des sujets qui fâchent, comme par exemple l'affaire Ben Barka (L'Attentat, 1972), la guerre d'Algérie (R.A.S., 1973) ou encore les méfaits de la télévision (Le Prix du danger, 1982).

Dupont Lajoie est inspiré de réels meurtres racistes ayant eu lieu à Marseille au début des années 1970.

La majorité des scènes ont été tournées sur les plages de Fréjus dans le Var.

Comme souvent tout au long de sa brillante et polémique carrière, Yves Boisset a dû se battre contre la censure. Le film a été interdit aux moins de 13 ans en raison de la scène de viol et celle du meurtre suivant la ratonnade. A l'origine, Dupont Lajoie devait être interdit aux moins de 16 ans. Le metteur en scène a par la suite expliqué que le moment où le personnage interprété par Isabelle Huppert se fait violer par Georges Lajoie (Jean Carmet) est celui ayant le plus choqué la censure. Cette dernière voulait notamment qu'une image où l'on voyait le sexe d'Huppert soit supprimée, alors que Boisset affirme avec certitude qu'il n'a jamais filmé cette partie du corps de l'actrice !

En comptabilisant environ 1,5 millions d'entrées sur le sol français, Dupont Lajoie est le plus grand succès du cinéaste Yves Boisset. Anecdote amusante : lors de sa sortie, la salle était presque vide dans un cinéma des Champs-Elysées où les producteurs et Boisset s'étaient rendus, mais une ouvreuse âgée a dit au réalisateur que - d'après les réactions des spectateurs qu'elle a observées - le film sera un succès. Et c'est le vendredi de la semaine de sortie de Dupont Lajoie que les gens ont commencé à se déplacer en masse pour le voir.

L'une des grandes forces de Dupont Lajoie réside dans son casting. A titre d'exemple, Jean Carmet est un acteur plutôt connu pour ses rôles de gentils, mais il interprète ici un personnage détestable et emblématique de ce racisme ordinaire que le film s'attache à décrire. De même, Pierre Tornade et bien d'autres avaient pour habitude de s'afficher dans des comédies, accentuant ainsi le côté surprenant et choquant de Dupont Lajoie. Le film commence ainsi un peu à la manière d'une comédie, pour glisser petit à petit vers le drame inspiré d'un fait divers des plus sordides.

Des évènements violents (bagarres, intimidation, etc.) eurent lieu lors du tournage du film et au moment de sa sortie en salles, la plupart résultant du mécontentement de bandes d'extrême droite voyant d'un mauvais œil ce film dénonçant le racisme de gens ordinaires. Plusieurs projections de Dupont Lajoie durent ainsi être annulées.