La Demoiselle d'honneur a été présenté en Sélection officielle, hors compétition, à la 61e Mostra de Venise.
Le cinéaste explique pourquoi il a choisi d'adapter La Demoiselle d'honneur (The Bridesmaid), roman de Ruth Rendell, publié en 1989. "Ruth Rendell est née la même année que moi [1930], et je me suis aperçu que, depuis quatre ou cinq livres, elle s'intéresse à des gens assez jeunes, généralement des couples de classe sous-bourgeoise, et moi aussi je ressentais le besoin de parler de gens plus jeunes. Ce bouquin-là avait sur les autres un double avantage : il était plus facilement transposable en France et, surtout, il permettait d'aller assez loin et assez profond avec un argument d'une simplicité absolument extraordinaire. Ce qui devait permettre aux gens de comprendre très vite où on les emmene, c'est-à-dire au fond du puits, et, en connaissance de cause. De toute façon, étant donné qu'il y a un vague suspense, je me suis dit qu'ils ne perdraient pas entièrement leur temps."
Dix ans après La Cérémonie, Claude Chabrol adapte de nouveau un roman de Ruth Rendell. Les polars à succès de cet auteur britannique ont inspiré d'autres cinéastes français : Claude Miller (Betty Fisher et autres histoires, 2001) et Gilles Bourdos (Inquiétudes, 2003), mais également Pedro Almodovar (En chair et en os, 1997).
On retrouve dans La Demoiselle d'honneur une partie du casting du précédent film de Chabrol, La Fleur du mal : Benoît Magimel (le cinéaste dit de lui: "Il me fait penser à Montgomery Clift jeune"), Suzanne Flon et Bernard Le Coq étaient au coeur de cette trouble histoire de famille sortie en 2003.
Laura Smet avait été pressentie pour jouer dans le précédent film de Claude Chabrol : La Fleur du mal. Au générique de ce film figurait notamment Nathalie Baye... la mère de Laura Smet. Le cinéaste évoque ainsi celle qui incarne Senta : "[elle] a tous les culots. Je lui avais demandé de paraître ingrate dans la première scène ; elle s'est avachie, s'est avancée lourdement. On la trouve lourde, et, peu à peu, une vraie beauté se dégage d'elle. Elle a un côté magique." Quant à Solène Bouton, qui interprète la soeur délurée de Philippe dans La Demoiselle d'honneur, elle avait failli jouer dans Merci pour le chocolat, mais c'est finalement Anna Mouglalis qui avait été choisie.
Comme dans La Fleur du mal, avec Benoît Magimel et Mélanie Doutey, les héros de La Demoiselle d'honneur sont des jeunes gens. Claude Chabrol s'explique : "Ce besoin de parler des jeunes est venu peu à peu. Ce n'est pas parce qu'on est moins jeune qu'on ne peut pas comprendre, et surtout, ne pas voir la grossièreté des pièges dans lesquels ils peuvent tomber, la façon dont les choses se présentent (...) Le problème de tous les jeunes est d'établir un équilibre dans la tête entre le rationnel et le fou, la raison et la passion, et c'est exactement ça qui m'intéressait. C'est le sujet même du film, et il est particulièrement excitant. Il ne faut pas arriver à l'absurdité de leur dire : "soyez raisonnables", mais pas non plus pousser la démagogie jusqu'à dire "soyez fous"".
Apportant un soin particulier aux personnages secondaires, Chabrol a confié le rôle du clochard à un de ses comédiens-fétiches : Michel Duchaussoy. Héros de Que la bête meure aux côtés de Jean Yanne en 1969, il a tourné dans plusieurs films signés par le cinéaste à la même période : La Femme infidèle (1969), La Rupture (1970), Juste avant la nuit (1971) et Nada (1974). Il est également apparu dans Le banc de la désolation, un téléfilm réalisé par Chabrol dans le cadre d'une série composée d'adaptations des nouvelles de Henry James. La Demoiselle d'honneur marque également les retrouvailles de Chabrol avec Aurore Clément, 22 ans après Les Fantômes du chapelier.
Adepte des décors naturels, Claude Chabrol explique pourquoi il a choisi de tourner en partie en studio les scènes qui ont pour cadre la maison de Senta : "La maison était un élément fondamental, un des sujets même de l'histoire. Nous en avons cherché une dans la région de Nantes. Nous en avons vu des dizaines, mais c'est dans les environs de Paris que nous avons fini par trouver celle que nous cherchions. C'est une maison habitée par un couple d'âge mûr. Nous l'avons juste "moisie" un peu, mais pas beaucoup. Par contre nous n'avions pas le sous-sol. Dans la cave, il y avait une porte sur le côté (...) elle donnait sur un espace qui était vraiment le décor que je cherchais, mais un peu petit. Nous avons donc recréé cet espace à la taille voulue en studio. Et comme il y a avait la coproduction allemande, nous l'avons fait à Munich, ce qui ne manque pas de chic (...) Le décor en studo a donc moins de "réalité". Mais qu'il soit légèrement fanatsmagorique va dans le sens l'histoire."
Claude Chabrol revient sur un motif récurrent de La Demoiselle d'honneur : l'escalier. " L'escalier, c'est un peu comme celui du Ciel peut attendre, qui fait des allers et retours entre le ciel et l'enfer. Ce qui est amusant ici, c'est que c'est en montant qu'on arrive au tréfonds. L'escalier me sert toujours pour symboliser cette donnée-là : c'est un déplacement de niveau des choses. Mais, bien sûr, on ne va pas faire que plus c'est bas, plus c'est moche, et plus c'est haut, plus c'est beau. J'ai toujours aimé les escaliers, et toujours aimé tourner dans les escaliers. Je suis un bon tourneur d'escaliers et il n'y en a pas énormément (...) Carné est un excellent tourneur d'escaliers, il n'y a qu'à voir Le Jour se lève et Les Portes de la nuit. Je ne voudrais pas vanter mon travail par rapport à celui de Carné, mais il y a plus de sens dans mon escalier que dans celui de Carné. Mon escalier est plus métaphysique, qu'on se le dise."
Comme dans plusieurs de ses films précédents, on retrouve plusieurs proches de Claude Chabrol au générique de La Demoiselle d'honneur : on retrouve devant la caméra Thomas Chabrol et son regard inquiétant dans le rôle du Lieutenant Laval. L'autre fils du réalisateur, Matthieu Chabrol, a composé la musique du film (il s'agit de leur 17ème long-métrage en commun). La scripte n'est autre que son épouse, Aurore Chabrol, et c'est la fille de celle-ci, Cecile Maistre, qui est assistante à la mise en scène.
Téléspectateur assidu, Claude Chabrol glisse souvent des extraits d'émissions dans ses films : dans une scène de La Demoiselle d'honneur, les personnages regardent ainsi le jeu "Tacotac", et, pendant le générique de fin, le nom du réalisateur apparaît sur un écran de télévision... Dans son précédent film, La Fleur du mal, Chabrol avait confié un petit rôle à Dominique Pivain, qui fut l'une des hôtesses du "Juste prix", jeu télévisé des années 90 dont le cinéaste a souvent répété qu'il déplorait la disparition. Ajoutons qu'au cours de l'été 2004, il a présenté sur France 3 une série d'émissions relatant l'Histoire de la télévision. Le metteur en scène n'a pourtant consacré à cette passion qu'un seul de ses films, le corrosif Masques, avec Philippe Noiret en animateur cynique, en 1987.
Dans La Demoiselle d'honneur, un personnage, qui a été assassiné, porte le nom de "Lavoignat". Il s'agit d'un clin d'oeil du malicieux Claude Chabrol, car ce nom fait référence à Jean-Pierre Lavoignat, journaliste qui avait étrillé un des précédents films du cinéaste, Merci pour le chocolat, dans les pages de Studio Magazine. Dans le "tableau de chasse" du réalisateur, Lavoignat succède ainsi à Jean-Pierre Dufreigne, journaliste à "L'Express", épinglé quant à lui dans Merci pour le chocolat.
Lors d'une scène de restaurant, on entend un client interpeller le personnel. Sa voix est celle d'un fin gourmet nommé Claude Chabrol.