Iznogoud est la première adaptation cinématographique des bandes dessinées créées par le scénariste René Goscinny, le père d'Astérix, et le dessinateur Jean Tabary, dont les personnages apparurent pour la première fois en 1962 dans les colonnes des journaux Record et Pilote. Ce personnage, petit et méchant, deviendra le héros très populaire de près de trente ouvrages. Mais Iznogoud ne faillit pourtant jamais devenir grand vizir, puisque Goscinny envisagea à l'origine d'en faire... un détective !
Le désir de voir Iznogoud évoluer sur grand écran germe dans l'esprit de René Goscinny dans les années 70. Le scénariste rédige alors un scénario avec Pierre Tchernia et imagine même Louis De Funès dans le rôle du vizir colérique, accompagné par Philippe Noiret et Michel Galabru. Mais le coût prohibitif des effets spéciaux, puis le décès brutal du scénariste en 1977 mettent un terme à l'aventure... du moins provisoirement.
Patrick Braoudé, le réalisateur de Neuf mois, a l'idée de faire une adaptation live des aventures d'Iznogoud lorsqu'il tourne Deuxième Vie. De retour du Maroc où il a réalisé quelques scènes du film, ses enfants regardent Aladdin à la télévision, Astérix et Obélix contre César sort sur les écrans... Une association d'idées lui donne soudain envie de réaliser Iznogoud. Avec le soutien de M6, il relance alors le projet d'une adaptation cinématographique. Le trublion cathodique Michaël Youn est choisi pour incarner le vizir et le tournage d'Iznogoud débute en mars 2004, au Maroc. Le rêve de René Goscinny se sera finalement réalisé...
Pour le réalisateur Patrick Braoudé, Iznogoud, dont le voeux éternel est de devenir "calife à la place du calife" est "un personnage assez rare dans la BD car il est vraiment méchant. C'est l'anti-héros type mais il est hyper attachant. (...) C'est un personnage obsessionnel qui n'a qu'une idée en tête : prendre la place d'Haroun El Poussah. Il le déteste et tous les moyens sont bons pour arriver à ses fins."
Patrick Braoudé est élogieux lorsqu'il parle de Michaël Youn, l'incarnation du vizir Iznogoud sur grand écran : "Avec Michaël, nous avons eu une grande complicité avant et pendant le film, il a été très à l'écoute, très disponible, très intelligent. Je ne lui demandais pas de faire du Michaël Youn. (...) C'était évident que c'était le personnage. Il a cette puissance de comédie que je recherchais comme metteur en scène... mais aussi comme spectateur. Cela faisait longtemps que j'attendais une vraie relève, un acteur qui nous rappelle les grandes comédies françaises des années 60-70. Je crois que Michaël est de ceux-là, et pas seulement un trublion de la télé qui peut sauter sur les tables et se mettre à poil... D'abord, pour faire cela, il faut être bien dans sa peau, dans sa tête... et oser... Oser aller très loin. N'est-ce pas ce qu'on demande à un acteur de comédie ? (...) Il a énormément travaillé. Il était souvent assis sur une chaise, concentré sur le scénario."
Pour Patrick Braoudé, "Iznogoud se doit d'être un film populaire, familial. Mais j'ai eu envie que ce soit un film à double entrée. Il y a des gags que les petits enfants vont comprendre d'une certaine manière et leur parents autrement, les ados comprendront d'autres allusions. J'ai voulu qu'il y ait plusieurs lectures possibles. Les enfants, d'ailleurs, ont grandi. Shrek et Titeuf sont passés par là."
Le réalisateur Patrick Braoudé explique comment il s'est à la fois inspiré de l'esprit de la BD tout en ajoutant des éléments issus de sa propre imagination : "Le film n'est pas une compilation. Je voulais être libre, qu'Anne Goscinny (ndlr : la fille de René Goscinny) et Jean Tabary me fassent confiance. Je leur ai dit que je voulais les droits des personnages pour inventer une histoire. J'ai relu beaucoup de BD mais les histoires ressemblaient beaucoup à des courts-métrages. Il y avait beaucoup de petites histoires mais l'ensemble ne faisait pas un film. (...) C'est un scénario totalement original. (...) Il y a un mélange entre les personnages de la BD et ceux que j'ai inventés, et même à ces derniers j'ai essayé de donner comme nom des jeux de mots car ce qui caractérisait la BD, c'étaient les calembours que Goscinny aimait faire."
Neuf mois de préparation ont été nécessaires pour concevoir et fabriquer les décors d'Iznogoud. 1200 costumes, 1000 armes et 350 plans d'effets spéciaux furent par ailleurs créés pour les besoins du film. Enfin, le film bénéficie de la présence de pas moins de 8000 figurants. Patrick Braoudé, devant le gigantisme de l'entreprise, et en guise d'inspiration, s'est replongé dans les DVD de Ben-Hur, Lawrence d'Arabie, Les Dix Commandements, Le Voleur de Bagdad ou encore Star wars, qu'il a directement emmenés au Maroc. Il explique : "Je voulais que les décors et les costumes fassent très très vrais. Le coût de la fabrication des costumes et des décors devait être très élevé car il fallait créer un Orient fantasmé mais vrai sans pour autant être réel. C'est à dire qu'on ait l'impression qu'un jour, il y a très longtemps, la Cité de la Magnifique a été vraiment comme cela, sans pour autant qu'elle soit réaliste. Comme dans Star wars ou Le Seigneur des anneaux, les mondes sont inventés et, pourtant, ils existent. Je voulais que l'on y croit aussi. C'était cette orientation qu'il fallait donner au film."
La musique tient un rôle très important dans Iznogoud. Patrick Braoudé, qui avait écrit une première chanson avant de rencontrer Michaël Youn, en a écrit une seconde pour lui, puis les choses se sont accélérées. Ce fan des comédies musicales américaines explique : "Progressivement, de nouvelle chanson en nouvelle chanson, le film est devenu un film musical, mais pas une comédie musicale, non, plutôt comme un Disney, comme Aladdin ou La Belle et la bête. Il y a une histoire et, tout d'un coup, les personnages se mettent à chanter. Cette idée se mariait très très bien avec Iznogoud qui était un conte. Et avec l'univers des Mille et une nuits qui pour moi permettait au film de se rapprocher d'un film indien que j'avais adoré à sa sortie, Devdas. En tout, il y a finalement huit chansons qui participent de la comédie."
Anne Goscinny, la fille de René Goscinny, ainsi que Jean Tabary, le dessinateur de la BD, ont été sous le charme du long-métrage de Patrick Braoudé. Celui-ci a en mémoire un moment particulièrement important, lorsque Tabary s'est rendu sur le plateau du film. Il revient sur cet épisode émouvant : "Il a vécu pendant 40 ans avec Iznogoud et, tout d'un coup, il découvrait tous ces personnages qu'il avait dessinés en chair et en os, il m'a fait un merveilleux compliment qui caractérise sa générosité et la grande bonté qu'on lit dans le regard de cet homme quand on le découvre pour la première fois. Il m'a dit : "C'est plus beau que ce que j'ai dessiné."" Jean Tabary avait en projet de faire la bande dessinée tirée du scénario du film en caricaturant les acteurs. Il avait ainsi demandé à ces derniers la permission de les dessiner. Mais, tombé malade, il ne put mener à bien ce projet.
Iznogoud lorgne du côtés des comédies musicales américaines dont raffole Patrick Braoudé : celles de Fred Astaire, de Gene Kelly ou de Frank Tashlin. Le film rend également hommage aux films des Marx Brothers ainsi qu'à Tex Avery et aux dessins animés Disney, pour tout son côté "cartoonesque".
Aux côtés de Jacques Villeret, spécialiste de renom du grand écran, de nombreuses vedettes de la télévision et de la scène figurent au générique d'Iznogoud : Michaël Youn dans le rôle-titre, mais également Magloire, son ancien compagnon de l'émission Morning Live sur M6, ainsi que les comiques Franck Dubosc, Kad et Olivier. Patrick Braoudé insiste d'ailleurs sur l'aspect "gonflé" d'un tel casting, puisqu'à l'époque où il annonça les noms, aucun des comédiens n'avait la renommée qu'il possède aujourd'hui.