Andrzej Wajda à propos de Kanal : " En 1957, la principale difficulté de Kanal était due au fait que le pouvoir tenait à éviter le sujet de l’Insurrection. Alors quoi qu’on montre, le spectateur y verrait certes la victoire symbolique de l’Insurrection. Mais montrer l’échec de l’Insurrection entraînerait des conséquences très douloureuses, la conscience que, sur l’autre berge, l’Armée rouge attendait et n’était pas venue en aide à l’Insurrection. Je pense que la force du scénario est due au fait que c’est un récit de première main, de quelqu’un qui est passé par là, qui a vécu cette épreuve. Cela donne au film cette violence authentique. (…) Mais cet excellent scénario, un des meilleurs que j’ai jamais eus entre les mains, a failli être enterré. Et il a attendu jusqu’à ce que Khrouchtchev prononce son célèbre rapport sur les crimes de Staline, au XXe Congrès du Parti communiste de l’URSS. "
Andrzej Wajda à propos de Kanal : " Le studio de Łódź s’est montré totalement opposé à la construction des égouts sur ses plateaux. (...) On devait donc tourner en extérieur. Nous avions la place pour construire un labyrinthe d’égouts, [dont l’auteur était Mann, celui qui, plus tard, a fait Cendres et diamant]. Le labyrinthe étant à l’extérieur, il fallait évidemment le couvrir soigneusement pour que l’éclairage, en passant par des fentes, ne trahisse pas le fait que c’était un décor. Bien sûr, ça nous angoissait, mais en même temps, ça permettait d’obtenir une plus grande illusion. Nous avons pu aussi construire des trappes par lesquelles on voyait le ciel et pas les projecteurs. Ça donnait l’impression que, soudain, on passait de l’obscurité à la lumière, violente et aveuglante. "
Andrzej Wajda à propos de Kanal : " A l’Ecole de Cinéma, j’ai eu la chance de voir les films de Buñuel. Que peut-on voir de Buñuel dans Kanal ? Justement, le monde auquel on ne s’attendait pas, comme si on en voyait un autre versant, son côté humour noir, son paradoxe, comme s’il était concentré. Buñuel était l’enfant du surréalisme. Dans ces égouts, qu’on le veuille ou non, même si le film montre les événements réels, l’esprit surréaliste est néanmoins présent. "
Andrzej Wajda à propos de Kanal : " Les premières projections de Kanal en Pologne ont reçu un accueil froid. Le public, attendait un film différent. Ils attendaient un film avec un drapeau flottant au-dessus de la barricade. Alors que ce qu’ils ont vu en était la négation. Les critiques dans les journaux étaient, je dirais, pour le moins réservées. Sinon plus. Le nouveau patron du cinéma, M. Leonard Borkowicz a eu l’idée de l’envoyer au Festival de Cannes. Le film a été accueilli par un long silence, comme si les spectateurs étaient écrasés par le poids de la tragédie qu’ils venaient de voir. Ensuite, il y a eu des applaudissements… "